« Le Jeu de l’amour et du hasard » : différence entre les versions

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Taisez-vous, allez répondre vos impertinences ailleurs, et sachez que ce n'est pas à vous
 
à juger de mon coeurcœur par le vôtre.
 
 
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LISETTE
 
Mon coeurcœur est fait comme celui de tout le monde ; de quoi le vôtre s'avise-t-il de n'être
 
fait comme celui de personne ?
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MARIO
 
Ma soeursœur, je te félicite de la nouvelle que j'apprends ; nous allons voir ton amant, dit-
 
on.
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avec la future comme vous le jugerez à propos..." Voilà ce que le père m'écrit. Ce n'est
 
pas le tout, voici ce qui arrive ; c'est que votre soeursœur inquiète de son côté sur le chapitre
 
de Dorante, dont elle ignore le secret, m'a demandé de jouer ici la même comédie, et
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vous ? Savez-vous rien de plus particulier que cela ? Actuellement, la maîtresse et la
 
suivante se travestissent. Que me conseillez-vous, Mario ? Avertirai-je votre soeursœur ou
 
non ?
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déranger, et je respecterais l'idée qui leur est inspirée à l'un et à l'autre ; il faudra bien
 
qu'ils se parlent souvent tous deux sous ce déguisement, voyons si leur coeurcœur ne les
 
avertirait pas de ce qu'ils valent. Peut-être que Dorante prendra du goût pour ma soeursœur,
 
toute soubrette qu'elle sera, et cela serait charmant pour elle.
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MARIO
 
Ma foi, ma soeursœur, c'est autant de pris que le valet ; mais tu pourrais bien aussi
 
escamoter Dorante à ta maîtresse.
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MARIO
 
Allons doucement, ma soeursœur, ce faquin-là sera votre égal.
 
 
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MARIO
 
Il n'est pas mal tourné au moins, ton coeurcœur n'a qu'à se bien tenir, Lisette.
 
 
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SILVIA
 
Mon coeurcœur, c'est bien des affaires.
 
 
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Oh, doucement, s'aimer, c'est une autre affaire ; vous ne savez peut-être pas que j'en
 
veux au coeurcœur de Lisette, moi qui vous parle, il est vrai qu'il m'est cruel, mais je ne veux
 
pas que Bourguignon aille sur mes brisées.
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SILVIA
 
Va : je te souhaite de bon coeurcœur une meilleure situation que la tienne, et je voudrais
 
pouvoir y contribuer, la fortune a tort avec toi.
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Ma foi, l'amour a plus de tort qu'elle, j'aimerais mieux qu'il me fût permis de te
 
demander ton coeurcœur, que d'avoir tous les biens du monde.
 
 
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modestie, il faut pourtant que je vous dise que si vous ne mettez ordre à ce qui arrive,
 
votre prétendu gendre n'aura plus de coeurcœur à donner à Mademoiselle votre fille ; il est
 
temps qu'elle se déclare, cela presse, car un jour plus tard, je n'en réponds plus.
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LISETTE
 
Je vous le répète encore, le coeurcœur de Dorante va bien vite ; tenez, actuellement je lui
 
plais beaucoup, ce soir il m'aimera, il m'adorera demain, je ne le mérite pas, il est de
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LISETTE
 
Pour moi, mon coeurcœur vous aurait choisi dans quelque état que vous eussiez été.
 
ARLEQUIN
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LISETTE
 
J'ai plus d'intérêt à ce serment-là que vous, et je le fais de tout mon coeurcœur.
 
ARLEQUIN se met à genoux.
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exemple, d'une bonté que je blâmerais dans une autre, je ne me la reproche pourtant
 
pas, le fond de mon coeurcœur me rassure, ce que je fais est louable, c'est par générosité que
 
je te parle, mais il ne faut pas que cela dure, ces générosités-là ne sont bonnes qu'en
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ton
 
coeurcœur...
 
 
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Il faut que je le croie ! Désespère une passion dangereuse, sauve-moi des effets que j'en
 
crains ; tu ne me hais, ni ne m'aimes, ni ne m'aimeras ! Accable mon coeurcœur de cette
 
certitude-là ! J'agis de bonne foi, donne-moi du secours contre moi-même, il m'est
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Quoi, Lisette, si je n'étais pas ce que je suis, si j'étais riche, d'une condition honnête, et
 
que je t'aimasse autant que je t'aime, ton coeurcœur n'aurait point de répugnance pour moi ?
 
 
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MARIO
 
Il y a quelque chose, ma soeursœur, il y a quelque chose.
 
 
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MARIO
 
Ma foi, tu as beau dire, ma soeursœur, elle est trop forte pour être si naturelle, et quelqu'un y
 
a aidé.
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MARIO
 
Dans quelle humeur es-tu, ma soeursœur, comme tu t'emportes !
 
 
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MARIO
 
Adieu, adieu ma soeursœur, sans rancune.
 
 
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SILVIA
 
Ah, que j'ai le coeurcœur serré ! Je ne sais ce qui se mêle à l'embarras où je me trouve, toute
 
cette aventure-ci m'afflige, je me défie de tous les visages, je ne suis contente de
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DORANTE
 
Ah, Lisette ! C'est ici où tu vas juger des peines qu'a dû ressentir mon coeurcœur.
 
 
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SILVIA
 
Ce n'est pas à ton coeurcœur à qui je parle, c'est à toi.
 
 
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SILVIA, à part.
 
Ah ! je vois clair dans mon coeurcœur.
 
 
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SILVIA
 
Un coeurcœur qui m'a choisie dans la condition où je suis, est assurément bien digne qu'on
 
l'accepte, et je le payerais volontiers du mien, si je ne craignais pas de le jeter dans un
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MARIO
 
Je viens te retrouver, ma soeursœur : nous t'avons laissée dans des inquiétudes qui me
 
touchent : je veux t'en tirer, écoute-moi.
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Accommodons-nous : cette demoiselle m'adore, elle m'idolâtre ; si je lui dis mon état de
 
valet, et que nonobstant, son tendre coeurcœur soit toujours friand de la noce avec moi, ne
 
laisserez-vous pas jouer les violons ?
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t'aimât, c'est que sans autre raisonnement je te défends de t'adresser davantage à elle,
 
non pas dans le fond que je craigne qu'elle t'aime, elle me paraît avoir le coeurcœur trop haut
 
pour cela, mais c'est qu'il me déplaît à moi d'avoir Bourguignon pour rival.
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Lisette sait tout le bien que je lui veux, et n'y paraît pas sensible, mais j'espère que la
 
raison me gagnera son coeurcœur. Adieu, retire-toi sans bruit : son indifférence pour moi
 
malgré tout ce que je lui offre doit te consoler du sacrifice que tu me feras... Ta livrée
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MARIO
 
Mais où en est-il précisément, ma soeursœur ?
 
 
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sommes destinés l'un à l'autre, il doit m'épouser ; si vous saviez combien je lui tiendrai
 
compte de ce qu'il fait aujourd'hui pour moi, combien mon coeurcœur gardera le souvenir de
 
l'excès de tendresse qu'il me montre, si vous saviez combien tout ceci va rendre notre
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MARIO
 
Ha, ha, ha, que ton coeurcœur a de caquet, ma soeursœur, quelle éloquence !
 
 
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Non, je te la donne, Lisette, je te remets tous mes droits, et pour dire comme toi, je ne
 
prendrai jamais de part à un coeurcœur que je n'aurai pas conditionné moi-même.
 
 
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Le voici qui me cherche, ayez donc la bonté de me laisser le champ libre, il s'agit ici de
 
mon chef-d'oeuvreœuvre.
 
 
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SILVIA
 
De tout mon coeurcœur.
 
 
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ARLEQUIN
 
Comment donc, ma chère âme, élixir de mon coeurcœur, avez-vous entrepris la fin de ma vie
 
?
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ARLEQUIN
 
Pardi oui, la pauvre enfant, j'ai trouvé son coeurcœur plus doux qu'un agneau, il n'a pas
 
soufflé. Quand je lui ai dit que je m'appelais Arlequin, et que j'avais un habit
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vous, que voulez-vous que je fasse de cette pensée-là Monsieur ? Je vais vous parler à
 
coeurcœur ouvert, vous m'aimez, mais votre amour n'est pas une chose bien sérieuse pour
 
vous, que de ressources n'avez-vous pas pour vous en défaire ! La distance qu'il y a de
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peur, s'il m'a frappée, quel secours aurai-je contre l'impression qu'il m'aura faite ? Qui
 
est-ce qui me dédommagera de votre perte ? Qui voulez-vous que mon coeurcœur mette à
 
votre place ? Savez-vous bien que si je vous aimais, tout ce qu'il y a de plus grand dans
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une âme comme la tienne ; j'aurais honte que mon orgueil tînt encore contre toi, et mon
 
coeurcœur et ma main t'appartiennent.
 
 
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Non, Lisette ; Mario ne m'alarme plus, vous ne l'aimez point, vous ne pouvez plus me
 
tromper, vous avez le coeurcœur vrai, vous êtes sensible à ma tendresse, je ne saurais en
 
douter au transport qui m'a pris, j'en suis sûr, et vous ne sauriez plus m'ôter cette
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n'ai plus rien à vous dire, vous m'aimez, je n'en saurais douter, mais à votre tour, jugez
 
de mes sentiments pour vous, jugez du cas que j'ai fait de votre coeurcœur par la délicatesse
 
avec laquelle j'ai tâché de l'acquérir.