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=== BANDEAU ===
 
s. m. C'estC’est une assise de pierre saillante décorée de moulures
ou d'ornementsd’ornements sculptés ou peints qui sépare horizontalement les étages
d'und’un monument. Le bandeau indique un plancher, un sol; il ne peut être
indifféremment placé sur une façade ou dans un intérieur; c'estc’est un repos
pour l'œill’œil, c'estc’est l'arasel’arase d'uned’une construction superposée. Dans les églises de
l'époquel’époque romane, un bandeau intérieur indique presque toujours le sol du
triforium, il est interrompu par la ligne verticale des colonnes engagées, ou
passe devant elles. Dans l'architecturel’architecture domestique, le niveau des planchers
est marqué souvent, à l'extérieurl’extérieur, par un bandeau de pierre. Sur les
façades, des bandeaux séparent les ordonnances d'architectured’architecture superposées.
Ils ont cet avantage de garantir les parements extérieurs, leur
saillie empêchant les eaux pluviales de laver les murs; aussi les a-t-on fait
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construction des parements, et leurs profils étaient-ils, surtout à partir du
XIII<sup>e</sup> siècle, tracés de manière à former une mouchette ou un larmier.
L'influenceL’influence des profils antiques romains se fait sentir dans les bandeaux
comme dans tous les autres membres de l'architecturel’architecture romane. Pris dans
une assise assez basse, les bandeaux affectent, jusqu'aujusqu’au XII<sup>e</sup> siècle, à l'extérieurl’extérieur
ou à l'intérieurl’intérieur, des formes très-simples, et se composent ordinairement
d'und’un bizeau A, d'und’un cavet B légèrement concave, ou d'uned’une doucine
C sous un plan horizontal (1). Ces bandeaux sont fréquemment ornés
de sculptures, surtout à partir de la fin du XI<sup>e</sup> siècle, et ils passent devant
les saillies verticales de l'architecturel’architecture, piles, contre-forts, etc. Tels sont les
bandeaux intérieurs de la nef de l'églisel’église abbatiale de Vézelay posés à l'arasel’arase
du dessus des archivoltes des bas-côtés (2) (commencement du XII<sup>e</sup> siècle).
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<div class=prose>
Le lit supérieur de ces bandeaux forme encore une saillie horizontale. On
remarqua bientôt que ces saillies à l'intérieurl’intérieur des édifices masquaient, par
leur projection, une partie des parements élevés au-dessus d'ellesd’elles. Soit A
le profil d'und’un bandeau intérieur (3), la
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[[Image:Profil.bandeau.png|center]]
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<br>
plus forte reculée du point visuel étant suivant la ligne D C, toute la hauteur
sera perdue pour l'œill’œil, la proportion de
l'ordonnancel’ordonnance architectonique placée au-dessus
de B sera détruite par la perte de cet espace
B C. Décorant les bandeaux de sculptures,
surtout à l'intérieurl’intérieur, les architectes tenaient à
présenter les ornements sur une surface perpendiculaire
à la ligne visuelle; ils ne renoncèrent
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bandeaux intérieurs du bras de croix sud de
la cathédrale de Soissons, du chœur de Saint-Remy
de Reims (fin du XII<sup>e</sup> siècle). À l'extérieurl’extérieur, on avait également
reconnu que les bandeaux saillants dont le lit supérieur était laissé horizontal
avaient l'inconvénientl’inconvénient de ne pas donner un écoulement prompt aux
eaux pluviales. Les
</div>
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bandeaux extérieurs taillés suivant le profil A (5) retenaient la neige, faisaient
rejaillir les gouttes de pluie projetées suivant
C D jusqu'enjusqu’en E, se détérioraient facilement
et étaient une cause de ruine pour la base des
parements F G élevés au-dessus de leur saillie,
à cause de ce rejaillissement. Jusqu'auJusqu’au commencement
du XIII<sup>e</sup> siècle, on décorait volontiers
les bandeaux extérieurs, comme ceux
intérieurs, d'ornementsd’ornements sculptés, particulièrement
dans les provinces de la Normandie,
du Poitou, de la Saintonge, du Languedoc
et de l'estl’est; on tenait à ce que les sculptures
fussent vues, et en même temps préservées des dégradations causées par les
eaux pluviales. Ces ornements étaient taillés sur un bizeau, une doucine
ou un talon très-plats et protégés par le lit horizontal supérieur; les ornements les plus ordinaires étaient des [[Dictionnaire raisonné de l'architecturel’architecture française du XIe au XVIe siècle - Tome 5, Dent-de-scie|Dents-de-scie]], des [[Dictionnaire raisonné de l'architecturel’architecture française du XIe au XVIe siècle - Tome 2, Billettes|Billettes]], des [[Dictionnaire raisonné de l'architecturel’architecture française du XIe au XVIe siècle - Tome 5, Damier|Damiers]]
(voy. ces mots). Mais lorsque au XII<sup>e</sup> siècle, dans les provinces du nord particulièrement,
tous les membres de l'architecturel’architecture furent soumis à un système
général de construction, tendant à ne jamais présenter à la pluie des
surfaces horizontales, on protégea les bandeaux eux-mêmes par des talus
en pierre et une mouchette. C'estC’est ainsi que sont disposés les bandeaux de
la tour Saint-Romain (6) de la cathédrale de Rouen (XII<sup>e</sup> siècle). À la même
époque, dans les provinces méridionales, on se contentait de donner aux
bandeaux extérieurs une faible saillie, mais on ne les surmontait pas d'uned’une
pente très-prononcée comme on le faisait dans l'Îlel’Île de France, la Picardie
et la Normandie, et leurs ornements n'étaientn’étaient pas abrités par une saillie
formant mouchette. Entre autres exemples, nous
</div>
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donnons ici (7) un des bandeaux extérieurs du bas-côté nord de l'églisel’église Saint-Euthrope de Saintes,
qui, sans offrir à la pluie des aspérités pouvant être facilement détruites,
ne sont pas cependant garantis par une assise ou un profil formant larmier.
Il n'estn’est pas besoin de dire que ces détails d'architectured’architecture présentent
une grande variété, soit comme profils, soit comme ornementation; nous
ne prétendons donner dans cet article que leurs dispositions générales.
Nous ne saurions cependant passer sous silence les bandeaux extérieurs
qui servent de soubassement au triforium des églises d'Autund’Autun, de Beaune
et de Langres; leur ornementation est trop empreinte des traditions romaines,
pour que nous ne reproduisions pas un de ces exemples. Voici le
bandeau qui pourtourne le chœur de l'églisel’église de Beaune, à la hauteur du sol
des galeries surmontant les bas-côtés (8). Le même bandeau, à peu de
différences près, se retrouve à la cathédrale d'Autund’Autun; à Langres, les rosaces
sont remplacées par un enroulement évidemment copié sur des
fragments antiques.
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[[Image:Bandeau.eglise.Beaune.png|center]]
<div class=prose>
Au XIII<sup>e</sup> siècle, les bandeaux deviennent plus rares dans l'architecturel’architecture
que pendant la période romane. Déjà, à cette époque, les architectes
semblaient exclure la ligne horizontale, et ils ne lui donnaient qu'unequ’une
importance relativement secondaire. Cependant l'architectel’architecte de la cathédrale
d'Amiensd’Amiens avait cru devoir accuser très-vigoureusement la hauteur du
sol du triforium dans l'intérieurl’intérieur de la nef, par un large bandeau richement
décoré de feuillages très-saillants; ce bandeau prend d'autantd’autant plus d'importanced’importance
dans l'ordonnancel’ordonnance architectonique de cet intérieur, qu'ilqu’il passe devant
les faisceaux de colonnes et les coupe vers le milieu de leur hauteur (9).
A indique la coupe de ce bandeau avec l'appuil’appui du triforium. Évidemment,
ici, le maître de l'œuvrel’œuvre a voulu rompre les lignes verticales qui dominent
dans cette nef, dont la construction remonte à 1230 environ (voy. [[Dictionnaire raisonné de l'architecturel’architecture française du XIe au XVIe siècle - Tome 1, Architecture religieuse|Architecture Religieuse]], fig. 35). Il y avait là comme un dernier souvenir de
l'architecturel’architecture romane<span id="note1"></span>[[#footnote1|<sup>1</sup>]]. Sans avoir une aussi grande importante, il arrive
presque toujours que les bandeaux, dans les
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<br>
édifices du commencement du XIII<sup>e</sup> siècle, passent devant les faisceaux de colonnes, et servent de bagues
pour maintenir leurs fûts posés en délit (voy. [[Dictionnaire raisonné de l'architecturel’architecture française du XIe au XVIe siècle - Tome 2, Bague|Bague]]). Quelquefois aussi les
bandeaux s'arrondissents’arrondissent en corbeille, et, soutenus par un cul-de-lampe,
servent de point d'appuid’appui à des faisceaux de colonnettes ne naissant qu'auqu’au-dessus
des colonnes du rez-de-chaussée entre les archivoltes. Cette disposition
est particulièrement adoptée lorsque les piles de rez-de-chaussée sont
monocylindriques mais non composées de la réunion des colonnes qui
doivent porter les voûtes supérieures. L'intérieurL’intérieur de l'églisel’église de Notre-Dame
de Semur en Auxois présente de ces bandeaux devenant tablettes de cul-de-lampe
sous les bases des colonnettes supérieures (10).
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[[Image:Bandeau.Notre.Dame.Semur.en.Auxois.png|center]]
<div class=prose>
Pendant le XIII<sup>e</sup> siècle, à l'extérieurl’extérieur, les bandeaux ne sont plus guère
que des moulures avec larmiers sans ornements; car les architectes
de cette époque craignaient évidemment de détruire l'effetl’effet des lignes
verticales, en donnant aux membres horizontaux de leur architecture une
trop grande importance, et la sculpture, en occupant les yeux, aurait prêté
aux bandeaux trop de valeur. Cependant on voit encore quelquefois, à
cette époque, des bandeaux avec ornements; mais c'estc’est lorsque l'onl’on a voulu
indiquer un étage ou sol. C'estC’est ainsi qu'àqu’à l'extérieurl’extérieur de la Sainte-Chapelle
de Paris il existe un grand bandeau décoré de feuilles et de crochets au
niveau du sol de la chapelle haute.
 
Si séduisante que soit l'architecturel’architecture romane du Poitou et des provinces
de l'ouestl’ouest, il faut convenir qu'ellequ’elle n'estn’est pas si scrupuleuse, et ses monuments
sont parfois couverts de bandeaux sculptés dont la place est déterminée
seulement par le goût ou la fantaisie de l'artistel’artiste, non par un étage,
une ordonnance d'architectured’architecture distincte. Pendant la période romane,
beaucoup de membres horizontaux d'architectured’architecture dont la fonction est
très-secondaire, comme les impostes des archivoltes, les tailloirs des
chapiteaux de colonnes engagées, des appuis de croisées, où les tablettes
basses des arcatures de couronnement, deviennent de véritables bandeaux,
c'estc’est-à-dire qu'ilsqu’ils pourtournent toutes les saillies de la construction, tels que
les contre-forts, par exemple. Jusqu'àJusqu’à la fin du XII<sup>e</sup> siècle, cette méthode
persiste; mais quand le système de l'architecturel’architecture ogivale est développé, on
ne voit jamais ces membres secondaires horizontaux devenir des bandeaux.
Cela est bien évident à la Sainte-Chapelle de Paris; seul, le profil dont
nous venons de parler, et qui indique le niveau du sol de la chapelle haute,
pourtourne l'édificel’édifice, passe sur les nus des murs comme sur les contre-forts.
À la cathédrale d'Amiensd’Amiens, à la cathédrale de Reims et à celle de Chartres,
les appuis des fenêtres du rez-de-chaussée forment bandeau, mais sans ornements
(voy. [[Dictionnaire raisonné de l'architecturel’architecture française du XIe au XVIe siècle - Tome 2, Chapelle|Chapelle]]); à partir de ce profil, les contre-forts montent
verticalement sans ressauts ni interruption horizontale sur les côtés, leurs
faces étant seules munies de larmiers qui empêchent les eaux de laver leurs
parements exposés à la pluie. Il ne peut en être autrement; lorsqu'onlorsqu’on
examine la structure des édifices dans lesquels le système ogival est
franchement adopté et suivi, toute la construction ne se composant que de
contre-forts entre lesquels des fenêtres s'ouvrents’ouvrent dans toute la hauteur des
étages, il n'yn’y avait pas de murs; les bandeaux indiquent des repos horizontaux,
des arases, étaient contraires à ce système vertical; leur effet eût été
fâcheux; leurs profils saillants sur les faces latérales des contre-forts seraient
venus pénétrer gauchement les piédroits des fenêtres, sans utilité ni
raison (voy. [[Dictionnaire raisonné de l'architecturel’architecture française du XIe au XVIe siècle - Tome 1, Architecture religieuse|Architecture Religieuse]], [[Dictionnaire raisonné de l'architecturel’architecture française du XIe au XVIe siècle - Tome 4, Contre-fort|Contre-fort]]). À partir du XIII<sup>e</sup> siècle,
dans l'architecturel’architecture religieuse, le bandeau n'existen’existe plus par le fait, les murs
pleins étant supprimés; on ne les rencontre, comme dans le dernier
exemple que nous venons de donner, que lorsqu'ilslorsqu’ils sont le prolongement
horizontal des appuis des fenêtres; seulement, leurs profils se modifient
suivant le goût du moment (voy. [[Dictionnaire raisonné de l'architecturel’architecture française du XIe au XVIe siècle - Tome 7, Profil |Profil ]]). Dans l'architecturel’architecture civile, où les
murs sont conservés forcément, où la construction ne se compose pas
uniquement de contre-forts laissant de grands jours entre eux, des bandeaux
indiquent le niveau des planchers (voy. [[Dictionnaire raisonné de l'architecturel’architecture française du XIe au XVIe siècle - Tome 3, Château|Château]], [[Dictionnaire raisonné de l'architecturel’architecture française du XIe au XVIe siècle - Tome 6, Maison|Maison]]). Parfois
alors les bandeaux sont décorés de sculptures, particulièrement pendant
le XV<sup>e</sup> siècle. Composés de simples moulures profilées dans une assise
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hauteur et une saillie prononcée au XV<sup>e</sup> siècle, coupent les façades horizontalement,
par une ornementation plus ou moins riche. Au XVI<sup>e</sup> siècle, les
bandeaux perdent leur aspect d'arased’arase, pour devenir de véritables entablements
avec leur architrave, leur frise et leur corniche, même lorsque
l'absencel’absence d'und’un ordre antique devrait exclure l'emploil’emploi de tous ces membres.
Les façades ne sont plus alors que des bâtiments superposés.
 
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<span id="footnote1">[[#note1|1]] : Nous avons entendu souvent louer ou blâmer la disposition du grand bandeau de
la cathédrale d'Amiensd’Amiens, par des personnes compétentes. Mais la vérité nous force
d'ajouterd’ajouter que les louanges étaient données par des amateurs de l'architecturel’architecture gothique à son apogée, et le blâme par des enthousiastes du style roman. Comme dans l'unl’un ou
l'autrel’autre cas il y avait contradiction entre les goûts et les jugements de chacun, nous ne
savons trop quel jugement porter nous-même. Nous dirons seulement que le parti
adopté à Amiens est franc, qu'ilqu’il dénote une intention bien arrêtée, que cet intérieur
de nef nous paraît être le plus beau spécimen que nous possédions en France de
l'architecturel’architecture du XIII<sup>e</sup> siècle, que nous nous rendons difficilement compte de l'effetl’effet
que produirait cet intérieur dépourvu de cette riche ceinture de feuillages vigoureusement
refouillés, s'ils’il y gagnerait ou s'ils’il y perdrait; et prenant la chose pour for-belle, exécutée par des artistes aussi bons connaisseurs que nous, et plus familiers
avec les grands effets, nous ne pouvons qu'approuverqu’approuver cette hardiesse de l'architectel’architecte
de la nef d'Amiensd’Amiens.