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Elle n’avait prononcé aucun nom. À ce frémissement de pudeur outragée, Mme de Carlsberg devina la scène qui s’était jouée, la veille ou ce matin même, entre l’imprudente mais si honnête créature et l’immonde Brion. Elle comprit, une fois de plus, combien l’évaporée, l’étourdie Parisienne était vraiment une innocente et qui venait d’avoir la première révélation des brutalités de la vie. Il y avait quelque chose de pathétique jusqu’à en être navrant dans ces remords, ces scrupules, ces révoltes soudaines d’une âme restée naïve par irréalisme. Et, si menacée elle-même par une autre brutalité d’un autre homme, Ely eut un mouvement de tout son être vers la malheureuse enfant. Elle allait lui parler de Marsh, lui raconter la conversation du yacht, la promesse de l’Américain, lorsqu’elle entendit, avec cette acuité des sens que nous avons au service de nos inquiétudes dans certaines heures, la porte de l’autre salon s’ouvrir. Elle se dit : « Voilà Olivier ! » En même temps, par un instinctif élan de superstition, elle regarda Yvonne encore tremblante, et mentalement elle ajouta : « Je l’aiderai Cette bonne action me portera bonheur… » Puis tout haut : « Calmez-vous. Je ne vais pas pouvoir causer avec vous davantage : j’attends quelqu’un. Mais revenez demain dans l’après-midi, et je vous jure que j’aurai trouvé ce que vous cherchez pour Gontran. Laissez-moi faire. Et du courage ! Surtout que personne ne soupçonne rien… Il ne faut jamais qu’on nous voie souffrir… »