« L’Étoile du sud/IV » : différence entre les versions

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Décidément, il faut partir, se dit le lendemain Cyprien Méré, en s’occupant de sa toilette, il faut quitter le Griqualand ! Après ce que je me suis laissé raconter par ce bonhomme, rester ici un jour de plus serait de la faiblesse ! Il ne veut pas me donner sa fille ? Peut-être a-t-il raison ! En tout cas, il ne m’appartient pas d’avoir l’air de plaider les circonstances atténuantes ! Je dois savoir accepter virilement ce verdict, quelque douloureux qu’il soit, et compter sur les retours de l’avenir ! »
 
Décidément, il faut partir, se dit le lendemain Cyprien Méré, en s’occupant de sa toilette, il faut quitter le Griqualand ! Après ce que je me suis laissé raconter par ce bonhomme, rester ici un jour de plus serait de la faiblesse ! Il ne veut pas me donner sa fille ? Peut-être a-t-il raison ! En tout cas, il ne m’appartient pas d’avoir l’air de plaider les circonstances atténuantes ! Je dois savoir accepter virilement ce verdict, quelque douloureux qu’il soit, et compter sur les retours de l’avenir ! »
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dois savoir accepter virilement ce verdict, quelque douloureux qu’il soit, et compter sur les retours de l’avenir ! »
 
Sans hésiter davantage, Cyprien s’occupa d’empaqueter ses appareils dans les caisses qu’il avait gardées pour s’en servir en guise de buffets et d’armoires. Il s’était mis avec ardeur à la besogne, et il travaillait activement, depuis une heure ou deux, quand, par la fenêtre ouverte, à travers l’atmosphère matinale, une voix fraîche et pure, montant comme un chant d’alouette du pied de la terrasse, arriva jusqu’à lui, portée sur une des plus charmantes mélodies du poète Moore :
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''Oh ! who would inhabit ''
''This black world alone ?… ''</poem>
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« C’est la dernière rose de l’été, – restée seule en fleur. – Oh ! qui voudrait habiter tout seul ce sombre monde ?… »
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La jeune fille était frappée de stupeur. Cette nouvelle la surprenait en plein bonheur inconscient, comme un coup de massue. Soudain, de grosses larmes se formèrent dans ses yeux, et vinrent se suspendre aux longs cils qui les ombrageaient. Et, comme si cette explosion de chagrin l’eût rappelée à la réalité, elle retrouva quelque force pour sourire :
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« Partir ?… reprit-elle. Eh bien, et votre élève dévouée, vous voulez donc la quitter sans qu’elle ait achevé son cours de chimie ?… Vous voulez que j’en reste à l’oxygène et que les mystères de l’azote me soient à jamais lettre morte ?… C’est très mal cela, monsieur ! »
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Mais, en même temps, il sentait combien ce projet de départ immédiat, si subitement arrêté sous le coup de sa déconvenue, était brutal, presque sauvage. Il lui apparaissait impossible d’abandonner ainsi, sans préparation, sans délai, cette charmante enfant qu’il aimait, et qui lui rendait, – ce n’était que trop visible – une affection si sincère et si profonde !
 
Cette résolution, qui s’était imposée à lui deux heures plus tôt, avec le caractère de la nécessité la plus impérieuse, lui faisait maintenant horreur. Il n’osait même plus l’avouer.
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Tout à coup, il la renia.
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En moins d’une heure, il y arriva.
 
À ce moment, les mineurs rentraient en foule au camp pour leur second déjeuner. Cyprien, passant en revue tous ces visages hâlés, se demandait à qui il s’adresserait pour obtenir les renseignements qui lui étaient nécessaires, lorsqu’il reconnut dans un groupe la face loyale de Thomas Steel, l’ex-mineur du Lancashire. Deux ou trois fois déjà, il avait eu occasion de le rencontrer, depuis leur arrivée simultanée en Griqualand, et de constater que le brave
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garçon prospérait à vue d’œil, comme l’indiquaient suffisamment sa mine fleurie, ses habits flambant neufs, et surtout la large ceinture de cuir qui s’étalait sur ses flancs.
 
Cyprien se décida à l’aborder et à lui faire part de ses projets – ce qui fut dit en quelques mots.
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– Si je trouvais une bonne part de claim à acheter, pas trop cher, seriez-vous disposé à vous associer avec moi pour l’exploiter ? demanda le jeune ingénieur.
 
– Tout de même, répondit Thomas Steel, – à une condition cependant : c’est que chacun de nous garderait pour lui ce qu’il trouverait ! Ce n’est
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pas que je me méfie, monsieur Méré ! Mais voyez-vous, depuis que je suis ici, je me suis aperçu que je perds presque toujours au partage, parce que le pic et la pioche, ça me connaît, et que j’abats deux ou trois fois plus d’ouvrage que les autres !
 
– Cela me paraîtrait juste, répondit Cyprien.
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– Qu’à cela ne tienne, répliqua Thomas Steel. Nous pouvons en avoir bientôt le cœur net ! »
 
Trois heures plus tard, le demi-claim numéro 942, dûment marqué de piquets et reconnu sur le plan, était affermé en bonne forme à MM. Méré et Thomas Steel, sur paiement d’une prime de quatre-vingt-dix livres <ref>2,250 francs.</ref>, et versement entre les mains du receveur des droits de patente. En outre, il était spécialement stipulé dans le bail que les concessionnaires partageraient avec John Watkins les produits de leur exploitation et lui remettraient à titre de « royalty » les trois premiers diamants au-dessus de dix carats, qui pourraient être trouvés par eux. Rien ne démontrait que cette éventualité se présenterait, mais en somme elle était possible, – tout était possible.
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Au total, l’affaire pouvait être considérée comme exceptionnellement belle pour Cyprien, et Mr. Watkins le lui déclara avec sa franchise ordinaire, en trinquant avec lui, après la signature du contrat.
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Cyprien ne put s’empêcher de voir dans ces paroles un heureux présage pour l’avenir.
 
Et miss Watkins, qui était présente à l’entrevue, avait un si clair rayon de
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soleil dans ses yeux bleus ! Non ! On n’aurait jamais pu croire qu’ils avaient passé la matinée à pleurer.
 
D’un accord tacite, on évita, d’ailleurs, toute explication sur l’attristante scène du matin. Cyprien restait, c’était évident, et, en somme, c’était l’essentiel.