« Bourses de voyage (1904)/Première partie/Chapitre XIII » : différence entre les versions

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Les passagers, réunis sur la dunette, échangeaient leurs observations.
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« C’est un navire de l’État… disait l’un.
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Harry Markel ni les autres ne se méprirent à ce sujet. Nul doute, l’Essex voulait communiquer avec l’Alert et continuait à se rapprocher sous petite vapeur.
 
Les transes que ces misérables éprouvèrent, on les devine, on les comprend. N’était-il pas possible que, depuis quelques jours, une dépêche fût arrivée dans une des Antilles anglaises ; que, d’une façon ou d’une autre, on eût connaissance de ce qui s’était passé à Queenstown avant le départ de l’Alert, sa prise par la bande Markel, le
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massacre du capitaine Paxton et de ses hommes, que l’Essex eût été envoyé pour s’emparer de ces malfaiteurs ?…
 
Et pourtant, toute réflexion faite, non ! cela ne pouvait être. Comment, Harry Markel, qui certainement n’aurait pas plus épargné les passagers qu’il n’avait épargné l’équipage du capitaine Paxton, aurait fait route pour les Antilles ?… Il eût poussé l’audace jusqu’à conduire l’Alert à destination au lieu de s’enfuir ?… Une telle imprudence était inadmissible.
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Dans tous les cas, puisque l’Essex avait hissé son pavillon, l’Alert dut hisser le sien.
 
Il va de soi que, si Harry Markel n’eût pas voulu obéir aux injonctions qui lui étaient faites par un bâtiment de l’État, il y aurait été contraint. Impossible d’échapper aux
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poursuites de cet aviso qui avait pour lui la vitesse et la force. Quelques coups de canon eussent en un instant réduit l’Alert à l’impuissance.
 
D’ailleurs, on le répète, Harry Markel n’y songeait point. Si le commandant de l’aviso lui ordonnait de se rendre à son bord, il s’y rendrait.
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— Et ce navire est bien l’Alert, qui a quitté le port de Queenstown à la date du 30 juin dernier ?…
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— À cette date, en effet.
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— Ayant comme passagers les lauréats d’Antilian School ?…
 
— Ici présents »,
— Ici présents », répondit Harry Markel, en montrant sur la dunette M. Patterson et ses compagnons, qui ne perdaient pas un mot de cette conversation.
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— Ici présents », répondit Harry Markel, en montrant sur la dunette M. Patterson et ses compagnons, qui ne perdaient pas un mot de cette conversation.
 
Les officiers les rejoignirent, suivis d’Harry Markel, et celui qui avait parlé — un lieutenant de la marine britannique, — après avoir répondu à leur salut, s’exprima en ces termes, de ce ton froid et bref qui caractérise l’officier anglais :
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Harry Markel s’inclina, attendant que le lieutenant voulût bien lui faire connaître la raison de sa visite.
 
« Vous avez eu bonne traversée, demanda l’officier… et le temps a été favorable ?…
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temps a été favorable ?…
 
— Très favorable, répliqua Harry Markel, à l’exception d’un coup de vent que nous avons attrapé par le travers des Bermudes.
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De sympathiques shake hands furent alors échangés avec cette précision automatique spéciale aux poignées de main anglo-saxonnes.
 
Le lieutenant, se retournant alors vers Harry Markel, lui demanda à voir son équipage —
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ce qui ne laissa pas de paraître très suspect et très inquiétant à John Carpenter. Pourquoi donc cet officier prétendait-il les passer en revue ?…
 
Toutefois, sur l’ordre d’Harry Markel, il fit monter ses hommes sur le pont, et ceux-ci se rangèrent au pied du grand mât. En dépit des efforts que ces bandits firent pour se donner l’apparence d’honnêtes gens, peut-être les officiers pensèrent-ils qu’ils avaient une mine peu rassurante.
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Il était naturel, en somme, que le lieutenant fût questionné à ce sujet, et il répondit :
 
« Tout simplement l’inquiétude où l’on était, à la Barbade, par suite du retard de l’Alert…
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Aux Antilles, comme en Europe, les familles se sont préoccupées de ce retard. Mrs Kethlen Seymour a fait des démarches auprès du gouverneur, et Son Excellence a expédié l’Essex au-devant de l’Alert. Voilà les seules raisons de notre présence en ces parages, et, je le répète, nous sommes très heureux que nos craintes aient été vaines ! »
 
Devant ce témoignage d’intérêt et de sympathie, M. Horatio Patterson ne pouvait rester à court. Au nom des jeunes passagers comme au sien, il remercia avec grande dignité et le commandant de l’Essex, et ses officiers, et l’excellente Mrs Kethlen Seymour, et Son Excellence le gouverneur général des Antilles anglaises.
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John Carpenter et Corty se regardèrent assez surpris. Peut-être regrettèrent-ils même que Harry Markel eût poussé si loin ses questions.
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« C’est bien le 30 juin, dans la soirée, que l’Alert a mis à la voile ?…
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« Vous avez donc perdu un de vos hommes, capitaine Paxton ?…
 
— Oui, monsieur, le matelot Bob… Ce matelot est tombé à la mer, alors que nous
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étions mouillés à l’anse Farmar, et, malgré toutes les recherches, on n’a pu ni le sauver, ni le retrouver. »
 
Cette explication, qui fut admise sans éveiller aucun soupçon, indiquait en même temps pourquoi un matelot manquait à l’équipage du trois-mâts.
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« La dépêche envoyée de Queenstown à la Barbade mentionnait en outre que le cadavre trouvé sur la côte — probablement celui du matelot Bob — avait une blessure en pleine poitrine.
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— Une blessure !… » s’écria Louis Clodion, tandis que M. Patterson prenait l’attitude d’un homme qui semble ne plus rien comprendre.
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« La blessure relevée sur le cadavre ne provenait point d’un choc… Elle était due à un coup de coutelas qui avait atteint le cœur ! »
 
Nouvelles transes, bien naturelles, on en conviendra, chez John Carpenter et ses compagnons. Ils ne savaient plus comment cela allait finir. Est-ce que le commandant de l’Essex avait ordre de saisir l’Alert, de le conduire à la Barbade, où se ferait une enquête qui eût sans doute tourné fort mal
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pour eux ?… Elle aurait amené la constatation de leur identité… On les aurait reconduits en Angleterre. Cette fois, ils n’eussent pas échappé au châtiment de leurs crimes… Et surtout ils n’auraient pu accomplir celui qu’ils commettraient lorsque l’Alert aurait quitté les parages des Indes occidentales !…
 
La chance continuait à les favoriser, Harry Markel n’eut pas même à s’expliquer sur le fait du coup de poignard.
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— Alors, observa Roger Hinsdale, il s’agit de la bande des pirates de l’Halifax, qui venait de s’évader, lorsque nous sommes arrivés à Queenstown…
 
— Les misérables !… s’écria Tony Renault.
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Et ils n’ont pas été repris, monsieur le lieutenant ?…
 
— D’après les dernières nouvelles, on n’avait pas retrouvé leurs traces, répondit l’officier. Toutefois il n’est pas possible qu’ils aient quitté l’Irlande, et tôt ou tard ils seront arrêtés…
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— C’est à désirer, monsieur », déclara Harry Markel, de ce ton calme dont il ne s’était pas départi un seul instant.
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Au nom de ses camarades, Roger Hinsdale répondit en priant les officiers d’offrir à Mrs Kethlen Seymour le témoignage de leur reconnaissance de ce qu’elle avait fait pour Antilian School. Puis M. Horatio Patterson termina l’entrevue par un de ces speechs à la fois abondants et émus dont il avait le secret, et à la fin duquel, par une inadvertance bien rare chez un tel homme, il entremêla un vers d’Horace et un vers de Virgile.
 
Les officiers, après avoir pris congé du capitaine et des passagers, furent conduits
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à l’échelle et embarquèrent dans leur canot. Mais, avant de démarrer :
 
« Je pense, capitaine Paxton, dit le lieutenant, que l’Alert sera demain à Saint-Thomas, puisqu’il n’en est plus qu’à une cinquantaine de milles ?…
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Quant à l’Alert, ses vergues brassées, ses voiles orientées sous l’allure du grand largue, tribord amures, il prit direction sur Saint-Thomas.
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Ainsi Harry Markel et ses complices étaient rassurés, en ce qui concernait cette visite de l’Essex. Personne, ni en Angleterre ni aux Antilles, ne soupçonnait qu’ils eussent pu s’enfuir sur un navire, et que ce navire fût précisément l’Alert… Il semblait donc que la chance les suivrait jusqu’au bout !… Ils allaient effrontément parcourir cet archipel, ils seraient reçus avec honneur, ils iraient d’île en île, n’ayant même plus la crainte d’être reconnus, ils achèveraient cette exploration par une dernière relâche à la Barbade, et ce n’est pas la route de l’Europe qu’ils reprendraient alors !… Le lendemain du départ, l’Alert ne serait plus l’Alert… Harry Markel ne serait plus le capitaine Paxton, et il n’aurait plus à bord ni M. Patterson ni aucun de ses jeunes compagnons de voyage !… L’audacieuse entreprise aurait réussi, et c’est en vain que la police rechercherait en Irlande les pirates de l’Halifax !…
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Cette dernière partie de la traversée s’effectua dans les conditions les meilleures. Un temps magnifique, sous le souffle constant des alizés, permettait de porter toute la voilure, même les bonnettes.
 
Décidément, M. Horatio Patterson était aguerri. À peine si, parfois, un coup de roulis
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ou de tangage un peu plus violent lui causait quelque malaise. Il avait même pu réoccuper sa place à table et se débarrasser du noyau de cerise qu’il persistait à garder dans sa bouche.
 
« Vous avez raison… monsieur, lui répétait Corty. Il n’y a encore que cela contre le mal de mer…
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Du reste, aux approches de l’archipel, des navires assez nombreux, steamers ou voiliers, animaient la mer : ceux qui cherchaient à gagner le golfe du Mexique à travers le détroit de la Floride, et ceux qui en sortaient pour rallier les ports de l’Ancien Continent. Pour ces jeunes garçons, quelle joie de les signaler, de les croiser, d’échanger des saluts avec les pavillons anglais, américains, français, espagnols, les plus habitués de ces parages !
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Avant le coucher du soleil, l’Alert courait sur le dix-septième parallèle, en latitude de Saint-Thomas, dont il n’était plus séparé que par une vingtaine de milles. C’eût été l’affaire de quelques heures.