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mets partout, dans tous les vases ; j’en blanchis le salon, dont Marceline, pour l’instant, est absente. Déjà je me réjouis de sa joie… Je l’entends venir. La voici. Elle ouvre la porte. Qu’a-t-elle ?… Elle chancelle… Elle éclate en sanglots.

– Qu’as-tu ? ma pauvre Marceline…

Je m’empresse auprès d’elle, la couvre de tendres caresses. Alors, comme pour s’excuser de ses larmes :

– L’odeur de ces fleurs me fait mal, dit-elle…

Et c’était une fine, fine, une discrète odeur de miel… Sans rien dire, je saisis ces innocentes branches fragiles, les brise, les emporte, les jette, exaspéré, le sang aux yeux. – Ah ! si déjà ce peu de printemps, elle ne le peut plus supporter !…

Je repense souvent à ces larmes et je crois maintenant que, déjà se sentant condamnée, c’est de regret d’autres printemps qu’elle pleurait. — Je pense aussi qu’il est de fortes joies pour les forts, et de faibles joies pour