« Aventures d’Arthur Gordon Pym » : différence entre les versions

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* [[Les Aventures d’Arthur Gordon Pym - Préface|Préface]]
* I. [[Aventuriers précoces]]
* II. [[La Cachette]]
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* XXIV. [[L’Évasion]]
* XXV. [[Le Géant blanc]]
* XXVI. [[Conjectures]]
 
'''Les aventures d’Arthur Gordon Pym de Nantucket''' comprenant les détails d’une révolte et d’un affreux massacre à bord du brick américain le Grampus, faisant route vers les mers du Sud, en juin 1827 ; plus, l’histoire de la reprise du navire par les survivants ; leur naufrage et leurs horribles souffrances par suite de la famine ; leur délivrance par la goélette anglaise la Jane Guy ; courte exploration de ce navire dans l’océan Antarctique ; prise de la goélette et massacre de l’équipage dans un groupe d’îles au quatre-vingt-quatrième parallèle de latitude sud ; conjointement, les incroyables aventures et découvertes dans l’extrême sud, dont ce déplorable désastre a été l’origine.
 
== Préface ==
 
Lors de mon retour aux États-Unis, il y a quelques mois, après l’extraordinaire série d’aventures dans les mers du Sud et ailleurs, dont je donne le récit dans les pages suivantes, le hasard me fit faire la connaissance de plusieurs gentlemen de Richmond (Virginie), qui, prenant un profond intérêt à tout ce qui se rattache aux parages que j’avais visités, me pressaient incessamment et me faisaient un devoir de livrer ma relation au public. J’avais, toutefois, plusieurs raisons pour refuser d’agir ainsi : les unes, d’une nature tout à fait personnelle et ne concernant que moi ; les autres, il est vrai, un peu différentes. Une considération qui particulièrement me faisait reculer, était que, n’ayant pas tenu de journal durant la plus grande partie de mon absence, je craignais de ne pouvoir rédiger de pure mémoire un compte rendu assez minutieux, assez lié pour avoir toute la physionomie de la vérité, dont il serait cependant l’expression réelle, ne portant avec lui que l’exagération naturelle, inévitable, à laquelle nous sommes tous portés quand nous relatons des événements dont l’influence a été puissante et active sur les facultés de l’imagination. Une autre raison, c’était que les incidents à raconter se trouvaient d’une nature si positivement merveilleuse, que, mes assertions n’ayant nécessairement d’autre support qu’elles-mêmes (je ne parle pas du témoignage d’un seul individu, et celui-là à moitié Indien), je ne pouvais espérer de créance que dans ma famille et chez ceux de mes amis qui, dans le cours de la vie, avaient eu occasion de se louer de ma véracité ; mais, selon toute probabilité, le grand public regarderait mes assertions comme un impudent et ingénieux mensonge. Je dois dire aussi que ma défiance de mes talents d’écrivain était une des causes principales qui m’empêchaient de céder aux suggestions de mes conseillers. Parmi ces gentlemen de la Virginie que ma relation intéressait si vivement, particulièrement toute la partie ayant trait à l’océan Antarctique, se trouvait M. Poe, naguère éditeur du Southern Literary Messenger, revue mensuelle publiée à Richmond par M. Thomas W. White1. Il m’engagea fortement, lui entre autres, à rédiger tout de suite un récit complet de tout ce que j’avais vu et enduré, et à me fier à la sagacité et au sens commun du public, affirmant, non sans raison, que, si grossièrement venu que fût mon livre au point de vue littéraire, son étrangeté même, si toutefois il y en avait, serait pour lui la meilleure chance d’être accepté comme vérité. Malgré cet avis, je ne pus me résoudre à obéir à ses conseils. Il me proposa ensuite, voyant que je n’en voulais pas démordre, de lui permettre de rédiger à sa manière un récit de la première partie de mes aventures, d’après les faits rapportés par moi, et de la publier sous le manteau de la fiction dans le Messager du Sud. Je ne vis pas d’objection à faire à cela, j’y consentis et je stipulai seulement que mon nom véritable serait conservé. Deux morceaux de la prétendue fiction parurent conséquemment dans le Messager (numéros de janvier et février 1837), et, dans le but de bien établir que c’était une pure fiction, le nom de M. Poe fut placé en regard des articles à la table des matières du Magazine. La façon dont cette supercherie fut accueillie m’induisit enfin à entreprendre une compilation régulière et une publication desdites aventures ; car je vis qu’en dépit de l’air de fable dont avait été si ingénieusement revêtue cette partie de mon récit imprimée dans le Messager (où d’ailleurs pas un seul fait n’avait été altéré ou défiguré), le public n’était pas du tout disposé à l’accepter comme une pure fable, et plusieurs lettres furent adressées à M. Poe, qui témoignaient d’une conviction tout à fait contraire. J’en conclus que les faits de ma relation étaient de telle nature qu’ils portaient avec eux la preuve suffisante de leur authenticité, et que je n’avais conséquemment pas grand-chose à redouter du côté de l’incrédulité populaire.
 
Après cet exposé, on verra tout d’abord ce qui m’appartient, ce qui est bien de ma main dans le récit qui suit, et l’on comprendra aussi qu’aucun fait n’a été travesti dans les quelques pages écrites par M. Poe. Même pour les lecteurs qui n’ont point vu les numéros du Messager, il serait superflu de marquer où finit sa part et où la mienne commence ; la différence du style se fera bien sentir. A. G. PYM New York, juillet 1838.
 
1. Edgar Poe fut le premier éditeur, pour ainsi dire le fondateur du Southern Literary Messenger. Il était alors très jeune. Voir la préface du premier volume des Histoires extraordinaires. (C.B.)
 
== XXVI. Conjectures ==
 
Les circonstances relatives à la mort récente de M. Pym, si soudaine et si déplorable, sont déjà bien connues du public, grâce aux communications de la presse quotidienne. Il est à craindre que les chapitres restants qui devaient compléter sa relation, et qu’il avait gardés, pour les revoir, pendant que les précédents étaient sous presse, ne soient irrévocablement perdus par suite de la catastrophe dans laquelle il a péri lui-même. Cependant il se pourrait que tel ne fût pas le cas, et le manuscrit, si finalement on le retrouve, sera livré au public. On a tenté tous les moyens pour remédier à ce défaut. Le gentleman dont le nom est cité dans la préface, et qu’on aurait supposé capable, d’après ce qui est dit de lui, de combler la lacune, a décliné cette tâche, et cela, pour des raisons suffisantes tirées de l’inexactitude générale des détails à lui communiqués et de sa défiance relativement à l’absolue vérité des dernières parties du récit. Peters, de qui on pourrait espérer quelques renseignements, est encore vivant et réside dans l’Illinois ; mais on ne peut pas le trouver pour le moment. Plus tard, on pourra le voir, et sans aucun doute il fournira des documents pour compléter le compte-rendu de M. Pym. La perte des deux ou trois derniers chapitres (car il n’y en avait que deux ou trois) est une perte d’autant plus déplorable qu’ils contenaient indubitablement la matière relative au pôle même, ou du moins aux régions situées dans la proximité immédiate du pôle, et que les affirmations de l’auteur relativement à ces régions pourraient être bientôt vérifiées ou contredites par l’expédition dans l’océan Antarctique que le gouvernement prépare en ce moment même. Il y a un point de la relation sur lequel il est bon de présenter quelques observations ; et ce sera pour l’auteur de cet appendice un plaisir très vif, si ses réflexions ont pour résultat de donner un certain crédit aux très singulières pages récemment publiées.
 
Nous voulons parler des gouffres découverts dans l’île de Tsalal et de l’ensemble des figures comprises dans le chapitre XXIII. M. Pym a donné les dessins des abîmes sans commentaire, et il décide résolument que les entailles trouvées à l’extrémité du gouffre situé le plus à l’est n’ont qu’une ressemblance fantastique avec des caractères alphabétiques, enfin, et d’une manière positive, qu’elles ne sont pas des caractères. Cette assertion est faite d’une manière si simple et soutenue par une sorte de démonstration si concluante (c’est-à-dire l’adaptation des fragments trouvés dans la poussière dont les saillies remplissaient exactement les entailles du mur), que nous sommes forcés de croire l’écrivain de bonne foi ; et aucun lecteur raisonnable ne supposera qu’il en soit autrement. Mais comme les faits relatifs à toutes les figures sont des plus singuliers (particulièrement quand on les rapproche de certains détails dans le corps du récit), nous ferons peut-être bien de toucher quelques mots de l’ensemble de ces faits, et cela nous paraît d’autant plus à propos que les faits en question ont, sans aucun doute, échappé à l’attention de M. Poe. Ainsi, les figures 1, 2, 3, 4 et 5, quand on les joint l’une à l’autre dans l’ordre précis suivant lequel se présentent les gouffres eux-mêmes, et quand on les débarrasse des petits embranchements latéraux ou galeries voûtées (qui, on se le rappelle, servaient simplement de moyens de communication entre les galeries principales et étaient d’un caractère totalement différent), constituent un mot-racine éthiopien, la racine ou être ténébreux, d’où viennent tous les dérivés ayant trait à l’ombre et aux ténèbres. Quant à l’entaille placée à gauche et le plus au nord, dans la figure 4, il est plus que probable que l’opinion de Peters était bonne, et que son apparence hiéroglyphique était véritablement l’ouvrage de l’art et une représentation intentionnelle de la force humaine. Le lecteur a le dessin sous les yeux ; il saisira ou ne saisira pas la ressemblance indiquée ; mais la suite des entailles fournit une forte confirmation de l’idée de Peters. La rangée supérieure est évidemment le mot-racine arabe ou être blanc, d’où tous les dérivés ayant trait à l’éclat et à la blancheur. La rangée inférieure n’est pas aussi nette ni aussi facile à saisir. Les caractères sont quelque peu cassés et disjoints ; néanmoins il n’y a pas à douter que, dans leur état parfait, ils ne formassent complètement le mot égyptien ou la région du sud. On remarquera que ces interprétations confirment l’opinion de Peters relativement à la figure située le plus au nord. Le bras est étendu vers le sud. De telles conclusions ouvrent un vaste champ aux rêveries et aux conjectures les plus excitantes. Peut-être doit-on les rapprocher de quelques-uns des incidents du récit qui sont le plus faiblement indiqués ; quoique la chaîne des rapports ne saute pas aux yeux, elle est bien complète. Tekeli-li ! était le cri des naturels de Tsalal épouvantés à la vue du cadavre de l’animal blanc ramassé en mer. Tekeli-li ! était aussi l’exclamation de terreur du captif tsalalien au contact des objets blancs appartenant à M. Pym. C’était aussi le cri des gigantesques oiseaux blancs au vol rapide qui sortaient du rideau blanc de vapeur au sud. On n’a rien trouvé de blanc à Tsalal, et rien au contraire qui ne fût tel dans le voyage subséquent vers la région ultérieure. Il ne serait pas impossible que Tsalal, le nom de l’île aux abîmes, soumis à une minutieuse analyse philologique, ne trahît quelque parenté avec les gouffres alphabétiques ou quelque rapport avec les caractères éthiopiens si mystérieusement façonnés par leurs sinuosités. J’ai gravé cela dans la montagne, et ma vengeance est écrite dans la poussière du rocher.
 
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