« La Princesse de Clèves (édition originale)/Troisième partie » : différence entre les versions

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la gloire d’eſtre aimé de la plus aimable & de la plus eſtimable perſonne du monde ; mais ſi j’avais perdu ce bonheur, ſans qu’elle en eût ſouffert, & ſans luy avoir donné une douleur mortelle, ce me ſeroit une conſolation ; & je ſens plus dans ce moment le mal que je luy ay foit que celuy que je me ſuis foit auprès d’elle. »
 
Monſieur de Nemours fut longtemps à s’affliger & à penſer les meſmes choſes.
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choſes. L’envie de parler à madame de Clèves luy venoit toujours dans l’eſprit. Il ſongea à en trouver les moyens, il penſa à luy écrire ; mais enfin, il trouva qu’après la faute qu’il avoit faite, & de l’humeur dont elle était, le mieux qu’il pût faire étoit de luy témoigner un profond reſpect par ſon affliction & par ſon ſilence, de luy faire voir meſme qu’il n’oſçait ſe préſenter devant elle, & d’attendre
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ce que le temps, le haſard & l’inclination qu’elle avoit pour luy, pourraient faire en ſa faveur. Il réſolut auſſi de ne point faire de reproches au vidame de Chartres de l’infidélité qu’il luy avoit faite, de peur de fortifier ſes ſoupçons.
 
Les fiançailles de Madame, qui ſe faiſaient le lendemain, & le mariage qui ſe faiſçait le jour ſuivant, occupaient tellement toute la cour que madame de Clèves & monſieur de Nemours cachèrent aiſément au public leur triſteſſe & leur trouble. Madame la dauphine ne parla meſme qu’en paſſant à madame de Clèves de la converſation qu’elles avaient eue avec monſieur de Nemours, & monſieur de Clèves affecta de ne plus parler à ſa femme de tout ce qui s’étoit paſſé : de ſorte qu’elle ne ſe trouva pas dans un auſſi grand embarras qu’elle l’avoit imaginé. Les fiançailles ſe firent au Louvre, et, après le feſtin & le bal, toute la maiſon royale alla coucher à l’éveſché comme c’étoit la coutume. Le matin, le duc d’Albe, qui n’étoit jamais veſtu
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que fort ſimplement, mit un habit de drap d’or meſlé de couleur de feu, de jaune & de noir, tout couvert de pierreries, & il avoit une couronne fermée ſur la teſte. Le prince d’Orange, habillé auſſi magnifiquement avec ſes livrées, & tous les Eſpagnols ſuivis des leurs, vinrent prendre le duc d’Albe à l’hoſtel de Villeroi, où il étoit logé, & partirent, marchant quatre à quatre, pour venir à l’éveſché. Sitoſt qu’il fut arrivé, on alla par ordre à l’égliſe : le roi menoit Madame, qui avoit auſſi une couronne fermée, & ſa robe portée par meſdemoiſelles de Montpenſier & de Longueville. La reine marchoit enſuite, mais ſans couronne. Après elle, venoit la reine dauphine, Madame sœur du roi, madame de Lorraine, & la reine de Navarre, leurs robes portées par des princeſſes. Les reines & les princeſſes avaient toutes leurs filles magnifiquement habillées des meſmes couleurs qu’elles étaient veſtues : en ſorte que l’on connaiſſçait à qui étaient les filles par la couleur de leurs habits. On monta ſur l’échafaud qui étoit préparé dans l’égliſe, & l’on fit la cérémonie des mariages. On retourna enſuite dîner à l’éveſché et, ſur les cinq heures, on en partit pour aller au palais, où ſe faiſçait le feſtin, & où le parlement, les cours ſouveraines & la maiſon de ville étaient priez d’aſſiſter. Le roi, les reines, les princes & princeſſes mangèrent ſur la table de marbre dans la grande ſalle du palais, le duc d’Albe aſſis auprès de la nouvelle reine d’Eſpagne. Au-deſſous des degrez de la table de marbre & à la main droite du roi, étoit une table pour les ambaſſadeurs, les archeveſques & les chevaliers de l’ordre, & de l’autre coſté, une table pour meſſieurs du parlement.