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par le « néant », et de ce qu’une existence qui dure ne lui paraît pas assez forte pour vaincre l’inexistence et se poser elle-même. C’est pour cette raison sur­tout qu’elle incline à doter l’être véritable d’une existence ''logique, ''et non pas psychologique ou physique. Car telle est la nature d’une existence purement logique qu’elle semble se suffire à elle-même, et se poser par le seul effet de la force immanente à la vérité. Si je me demande pourquoi des corps ou des esprits existent plutôt que rien, je ne trouve pas de réponse. Mais qu’un principe logique tel que A = A ait la vertu de se créer lui-même, triomphant du néant dans l’éternité, cela me semble naturel. L’apparition d’un cercle tracé à la craie sur un tableau est chose qui a besoin d’être expliquée : cette existence toute physique n’a pas, par elle-même, de quoi vaincre l’inexistence. Mais l’ « essence logique » du cercle, c’est-à-dire la possibilité de le tracer selon une certaine loi, c’est-à-dire enfin sa définition, est chose qui me paraît éternelle ; elle n’a ni lieu ni date, car nulle part, à aucun moment, le tracé d’un cercle n’a commencé d’être possible. Supposons donc au principe sur lequel toutes choses reposent et que toutes choses manifestent une existence de même nature que celle de la définition du cercle, ou que celle de l’axiome A = A : le mystère de l’existence s’évanouit, car l’être qui est au fond de tout se pose alors dans l’éternel comme se pose la logique même. Il est vrai qu’il nous en coûtera un assez gros sacrifice : si le principe de toutes choses existe à la manière d’un axiome logique ou d’une définition mathématique, les choses elles-mêmes devront sortir de ce principe comme les applications d’un axiome ou les conséquences d’une définition, et il n’y aura plus de place, ni dans les choses ni dans leur principe, pour la causalité efficace entendue au sens d’un libre choix.
sant par le « néant », et de ce qu’une existence qui dure
ne lui paraît pas assez forte pour vaincre l’inexistence et
se poser elle-même. C’est pour cette raison surtout
qu’elle incline à doter l’être véritable d’une existence
logique, et non pas psychologique ou physique. Car
telle est la nature d’une existence purement logique qu’elle
semble se suffire à elle-même, et se poser par le seul effet
de la force immanente à la vérité. Si je me demande
pourquoi des corps ou des esprits existent plutôt que rien, je
ne trouve pas de réponse. Mais qu’un principe logique tel
que A = A ait la vertu de se créer lui-même, triomphant
du néant dans l’éternité, cela me semble naturel. L’apparition
d’un cercle tracé à la craie sur un tableau est chose
qui a besoin d’être expliquée : cette existence toute physique n’a pas, par elle-même, de quoi vaincre l’inexistence.
Mais 1’ « essence logique » du cercle, c’est-à-dire la possibilité de le tracer selon une certaine loi, c’est-à-dire enfin
sa définition, est chose qui me paraît éternelle ; elle n’a
ni lieu ni date, car nulle part, à aucun moment, le tracé
d’un cercle n’a commencé d’être possible. Supposons
donc au principe sur lequel toutes choses reposent et que
toutes choses manifestent une existence de même nature
que celle de la définition du cercle, ou que celle de
l’axiome A = A : le mystère de l’existence s’évanouit, car
l’être qui est au fond de tout se pose alors dans l’éternel
comme se pose la logique même. Il est vrai qu’il nous en
coûtera un assez gros sacrifice : si le principe de toutes
choses existe à la manière d’un axiome logique ou d’une
définition mathématique, les choses elles-mêmes devront
sortir de ce principe comme les applications d’un axiome
ou les conséquences d’une définition, et il n’y aura plus
de place, ni dans les choses ni dans leur principe, pour
la causalité efficace entendue au sens d’un libre choix.