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suffrage, qui a créé de plus le droit de représentation des minorités dans le parlement. Le droit de suffrage s’étend aujourd’hui à plus de deux millions d’Italiens ; il est à peu près universel, puisqu’il n’est limité que par de très modestes conditions. Qu’allait-il sortir de ce vaste scrutin populaire ? C’était au moins un problème, d’autant plus que, depuis quelques années, tous les partis italiens sont dans une crise de transformation, que les anciens cadres sont à peu près brisés et que de l’élargissement soudain de la vie publique pouvait naître la possibilité de combinaisons imprévues. La lutte qui s’est engagée dans ces conditions si nouvelles a été sans doute des plus vives. Chose à remarquer cependant, l’abstention a été encore considérable. Les conservateurs d’autrefois, ceux qu’on appelle les cléricaux, ont continué à se désintéresser du mouvement et ont persisté dans leur système invariable de n’être « ni élus, ni électeurs. » Les autres partis plus ou moins engagés dans la révolution italienne ont seuls pris part à la lutte, et ceux-là se sont jetés ardemment dans la mêlée. Les chefs de la fraction dissidente de la gauche, M. Crispi, M. Nicotera, sont allés dans le Midi prononcer des discours enflammés, surexcitant de leur mieux les passions nationales. Les chefs de l’ancien parti modéré ont tenu à combattre sous leur drapeau ; M. Minghetti, dans des réunions à Cologna-Venita, à Bologne, a tracé de savans et éloquens exposés, défendant sa cause en tacticien plein de ressources. Le président du conseil, M. Depretis, s’est prudemment réservé pour la dernière heure ; presque à la veille des élections, il est allé prononcer dans son vieux district piémontais, à Stradella, un discours aussi habile que modéré, modéré pour la politique extérieure comme pour la politique intérieure, et, en définitive, c’est autour de ce discours de la dernière heure que les élections se sont faites. Le programme de Stradella a conduit la bataille et est resté victorieux. Ce n’est pas que les élémens d’opposition manquent dans la nouvelle chambre italienne. Les radicaux, républicains ou socialistes, ont réussi à enlever quelques sièges à Milan, dans la Romagne. Les groupes qui se rattachent à M. Crispi, à M. Nicotera, comptent trente ou quarante représentai. L’ancien parti modéré garde une certaine force et surtout ses chefs, M. Minghetti, M. Visconti-Venosta, M. Sella, M. Bonghi ; mais le succès le plus complet est resté à l’armée ministérielle ralliée autour du drapeau de Stradella. C’est une majorité monarchique constitutionnelle, qui peut même être grossie, selon les circonstances, par un rapprochement devenu possible entre l’ancienne gauche dirigée par M. Depretis et les anciens modérés libéraux. Si le danger radical devenait plus sérieux, l’alliance ne serait pas douteuse. Dans tous les cas, le résultat général des élections italiennes reste évidemment favorable à la monarchie, à une politique de prudence et de modération dans les affaires intérieures.