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découverte de ses titres littéraires, ne peut manquer de mûrir. Une fois pourvus d’institutions autonomes, les Bulgares cesseront de regarder au-delà du Danube, et, si le lien qui les unit à la Porte vient un jour à se relâcher, ils n’iront pas d’eux-mêmes s’enchaîner à un empire étranger. Ce qui, là où il peut exister encore, fomente le panslavisme, c’est l’oppression des Slaves, ce qui en doit effacer les derniers vestiges, c’est leur liberté.


V

En demandant l’autonomie de ses congénères de Turquie, la Russie travaille ainsi contre les projets qu’on lui prête sur les Balkans. Une fois libres, Serbes et Bulgares ne seraient pas pour la cour de Pétersbourg des cliens beaucoup plus dociles que les Roumains ou les Grecs. Slaves ou non Slaves, les chrétiens d’Orient rechercheront la protection de la Russie tant qu’ils craindront la servitude d’un autre côté; du jour où ils se sentiraient menacés par elle d’annexion ou de vasselage, ils deviendraient les plus défians vis-à-vis de la politique russe, et au besoin chercheraient un appui chez ses adversaires. Il se passerait chez eux ce que nous avons vu à nos portes en Belgique. Quand la France travaillait à l’indépendance des provinces belges des Pays-Bas, plusieurs Français s’imaginaient donner à leur patrie une sorte d’annexé ou d’avant-poste. On sait combien, au point de vue politique, l’événement a démenti ces espérances. Partout, en pareil cas, les petits peuples qui ont goûté à l’indépendance ou à l’autonomie redoutent les nations les plus voisines et les plus parentes, parce que ce sont celles qui peuvent le plus aisément les absorber. Or, par tout ce qui rapproche les peuples et constitue la nationalité, par l’histoire, par la géographie, par la langue, par les mœurs, les Bulgares sont manifestement plus éloignés des Russes que les Belges, les Wallons du moins, des Français. Si les Slaves du sud sont jamais engloutis par leur puissante protectrice, c’est que l’Europe les lui aura abandonnés, au lieu de les aider à maintenir ou à recouvrer leur autonomie nationale.

C’est par une étrange confusion en effet que nombre de personnes regardent les rêves du panslavisme comme un corollaire légitime de ce qu’on a nommé le principe de nationalité. Si le panslavisme en semble une conséquence, c’est une déduction forcée qui, dans son exagération, fausse et dénature singulièrement le principe. Le nom de Slave indique une race, nullement une nation. Il ne serait pas plus conforme à la nature et aux instincts nationaux de réunir en un seul état les différens peuples slaves, que de joindre en un seul les différens peuples néo-latins. C’est de même un abus