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FRANÇOIS VILLON. A 01 avait copié le roman du Pet-au-Diable, Petit-Jehan, un bon cro- cheteur, aussi « maître de l’épée, » Petit-Thibaud, qui savait forger des « rois David, » et un religieux picard, dom Nicolas. Une après- midi, Guy Tabarie rencontra Villon avec Colin , et Villon lui dit d’acheter des provisions pour dîner à la taverne de la Mule. Là ils se retrouvèrent tous les six et dînèrent jusque vers neuf heures du soir. Après le dîner, François Villon, Colin de Cayeux et dom Nico- las adjurèrent Guy Tabarie de ne rien dire de ce qu’il allait voir ou entendre, ce qu’il promit. Puis ils passèrent tous dans la maison de maître Robert de Saint-Simon, en escaladant un petit mur bas; où ils se dépouillèrent de leurs gippons, c’est-à-dire de leurs tuni- ques à manches. Guy Tabarie resta pour garder les vêtemens et faire le guet. Les autres emportèrent un râtelier de la maison de maître Robert, à l’aide duquel ils franchirent le grand mur de la cour du collège de Navarre. Il était dix heures quand ils disparu- rent sur la crête de la muraille. Guy Tabarie les attendit jusqu’à minuit. Ils revinrent, portant un sac de grosse toile et lui dirent qu’ils avaient « gagné » 100 écus d’or, dont ils lui donnèrent 10 aussitôt afin d’être sûrs de son silence. Après quoi ils le mirent à l’écart et firent le partage entre eux; d’où Tabarie se douta quil y avait plus de 100 écus. Enfin, ils le rappelèrent et lui dirent qu’il y avait encore « 2 écus de bons » dont ils pourraient bien tous dîner le lendemain, — car Guy Tabarie, qui copiait les manuscrits, était aussi l’intendant de bouche de la petite bande. Le jour sui- vant, ils avouèrent à Tabarie que chacun d’eux avait eu pour sa part 100 écus d’or. Pour François Villon, il annonça presque aus- sitôt à ses complices qu’il partait pour Angers. Il y avait, disait-il, un oncle religieux dans une abbaye. Là il voulait se renseigner sur (( Testât » d’un autre vieux moine qui devait avoir 500 ou 600 écus. Après avoir étudié l’affaire, il reviendrait en parler à ses compagnons, et ils iraient tous à Angers pour « desbourser » le moine. Ce mot « desbourser » dont se servait Villon est l’un de ceux qui figurent dans ses ballades en jargon. De sorte que la pe- tite bande parisienne « devoit quelque jour apprester toute son artillerie pour destrousser quelque homme et ils n’attendoient autre chose qu’ils poussent trouver quelque bon plant pour frapper dessus. » Il paraît bien que le départ de Villon pour Angers n’était pas une fuite pour l’amour de Rose ou de Catherine de Vaucelles.. Ce sont là de belles raisons littéraires qu’il donna dans le Petit Tes- tament, Il ne dit pas plus vrai, quand il parle de ses vieux habits, ses pauvres châssis tissus d’araignées, son encre gelée, faute de TOME cxii. — 1892. 26 I