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rien précipiter pendant ces quelques semaines de session extraordinaire, de se borner pour l’instant au plus pressé, à l’expédition du budget.

Oh ! assurément, ce n’est pas que cette déclaration lue l’autre jour aux chambres ne soit pleine de bonnes intentions et que le ministère qui est né au mois d’août, qui a la meilleure volonté de vivre, ne se montre sensible à quelques-unes des nécessités publiques qui le pressent. Arrivé au pouvoir dans des conditions difficiles, à la suite d’une série de troubles ministériels et parlementaires, surpris depuis qu’il existe par des explosions d’anarchie qui sont un avertissement en même temps qu’une menace, le ministère ne demanderait évidemment pas mieux que d’éviter des crises nouvelles dont il serait la première victime, de reprendre une position plus forte. Il a soigneusement étudié son programme. Il ne craint pas de désavouer les « solidarités compromettantes, » et il parle de l’ordre avec la bonne volonté de le maintenir « d’une main ferme, » de réprimer « avec calme, sans faiblesse » toutes les tentatives qui pourraient le troubler. Il n’hésite pas à rappeler que l’ordre intérieur énergiquement maintenu, l’esprit de suite dans la politique, sont les conditions premières de l’influence extérieure. Le ministère dit une foule de choses justes, qui ne sont pas toujours nouvelles, sur l’observation des lois, sur la conciliation, sur l’apaisement, sur la nécessité de s’entendre pour sévir contre « les malfaiteurs qui colportent la sédition et la menace. » Il a aussi de l’orgueil : il attend la discussion sur ce qu’il a fait et sur ce qu’il proposera. Il ne veut en aucun cas accepter de « vivre au jour le jour, de majorités accidentelles, sans solidité, sans sécurité. » Il a l’ambition de trouver dans le parlement « une majorité résolue à donner à la république un gouvernement durable et fort, un gouvernement décidé à défendre au dehors les intérêts permanens de la France, au-dedans l’ordre et la liberté, à imposer énergiquement à tous le respect absolu des lois. » Rien certes de plus honnête, de mieux intentionné, et M. le président du conseil a bien raison de croire qu’avec tout cela on peut s’assurer « les garanties d’une existence politique stable. » Seulement c’est là toujours la question. La difficulté est de sortir du vague, de traduire toutes ces honnêtes paroles dans la réalité, de préciser un système de conduite pratique sans lequel toutes les promesses de gouvernement durable et fort ne sont que de décevantes banalités. Il faut en arriver aux faits. Il faut oser se dire que, si la situation a pris de jour en jour une gravité croissante, c’est qu’on a laissé, depuis quelques années, l’esprit de parti et de désorganisation s’attaquer à tout, à la magistrature, à l’armée, aux finances, à l’ordre administratif, à la liberté des croyances, et que, si on veut enfin remédier à un mal devenu criant, il n’y a pas d’autre moyen que de revenir aux conditions essentielles d’une politique réparatrice.