« Œuvres complètes de Lamartine (1860)/Tome 1/Le Lac » : différence entre les versions

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[[Category:Poésie|Lac]]
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<poem>
 
:Ainsi, toujours poussés vers de nouveaux rivages,
:Dans la nuit éternelle emportés sans retour,
:Ne pourrons-nous jamais sur l'océanl’océan des âges
: Jeter l'ancrel’ancre un seul jour ?
 
Ô lac ! l’année à peine a fini sa carrière,
Et près des flots chéris qu’elle devait revoir,
Regarde ! je viens seul m’asseoir sur cette pierre
Où tu la vis s’asseoir !
 
Tu mugissais ainsi sous ces roches profondes ;
:Ô lac ! l'année à peine a fini sa carrière,
Ainsi tu te brisais sur leurs flancs déchirés ;
:Et près des flots chéris qu'elle devait revoir,
Ainsi le vent jetait l’écume de tes ondes
:Regarde ! je viens seul m'asseoir sur cette pierre
Sur ses pieds adorés.
:Où tu la vis s'asseoir !
 
Un soir, t’en souvient- il ? nous voguions en silence ;
On n’entendait au loin, sur l’onde et sous les cieux,
Que le bruit des rameurs qui frappaient en cadence
Tes flots harmonieux.
 
Tout à coup des accents inconnus à la terre
:Tu mugissais ainsi sous ces roches profondes ;
Du rivage charmé frappèrent les échos ;
:Ainsi tu te brisais sur leurs flancs déchirés ;
Le flot fut attentif, et la voix qui m’est chère
:Ainsi le vent jetait l'écume de tes ondes
Laissa tomber ces mots :
:Sur ses pieds adorés.
 
« Ô temps, suspends ton vol ! et vous, heures propices,
Suspendez votre cours !
Laissez-nous savourer les rapides délices
Des plus beaux de nos jours !
 
« Assez de malheureux ici-bas vous implorent :
:Un soir, t'en souvient- il ? nous voguions en silence,
Coulez, coulez pour eux ;
:On n'entendait au loin, sur l'onde et sous les cieux,
Prenez avec leurs jours les soins qui les dévorent ;
:Que le bruit des rameurs qui frappaient en cadence
Oubliez les heureux.
:Tes flots harmonieux.
 
« Mais je demande en vain quelques moments encore,
Le temps m’échappe et fuit ;
Je dis à cette nuit : &lsaquo; Sois plus lente &rsaquo; ; et l’aurore
Va dissiper la nuit.
 
« Aimons donc, aimons donc ! de l’heure fugitive,
:Tout à coup des accents inconnus à la terre
Hâtons-nous, jouissons !
:Du rivage charmé frappèrent les échos ;
L’homme n’a point de port, le temps n’a point de rive ;
:Le flot fut attentif, et la voix qui m'est chère
Il coule, et nous passons ! »
:Laissa tomber ces mots :
 
Temps jaloux, se peut-il que ces moments d’ivresse,
Où l’amour à longs flots nous verse le bonheur,
S’envolent loin de nous de la même vitesse
Que les jours de malheur ?
 
Hé quoi ! n’en pourrons-nous fixer au moins la trace ?
:« Ô temps, suspends ton vol ! et vous, heures propices
Quoi ! passés pour jamais ? quoi! tout entiers perdus ?
:Suspendez votre cours !
Ce temps qui les donna, ce temps qui les efface,
:Laissez-nous savourer les rapides délices
Ne nous les rendra plus ?
:Des plus beaux de nos jours !
 
Éternité, néant, passé, sombres abîmes,
Que faites-vous des jours que vous engloutissez ?
Parlez : nous rendrez-vous ces extases sublimes
Que vous nous ravissez ?
 
Ô lac! rochers muets ! grottes! forêt obscure !
:« Assez de malheureux ici-bas vous implorent :
Vous que le temps épargne ou qu’il peut rajeunir,
:Coulez, coulez pour eux ;
Gardez de cette nuit, gardez, belle nature,
:Prenez avec leurs jours les soins qui les dévorent ;
Au moins le souvenir !
:Oubliez les heureux.
 
Qu’il soit dans ton repos, qu’il soit dans tes orages,
Beau lac, et dans l’aspect de tes riants coteaux,
Et dans ces noirs sapins, et dans ces rocs sauvages
Qui pendent sur tes eaux !
 
Qu’il soit dans le zéphyr qui frémit et qui passe,
:« Mais je demande en vain quelques moments encore
Dans les bruits de tes bords par tes bords répétés,
:Le temps m'échappe et fuit ;
Dans l’astre au front d’argent qui blanchit ta surface
:Je dis à cette nuit : « Sois plus lente »; et l'aurore
De ses molles clartés!
:Va dissiper la nuit.
 
Que le vent qui gémit, le roseau qui soupire,
Que les parfums légers de ton air embaumé,
Que tout ce qu’on entend, l’on voit ou l’on respire,
Tout dise : « Ils ont aimé ! »
</poem>
<br>
</div>
 
[[Catégorie:Alphonse de Lamartine|Lac]]
:« Aimons donc, aimons donc ! de l'heure fugitive,
:Hâtons-nous, jouissons !
:L'homme n'a point de port, le temps n'a point de rive
:Il coule, et nous passons ! »
 
 
:Temps jaloux, se peut-il que ces moments d'ivresse,
:Où l'amour à longs flots nous verse le bonheur,
:S'envolent loin de nous de la même vitesse
:Que les jours de malheur ?
 
 
:Hé quoi ! n'en pourrons-nous fixer au moins la trace ?
:Quoi ? passés pour jamais ? quoi! tout entiers perdus ?
:Ce temps qui les donna, ce temps qui les efface,
:Ne nous les rendra plus ?
 
 
:Éternité, néant, passé, sombres abîmes,
:Que faites-vous des jours que vous engloutissez ?
:Parlez : nous rendrez-vous ces extases sublimes
:Que vous nous ravissez?
 
 
:Ô lac! rochers muets ! grottes! forêt obscure !
:Vous que le temps épargne ou qu'il peut rajeunir,
:Gardez de cette nuit, gardez, belle nature,
:Au moins le souvenir !
 
 
:Qu'il soit dans ton repos, qu'il soit dans tes orages,
:Beau lac, et dans l'aspect de tes riants coteaux,
:Et dans ces noirs sapins, et dans ces rocs sauvages
:Qui pendent sur tes eaux !
 
 
:Qu'il soit dans le zéphyr qui frémit et qui passe,
:Dans les bruits de tes bords par tes bords répétés,
:Dans l'astre au front d'argent qui blanchit ta surface
:De ses molles clartés!
 
 
:Que le vent qui gémit le roseau qui soupire
:Que les parfums légers de ton air embaumé,
:Que tout ce qu'on entend, l'on voit ou l'on respire,
:Tout dise : « Ils ont aimé ! »
 
[[Catégorie:Alphonse de Lamartine]]
 
[[ro:Lacul (Lamartine)]]