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trouver un bon professeur de rhétorique. Je le crois sans peine, il y faut peut-être un peu moins de science, mais combien plus de zèle, d’application, de tact ! Faire respecter l’autorité, la discipline, la règle, mieux que cela : les faire aimer, développer dans l’âme des jeunes gens le goût de l’exactitude et du devoir, les y ramener quand ils s’en écartent, et mettre à tout cela, douceur, fermeté, patience, égalité d’humeur et de caractère, quelle tâche ardue, pénible, et quelle variété d’aptitudes une telle tâche ne suppose-t-elle pas dans le même individu! Elle implique surtout une abnégation qui se rencontre rarement au même degré chez nos maîtres d’étude. Allez donc demander de l’abnégation à des gens qui n’ont aucune vocation particulière et qui se sont faits surveillans comme ils se seraient faits commis, faute de mieux, pour vivre! Cela n’est guère possible, et la preuve, c’est que tous ceux qui ont étudié d’un peu près cette question capitale des maîtres d’étude, concluent plus ou moins à la suppression de nos internats. M. Bréal ne voudrait « pas que l’Université fermât subitement ses pensionnats, » mais il lui demande « de prendre les mesures nécessaires pour les réduire graduellement; » Il faudrait d’abord hausser la limite d’âge ; « à moins de cas exceptionnels, aucun enfant au-dessous de douze ans ne devrait être admis dans nos établissemens. » Nos petits collèges, Vanves lui-même, ne trouvent pas grâce aux yeux de ce censeur impitoyable. On vante la beauté de ces maisons situées à la campagne, la grandeur de leurs parcs. C’est un tort : « Plus on rendra les abords de l’internat rians, plus on y engagera les familles, plus on étendra le mal. »
trouver un bon professeur de rhétorique. Je le crois sans peine, il y faut peut-être un peu moins de science, mais combien plus de zèle, d’application, de tact ! Faire respecter l’autorité, la discipline, la règle, mieux que cela : les faire aimer, développer dans l’âme des jeunes gens le goût de l’exactitude et du devoir, les y ramener quand ils s’en écartent, et mettre à tout cela, douceur, fermeté, patience, égalité d’humeur et de caractère, quelle tâche ardue, pénible, et quelle variété d’aptitudes une telle tâche ne suppose-t-elle pas dans le même individu ! Elle implique surtout une abnégation qui se rencontre rarement au même degré chez nos maîtres d’étude. Allez donc demander de l’abnégation à des gens qui n’ont aucune vocation particulière et qui se sont faits surveillans comme ils se seraient faits commis, faute de mieux, pour vivre ! Cela n’est guère possible, et la preuve, c’est que tous ceux qui ont étudié d’un peu près cette question capitale des maîtres d’étude, concluent plus ou moins à la suppression de nos internats. M. Bréal ne voudrait « pas que l’Université fermât subitement ses pensionnats, » mais il lui demande « de prendre les mesures nécessaires pour les réduire graduellement ; » Il faudrait d’abord hausser la limite d’âge ; « à moins de cas exceptionnels, aucun enfant au-dessous de douze ans ne devrait être admis dans nos établissemens. » Nos petits collèges, Vanves lui-même, ne trouvent pas grâce aux yeux de ce censeur impitoyable. On vante la beauté de ces maisons situées à la campagne, la grandeur de leurs parcs. C’est un tort : « Plus on rendra les abords de l’internat rians, plus on y engagera les familles, plus on étendra le mal. »


M. Jules Simon n’est pas tout à fait aussi radical, surtout en ce qui concerne nos petits collèges, qu’il apprécie fort. Il ne croit pas qu’on étendît le mal en démolissant ces vieilles et tristes maisons qui servent encore « de geôle à notre jeunesse captive » et en les remplaçant par de belles et vastes maisons situées à quelque distance de Paris, comme Vanves, « ce paradis des écoliers. » Toutefois il incline également à la suppression de l’internat, et toutes ses préférences sont pour le système tutorial. Il voudrait nous voir emprunter ce système à l’Angleterre, où il est appliqué dans beaucoup d’écoles, à Eton, à Harrow, à Rugby. A Eton, « il règne si souverainement que le tuteur efface le professeur; à Harrow et à Rugby, où le tuteur est l’auxiliaire du professeur et dirige ses pupilles comme le ferait un père diligent et éclairé, il n’a que des avantages sans inconvéniens. » — « Au point de vue matériel, ajoute M. Jules Simon, le tuteur diffère de nos répétiteurs en ce qu’il reçoit son pupille en pension chez lui et lui continue ses soins pendant tout le temps des études. Il en diffère au point de vue moral en ce que le pupille fait complètement partie de la maison et de la famille,
M. Jules Simon n’est pas tout à fait aussi radical, surtout en ce qui concerne nos petits collèges, qu’il apprécie fort. Il ne croit pas qu’on étendît le mal en démolissant ces vieilles et tristes maisons qui servent encore « de geôle à notre jeunesse captive » et en les remplaçant par de belles et vastes maisons situées à quelque distance de Paris, comme Vanves, « ce paradis des écoliers. » Toutefois il incline également à la suppression de l’internat, et toutes ses préférences sont pour le système tutorial. Il voudrait nous voir emprunter ce système à l’Angleterre, où il est appliqué dans beaucoup d’écoles, à Eton, à Harrow, à Rugby. A Eton, « il règne si souverainement que le tuteur efface le professeur ; à Harrow et à Rugby, où le tuteur est l’auxiliaire du professeur et dirige ses pupilles comme le ferait un père diligent et éclairé, il n’a que des avantages sans inconvéniens. » — « Au point de vue matériel, ajoute M. Jules Simon, le tuteur diffère de nos répétiteurs en ce qu’il reçoit son pupille en pension chez lui et lui continue ses soins pendant tout le temps des études. Il en diffère au point de vue moral en ce que le pupille fait complètement partie de la maison et de la famille,