« L’Odyssée/Traduction Bareste/07 » : différence entre les versions
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Telles sont les paroles que prononce Minerve aux yeux d'azur ; puis en s'élançant sur la mer stérile elle quitte la riante Schérie. La déesse traverse les plaines de Marathon, la ville aux larges rues des Athéniens, et elle se rend dans la superbe demeure d'Érechthée. — Ulysse s'avance vers le riche palais d'Alcinoüs, le cœur agité de mille pensées, et il s'arrête avant de franchir le seuil d'airain. — La haute demeure du magnanime Alcinoüs brille ainsi que la splendide clarté de la lune et l'éclatante lumière du soleil. Les murailles sont de toutes parts revêtues d'airain, depuis l'entrée du palais jusqu'au fond des appartements ; tout autour des murailles règne une corniche azurée. L'intérieur de cette demeure inébranlable est fermé par des portes d'or ; les montants d'argent reposent sur le seuil d'airain, et le linteau des portes est aussi en argent et l'anneau est en or. Aux extrémités des portes on aperçoit des chiens d'or et d'argent qu'avait forgés Vulcain avec un art merveilleux pour garder la demeure du magnanime Alcinoüs ; ces chiens sont immortels et pour toujours exempts de vieillesse<ref><small>Ces chiens étaient si bien travaillés, dit l'auteur des notes de la traduction de Voss, qu'ils semblaient vivre. En effet, dans la poésie, ces images vivent réellement, parce qu'un dieu les a formées et les a animées de son esprit vivifiant.</small></ref>. Dans l'intérieur du palais, depuis le seuil jusqu'à l'extrémité des vastes salles se trouvent des sièges rangés le long des murailles ; ces sièges sont recouverts de tissus finement travaillés par des mains de femmes : là s'asseyent les chefs des Phéaciens pour goûter les douceurs du repas, car ils ont chaque jour de nouvelles fêtes. Sur de magnifiques piédestaux s'élèvent des statues en or représentant des hommes encore jeunes tenant entre leurs mains des flambeaux allumés servant à éclairer pendant la nuit la salle des convives. Cinquante femmes esclaves servent dans ce palais ; les unes broient sous la meule le jaune froment ; les autres tissent la laine ou filent la toile, et les mains de ces femmes sont aussi mobiles que les feuilles d'un haut peuplier agité par le vent : une huile éclatante semble couler de ces magnifiques étoffes tissées avec tant d'habileté. Autant les Phéaciens surpassent tous les hommes dans l'art de diriger les rapides navires sur la mer ténébreuse, autant les Phéaciennes l'emportent sur les autres femmes et par leur adresse et par l'excellence de leurs tissus ; car Minerve leur accorda la faveur de produire des ouvrages merveilleux et d'avoir de sages pensées. — En dehors de la cour et tout près des portes se trouve un jardin de quatre arpents, fermé par une enceinte. Là croissent des arbres élevés et verdoyants, des poiriers, des grenadiers, des pommiers, des figuiers et des oliviers toujours verts ; ces arbres sont chargés de fruits toute l'année, et ils en portent pendant l'hiver comme pendant l'été : le souffle du zéphyr fait tantôt naître les uns et tantôt mûrir les autres. La poire vieillit auprès de la poire, la pomme auprès de la pomme, le raisin auprès du raisin et la figue auprès de la figue. — Là est aussi plantée une vigne dont les grappes sèchent aux rayons du soleil, dans une plaine unie et découverte ; d'autres sont cueillies par le laboureur, ou pressées dans la cuve, et a quelque distance on aperçoit encore de jeunes grappes : les unes sont en fleur, et les autres commencent à noircir. —
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«Arété, fille du divin Rhexenor, écoute-moi. Après avoir beaucoup souffert, je viens me jeter à tes pieds et implorer ton époux et ses convives. Puissent les dieux vous accorder à tous des jours heureux ! Puisse aussi chacun de vous laisser à ses enfants les richesses de son palais et les honneurs qu'il reçut du peuple ! Mais
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En achevant ces mots, le héros va s'asseoir près du feu, sur la cendre du foyer<ref><small>Pope, dans sa traduction anglaise de l’Odyssée, rend ce passage en ces termes : And humbled in the ashes
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« Alcinoüs, écarte de pareilles pensées de ton esprit. Non, je ne suis point, ni par ma taille, ni par mes traits, semblable aux dieux qui habitent les vastes régions célestes ; mais je
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« Ô reine, il me serait difficile de te raconter toutes mes infortunes ; car les immortels m'ont sans cesse accablé de maux : cependant je vais te répondre. — Au loin dans la mer s'élève l'île d'Ogygie qu'
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J'allais toucher à la terre quand une vague me jeta contre un immense rocher, dans un lieu stérile, et là j'aurais été impitoyablement englouti si, me retournant aussitôt, je n'eusse nagé jusqu'aux rives de cette île. Une plage favorable s'offrit à mes yeux, une plage unie, sans rochers et à l'abri des vents. Je gravis cette côte, et bientôt je tombai sur le sable privé de mouvement et de forces. La nuit divine descendit sur la terre, et moi, m'éloignant du fleuve formé par les eaux du ciel, je me couchai sous des arbustes ; je me couvris de feuilles sèches, et un dieu me plongea dans le plus profond sommeil. Là, quoique affligé de chagrins, je dormis toute la nuit sous ces feuilles et le lendemain même jusqu'au milieu du jour. Le soleil était près de terminer sa course quand le doux sommeil m'abandonna. C'est alors que j'aperçus les suivantes de ta fille jouant sur le rivage : Nausica, au milieu d'elles, paraissait semblable à une divinité. J'implorai son secours, et elle me répondit avec cet esprit de sagesse qu'on n'espère jamais rencontrer dans un âge aussi tendre ; car les jeunes gens manquent toujours de prudence. Ta fille m'offrit du pain en abondance, du vin aux sombres couleurs ; et, m'ayant fait baigner dans les eaux du fleuve, elle me donna de riches vêtements. — Maintenant, ô reine, je viens, malgré mon affliction, te raconter tout avec sincérité. »
Alors Alcinoüs dit à Ulysse :
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« Ma poitrine ne renferme pas un cœur qui s'irrite sans motif. Cependant je sais que l'honnêteté et la décence sont préférables à tout<ref><small>Knight termine ici le discours d'Alcinoüs, et supprime en outre la réponse d'Ulysse, ce qui comprend un retranchement de vingt-trois vers. « De tous les passages interpolés, dit-il, celui-ci est le plus absurde. Il répugne également au sens commun, à l'ensemble des faits et aux mœurs de ce siècle, qu'un roi consente à marier sa fille à un étranger, à un malheureux voyageur dont il ignore même le nom. Pourtant ce n'est pas seulement par ce motif que j'ai dû rejeter ce vers ; mais la première de οῖος, comme brève (vers 312), et l'expression ἔς· τῆμος (vers 318), qui ne se trouve nulle part, montrent assez la main maladroite de cette interpolation. » Dugas-Montbel, à ce sujet, fait observer fort judicieusement que Knight aurait pu ajouter qu'au vers 324 il est parlé de Tityus, fils de la Terre, et que jamais la terre n'est personnifiée dans Homère.</small></ref>. Que Jupiter, Minerve et Apollon m'accordent la faveur qu'un homme tel que toi, et pensant comme je pense moi-même, épouse ma fille et reste en ces lieux ! — Étranger, je te donnerais un palais et de grandes richesses si seulement tu consentais à habiter cette demeure. Mais aucun Phéacien ne te retiendra malgré ton désir : une semblable pensée serait odieuse. Demain j'ordonnerai tout pour ton départ ; jusqu'à ce moment goûte en paix les douceurs du sommeil<ref><small>Pour le sens de ce passage obscur, nous avons suivi les traductions de Pope et de Dugas-Montbel.</small></ref>. Quelle que soit la terre où tu désires arriver, demain les Phéaciens sillonneront la mer tranquille pour te conduire dans ta patrie, fût-elle même au delà de l'Eubée<ref><small>L'Eubée (Εὔβοια ἡ) était une île de la mer Égée, séparée de la Béotie par l'Euripe ; l'Eubée s'appelle aujourd'hui Négrepont. Les auteurs du Dictionnaire des Homérides nous apprennent que les habitants de l'Eubée sont appelés Abantes par Homère, et que selon les mythographes cette île tenait son nom d'Eubée, fille d'Asopus, ou plus exactement de ses excellents pâturages pour les bœufs.</small></ref>. Ce pays est bien loin de nous, disent les Phéaciens qui l'ont visité lorsqu'ils se rendirent avec le blond Rhadamanthe<ref><small>Un traducteur dit, au sujet de Rhadamanthe, fils de Jupiter et d'Europe : « Il habitait les Champs-Elysées en Espagne, sur les bords de l'Océan. Alcinoüs, observe-t-on, veut faire entendre que son île est près de cet heureux séjour ; et, pour le persuader, il dit que Rhadamanthe se servit des vaisseaux phéaciens, à cause de leur grande légèreté. Il semble que ce trait, ainsi que plusieurs autres, devrait faire marquer une autre place à l'île des Phéaciens. Rhadamanthe était un prince très
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