« Périclès/Traduction Guizot, 1862 » : différence entre les versions
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{{personnage|Thaliard : }}Votre Majesté m'appelle-t-elle ?
{{personnage|Antiochus : }}Thaliard, tu es de ma maison et le confident des secrets de mon
{{personnage|Thaliard : }}Sire, cela suffit.
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{{didascalie|(Il sort.)}}
{{personnage|Antiochus : }}Thaliard, adieu ; jusqu'à ce que Périclès soit mort, mon
{{didascalie|(Il sort.)}}
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{{personnage|Périclès : }}Que personne ne nous interrompe. Pourquoi ce poids accablant de pensées ? Triste compagne, la sombre mélancolie est chez moi une chose si habituelle qu'il n'est aucune heure du glorieux jour ou de la nuit paisible (tombe où devrait dormir tout chagrin) qui puisse m'apporter le repos. Ici les plaisirs courtisent mes yeux, et mes yeux les évitent, et le danger que je craignais est près d'Antiochus dont le bras semble trop court pour m'atteindre ici. Ni le plaisir ne peut ici charmer mon âme, ni l'éloignement du péril ne peut me consoler. Telles sont ces passions qui, nées d'une fatale terreur, sont entretenues par l'inquiétude. Ce qui n'était jadis qu'une crainte de ce qui pouvait arriver s'est changé en précaution contre ce qui peut arriver encore. Voilà ma position. Le grand Antiochus (contre lequel je ne puis lutter, puisque vouloir et agir sont pour lui même chose) croira que je parlerai lors même que je lui jurerai de garder le silence. Il ne me servira guère de lui dire que je l'honore, s'il soupçonne que je puis le déshonorer ; il fera tout pour étouffer la voix qui pourrait le faire rougir ; il couvrira la contrée de troupes ennemies et déploiera un si terrible appareil de guerre que mes États perdront tout courage ; mes soldats seront vaincus avant de combattre, et mes sujets punis d'une offense qu'ils n'ont pas commise. C'est mon inquiétude pour eux et non une crainte égoïste (je ne suis que comme la cime des arbres qui protège les racines qui l'avoisinent), qui fait languir mon corps et mon âme. Je suis puni même avant qu'Antiochus m'ait attaqué.
{{personnage|Premier Seigneur : }}Que la joie et le bonheur consolent votre auguste
{{personnage|Second Seigneur : }}Conservez la paix dans votre
{{personnage|Hélicanus : }}Silence, silence, seigneurs, et laissez parler l'expérience. Ils abusent le roi, ceux qui le flattent. La flatterie est le soufflet qui enfle le crime. Celui qu'on flatte n'est qu'une étincelle à laquelle le souffle de la flatterie donne la chaleur et la flamme, tandis que les remontrances respectueuses conviennent aux rois ; car ils sont hommes, et peuvent se tromper. Quand le seigneur Câlin vous annonce la paix il vous flatte, et déclare la guerre à votre roi. Prince, pardonnez-moi, ou flattez-moi si vous voulez, mais je ne puis me mettre beaucoup plus bas que mes genoux.
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{{personnage|Hélicanus : }}Hélas ! seigneur.
{{personnage|Périclès : }}Voilà ce qui bannit le sommeil de mes yeux, le sang de mon visage ; voilà ce qui remplit mon
{{personnage|Hélicanus : }}Eh bien ! seigneur, puisque vous m'avez permis de parler, je vous parlerai franchement. Vous craignez Antiochus, et vous n'avez pas tort ; on peut craindre un tyran qui, soit par une guerre ouverte ou une trahison cachée, attentera à votre vie. C'est pourquoi, seigneur, voyagez pendant quelque temps, jusqu'à ce que sa rage et sa colère soient oubliées, ou que le destin ait tranché le fil de ses jours. Laissez-nous vos ordres : si vous m'en donnez, le jour ne sert pas plus fidèlement la lumière que je vous servirai.
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{{personnage|Troisième Pêcheur : }} En vérité, maître, je pensais à ces pauvres gens qui viennent de faire naufrage à nos yeux, tout à l'heure.
{{personnage|Premier Pêcheur : }} Hélas ! pauvres âmes ! cela me déchirait le
{{personnage|Troisième Pêcheur : }} Eh bien ! maître, ne l'avais-je pas dit en voyant ces marsouins bondir. On dit qu'ils sont moitié chair et moitié poisson. Le diable les emporte ! ils ne paraissent jamais que je ne pense à être noyé ; maître, je ne sais pas comment font les poissons pour vivre dans la mer.
{{personnage|Premier Pêcheur : }} Eh ! comme les hommes à terre : les gros mangent
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{{didascalie|(Ils sortent.)}}
{{Scène| II}}
Place publique, ou plate-forme conduisant aux lices. Sur un des côtés de la
place est un pavillon pour la réception du roi, de la princesse, et des
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(Il sortent. Acclamations ; cris répétés de : Vive le pauvre chevalier !)
{{Scène| III}}
Salle d'apparat. Banquet préparé.
SIMONIDE entre avec THAISA, les SEIGNEURS, les CHEVALIERS et
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{{personnage|Périclès : }}Une autre me conviendrait mieux.
PREMIER CHEVALIER. Cédez, seigneur ; car nous ne savons ni dans
nos
{{personnage|Périclès : }}Vous êtes de courtois chevaliers.
{{personnage|Simonide : }}Asseyez-vous, asseyez-vous, seigneur, asseyez-vous.
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(Ils sortent.)
{{Scène| IV}}
Tyr. Appartement dans le palais du gouverneur.
{{personnage|Hélicanus}} entre avec ESCANÈS.
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(Ils sortent.)
{{Scène| V}}
Pentapolis. Appartement dans le palais.
Entre SIMONIDE lisant une lettre ; les CHEVALIERS viennent à sa
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{{personnage|Simonide : }}Elle ne pense pas de même : parcourez cet écrit.
{{personnage|Périclès : }}Qu'est-ce que ceci ? Elle aime, dit cette lettre, le chevalier de
Tyr. (
seigneur, ne cherchez point à tendre un piège à un malheureux étranger qui
ne prétendit jamais à l'amour de votre fille, et se contente de l'honorer.
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{{personnage|Périclès : }}Traître !
{{personnage|Simonide : }}Oui, traître.
{{personnage|Périclès : }}
gorge.
SIMONIDE{{didascalie|, à part}} : J'atteste les dieux que j'applaudis à son courage.
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lequel le prince, ballotté par les flots, est supposé parler.
(Gower sort.)
{{Acte|
{{Scène| I}}
Périclès sur un vaisseau en mer.
{{personnage|Périclès : }}O toi, dieu de ce vaste abîme, gourmande ces vagues qui
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bon matelot ; je vais apporter le corps. (Ils sortent.)
{{Scène| II}}
Éphèse. Appartement dans la maison de Cérimon.
Entrent CÉRIMON avec UN VALET et quelques personnes qui ont fait
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cette nuit.
{{personnage|Cérimon : }}Votre maître sera mort avant votre retour : il n'est rien qui
puisse le sauver. (
direz l'effet que le remède produira.
(Sortent Philémon, le valet et les naufragés.)
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la fille d'un roi : les dieux récompenseront sa charité : ce trésor lui
appartient.»
Si tu vis, Périclès, ton
cette nuit.
SECOND ÉPHÉSIEN. Probablement, seigneur.
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(Ils sortent emportant Thaïsa.)
{{Scène| III}}
Tharse. Appartement dans le palais de Cléon.
Périclès entre avec Cléon, Dionysa, LYCHORIDA ET MARINA.
{{personnage|Périclès : }}Respectable Cléon, je suis forcé de partir, l'année est expirée
et Tyr ne jouit plus que d'une paix douteuse ; recevez, vous et votre
épouse, toute la reconnaissance dont est rempli mon
se chargent du reste.
{{personnage|Cléon : }}Les traits de la fortune qui vous frappent mortellement se font
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(Ils sortent.)
{{Scène| IV}}
Éphèse. Appartement dans la maison de Cérimon.
Entrent CÉRIMON ET THAISA.
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paraître avec Léonin, un meurtrier.
(Gower sort.)
{{Acte|
{{Scène| I}}
Tharse. Plaine près du rivage de la mer.
Dionysa entre avec LÉONIN.
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monde en aussi peu de temps, qui te rapportât davantage. Que la
conscience, qui n'est qu'une froide conseillère, n'allume pas la sympathie
dans ton
abjurée, ne t'attendrisse pas ; sois un soldat résolu dans ton dessein.
{{personnage|Léonin : }}Je te tiendrai parole ; mais c'est une céleste créature.
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chef-d'oeuvre ; il regrettera un si long voyage, et il nous blâmera, mon
époux et moi, d'avoir négligé sa fille. Allez, je vous prie, vous promener et
soyez moins triste. Conservez ce teint charmant qui a désolé tant de
de tous les âges. Ne vous inquiétez pas de moi, je retourne seule au palais.
{{personnage|Marina : }}Eh bien ! j'irai, mais je ne m'en soucie guère.
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{{personnage|Marina : }}Vous ne le feriez pas pour tout au monde, je l'espère ; vous
avez un visage où respire la douceur, et qui annonce que vous avez un
deux hommes qui se battaient : en vérité cela prouvait en votre faveur ;
faites encore de même. Votre maîtresse en veut à ma vie : mettez-vous
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(Les pirates emmènent Marina.)
{{Scène| II}}
Même lieu.
LÉONIN rentre.
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(Il sort.)
{{Scène| III}}
Mitylène. Appartement dans un mauvais lieu.
Entrent le MAITRE DE LA MAISON,
LE MAITRE DE LA MAISON. Boult !
{{personnage|Boult : }}Monsieur.
galants : nous avons perdu trop d'argent, l'autre foire, pour avoir manqué
de filles.
trois pauvres diablesses, elles ne peuvent que ce qu'elles peuvent ; et, à
force de servir, elles tombent en pourriture, ou peu s'en faut.
avoir de la conscience dans tous les états, sans quoi on ne prospère pas.
j'en ai élevé, je crois, jusqu'à onze...
{{personnage|Boult : }}Oui, jusqu'à onze ans, et pour les abaisser après ; mais j'irai
chercher au marché.
tombera en pièces au premier coup de vent ; elles sont trop cuites que cela
fait pitié.
pauvre Transylvanien est mort pour avoir couché avec la petite drôlesse.
{{personnage|Boult : }}Comme elle l'a vite expédié ; elle en a fait du rôti pour les
vers !-Mais je vais au marché.
(Boult sort.)
pour vivre tranquilles et abandonner le commerce.
honteux de gagner de l'argent quand on se fait vieux ?
profits avec le danger. Ainsi donc, si dans notre jeunesse nous avons pu
nous acquérir une jolie petite fortune, il ne serait pas mal de fermer notre
porte. D'ailleurs, nous sommes dans de tristes termes avec les dieux, et cela
devrait être une raison pour nous d'abandonner le commerce.
dans le nôtre.
nature de nos offenses est pire ; et notre profession n'est pas un métier ni
un état. Mais voici Boult.
(Les pirates entrent avec Boult et entraînent Marina.)
BOULT, à {{personnage|Marina : }}Ici. (
qu'elle est vierge ?
PREMIER PIRATE. Nous n'en doutons pas.
{{personnage|Boult : }}Maître, j'ai avancé un haut prix pour ce morceau ; voyez : si elle
vous convient, cela va bien. Sinon, j'ai perdu mes arrhes.
{{personnage|Boult : }}Elle a une jolie figure ; elle parle bien, a de belles robes : quelles
qualités voulez-vous de plus ?
{{personnage|Boult : }}Je n'ai pas pu l'avoir à moins de mille pièces d'or.
LE MAÎTRE. Très-bien. Suivez-moi, mes maîtres ; vous allez avoir votre
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qu'elle ne soit pas trop novice.
(Le maître sort avec les pirates.)
son teint, sa taille, son âge et l'attestation de sa virginité ; puis crie : Celui
qui en donnera le plus l'aura le premier.
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frapper et non parler. Pourquoi ces pirates n'ont-ils pas été assez barbares
pour me réunir à ma mère, en me précipitant sous les flots ?
{{personnage|Marina : }}Parce que je suis belle.
{{personnage|Marina : }}Je ne les accuse point.
vivre.
{{personnage|Marina : }}J'ai eu d'autant plus tort d'échapper à celles qui m'auraient
tuée !
{{personnage|Marina : }}Non.
sortes de messieurs ; vous ferez bonne chère ; vous apprendrez la
différence de tous les tempéraments. Quoi ! vous vous bouchez les
oreilles !
{{personnage|Marina : }}Êtes-vous une femme ?
{{personnage|Marina : }}Une femme honnête, ou pas une femme.
pense. Allons, vous êtes une petite folle ; il faut vous parler avec des
révérences.
{{personnage|Marina : }}Que les dieux me défendent !
vous consoleront, ils vous entretiendront, ils vous réveilleront. Voilà Boult
de retour. (Entre Boult.) Eh bien ! l'as-tu criée dans le marché ?
{{personnage|Boult : }}Je l'ai criée sans oublier un de ses cheveux ; j'ai fait son portrait
avec ma voix.
la jeunesse ?
{{personnage|Boult : }}Ma foi, ils m'ont écouté comme ils écouteraient le testament de
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bouche, qu'il a été se mettre au lit rien que pour avoir entendu faire son
portrait.
{{personnage|Boult : }}Cette nuit, cette nuit ! Mais, notre maîtresse, connaissez-vous le
chevalier français qui fait de si profondes révérences ?
{{personnage|Boult : }}Oui, il voulait faire un salut à la proclamation ; mais il a poussé
un soupir et juré qu'il viendrait demain.
fait ici que l'entretenir. Je sais qu'il viendra à l'ombre de la maison pour
étaler ses couronnes au soleil.
{{personnage|Boult : }}Si nous avions un voyageur de chaque nation, nous les logerions
tous avec une telle enseigne.
la fortune ; écoutez-moi. Il faut avoir l'air de faire à regret ce que vous
ferez avec plaisir, et de mépriser le profit quand vous gagnerez le plus.
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{{personnage|Boult : }}Emmenez-la, maîtresse, emmenez-la ; cette pudeur s'en ira avec
l'usage.
prête qu'avec honte à ce qu'il est de son devoir de faire.
{{personnage|Boult : }}Oui, les unes sont d'une façon et les autres d'une autre. Mais dites
donc, maîtresse, puisque j'ai procuré le morceau...
{{personnage|Boult : }}Peut-être bien.
forme de vos vêtements.
{{personnage|Boult : }}Oui, ma foi, il n'y a pas encore besoin de les changer.
nous avons ; tu n'y perdras rien. Quand la nature créa ce morceau, elle te
voulut du bien. Va donc dire quelle merveille c'est, et tu auras le prix de tes
avis.
{{personnage|Boult : }}Je vous garantis, maîtresse, que le tonnerre réveille moins les
anguilles
les libertins. Je vous en amènerai quelques-uns cette nuit.
{{personnage|Marina : }}Si le feu brûle, si les couteaux tuent, si les eaux sont profondes,
ma ceinture virginale ne sera pas dénouée. Diane, à mon secours !
(Ils sortent.)
{{Scène| IV}}
Tharse. Appartement dans le palais de Cléon.
Entre Cléon avec Dionysa.
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{{personnage|Dionysa : }}Croyez-vous que les petits oiseaux de Tharse vont voler ici et
tout découvrir à Périclès ? J'ai honte de penser à la noblesse de votre race
et à la timidité de votre
{{personnage|Cléon : }}Celui qui approuva jamais de telles actions, même sans y avoir
consenti, ne fut jamais d'un noble sang.
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regardait ; tous les yeux étaient fixés sur Marina, tandis que notre enfant
était négligée comme une pauvre fille qui ne valait pas la peine d'un
bonjour. Cela me perçait le
dénaturée, vous qui n'aimez pas votre enfant, moi je la crois bonne et
généreuse, et un sacrifice fait à notre fille unique.
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part dans la plus grande colère. Cléon et Dionysa se retirent.)-Voyez
comme la crédulité souffre d'une lugubre apparence ! cette colère
empruntée remplace les pleurs qu'on eût versés dans le bon vieux temps ; et Périclès, dévoré de chagrin, sanglotant et
baigné de larmes, quitte Tharse et s'embarque. Il jure de ne plus laver son
visage, ni couper ses cheveux ; il se revêt d'une haire et se confie à la mer.
Il brave une tempête qui brise à demi son vaisseau mortel,
connaître cette épitaphe, c'est celle de Marina faite par la perfide Dionysa :
(Gower lit l'inscription gravée sur le tombeau de Marina.)
Ligne 1 421 ⟶ 1 407 :
(Il sort.)
{{Scène| V}}
Mitylène. Une rue devant le mauvais lieu.
DEUX JEUNES GENS de Mitylène sortent de la maison.
en pareil lieu, quand elle n'y sera plus.
rêvé une telle chose ?
lieux. Irons-nous entendre les vestales ?
pour toujours du chemin du vice.
(Ils sortent.)
{{Scène| VI}}
Mitylène. Un appartement dans le mauvais lieu.
Entrent le MAITRE DE LA MAISON, sa FEMME et BOULT.
qu'elle n'eût jamais mis les pieds ici.
perdre toute une génération ; il nous faut la faire violer ou nous en défaire.
Quand le moment vient de rendre ses devoirs aux clients et de faire les
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{{personnage|Boult : }}Il faut que je m'en charge, ou elle dégarnira la maison de tous nos
cavaliers et fera des prêtres de tous nos amateurs de juron.
Voici le seigneur Lysimaque déguisé.
{{personnage|Boult : }}Nous aurions le maître et le valet, si la hargneuse petite voulait
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(Entre Lysimaque.)
{{personnage|Lysimaque : }}Comment donc ? Combien la douzaine de virginités ?
{{personnage|Boult : }}Je suis charmé de voir Votre Seigneurie en bonne santé.
{{personnage|Lysimaque : }}Allons, il est heureux pour vous que vos pratiques se
tiennent bien sur leurs jambes. Eh bien ! sac d'iniquités, avez-vous quelque
chose que l'on puisse manier à la barbe du chirurgien ?
jamais venu sa pareille à Mitylène.
{{personnage|Lysimaque : }}Si elle voulait faire l'oeuvre des ténèbres, voulez-vous
dire ?...
{{personnage|Lysimaque : }}Fort bien ; appelez, appelez.
{{personnage|Boult : }}Vous allez voir une rose. Ce serait une rose, en effet, si elle avait
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métier que cela ne donne à tant d'autres la bonne réputation d'être chastes.
(Entre Marina.)
assure ; n'est-elle pas jolie ?
{{personnage|Lysimaque : }}Ma foi, elle servirait après un long voyage sur mer. Fort
bien. Voilà pour vous. Laissez-nous.
{{personnage|Lysimaque : }}Allons, dites.
remarquer que c'est un homme honorable.
{{personnage|Marina : }}Je désire le trouver tel, pour pouvoir en faire cas.
qui je dois beaucoup.
{{personnage|Marina : }}S'il est gouverneur de la province, vous lui devez beaucoup en
effet ; mais en quoi cela le rend honorable, c'est ce que je ne sais pas.
aucune de vos grimaces virginales ? Il remplira d'or votre tablier.
{{personnage|Marina : }}S'il est généreux, je serai reconnaissante.
{{personnage|Lysimaque : }}Avez-vous fini ?
peine à la dresser à votre goût. Allons, laissons-la seule avec Sa
Seigneurie.
Ligne 1 548 ⟶ 1 534 :
ne voulons plus qu'on renvoie d'autres seigneurs ; venez, vous dis-je.
(La femme rentre.)
{{personnage|Boult : }}De pire en pire, notre maîtresse : elle a fait un sermon au
seigneur Lysimaque.
{{personnage|Boult : }}Elle fait cas de notre profession comme d'un fumier.
{{personnage|Boult : }}Le gouverneur en aurait agi avec elle comme un gouverneur ;
elle l'a renvoyé aussi froid qu'une boule de neige et disant ses prières.
de sa virginité, et rends le reste malléable.
{{personnage|Boult : }}Elle serait un terrain plus épineux qu'elle n'est, qu'elle serait
labourée je vous le promets.
{{personnage|Marina : }}Dieux, à mon secours !
le pied dans ma maison. Au diable ! elle est née pour être notre ruine. Ne
voulez-vous pas faire comme les femmes ? Malepeste ! madame la
Ligne 1 602 ⟶ 1 588 :
que je pourrai. Venez.
(Ils sortent.)
Fin du quatrième acte.
{{Acte|
Entre Gower.
{{personnage|Gower : }}Marina échappe donc au mauvais lieu, et tombe, dit notre
Ligne 1 623 ⟶ 1 609 :
écouter.
(Il sort.)
{{Acte|
{{Scène| I}}
pont avec un rideau. On y voit Périclès sur une couche. Une barque est
attachée au vaisseau tyrien.
Ligne 1 715 ⟶ 1 701 :
j'étais née d'ancêtres illustres qui marchaient de pair avec de grands rois ;
le temps a anéanti ma parenté et m'a livrée esclave au monde et à ses
infortunes. (
enflamme mes joues et qui me dit tout bas : Continue, jusqu'à ce qu'il
réponde.
Ligne 1 766 ⟶ 1 752 :
{{personnage|Périclès : }}Quoi ! la fille d'un roi ? et ton nom est Marina ?
{{personnage|Marina : }}Vous aviez promis de me croire ; mais, pour ne plus troubler la
paix de votre
{{personnage|Périclès : }}Êtes-vous de chair et de sang ? votre
pas une fée, une vaine image ? Parlez. Où naquîtes-vous ? et pourquoi
vous appela-t-on Marina ?
Ligne 1 776 ⟶ 1 762 :
pleurant.
{{personnage|Périclès : }}Oh ! arrête un moment ! voilà le rêve le plus étrange qui ait
jamais abusé le sommeil de la douleur. (
ensevelie. Où fûtes-vous élevée ? Je vous écoute jusqu'à ce que vous ayez
achevé votre récit.
Ligne 1 839 ⟶ 1 825 :
accompagnée.)
{{Scène| II}}
Même lieu.
Périclès dort sur le tillac ; DIANE lui apparaît dans un songe.
Ligne 1 851 ⟶ 1 837 :
{{personnage|Périclès : }}Céleste Diane, déesse au croissant d'argent, je
t'obéirai. Hélicanus ?
{{didascalie|(Entrent Hélicanus, Lysimaque et Marina.)}}
{{personnage|Hélicanus : }}Seigneur ?
{{personnage|Périclès}}{{didascalie|, à Hélicanus : }}Mon projet était d'aller à Tharse pour y punir
Cléon, ce prince inhospitalier, mais j'ai d'abord un autre voyage à faire.
Tournez vers Éphèse vos voiles enflées. Plus tard, je vous dirai pourquoi.
{{didascalie|(
donnerons-nous de l'or pour les provisions dont nous aurons besoin ?
{{personnage|Lysimaque : }}De tout mon cœur, seigneur ; et quand vous viendrez à
terre, j'ai une autre prière à vous faire.
{{personnage|Périclès : }}Vous obtiendrez même ma fille si vous la demandez, car vous
avez été généreux envers elle.
{{personnage|Lysimaque : }}Seigneur, appuyez-vous sur mon bras.
{{personnage|Périclès : }}Viens, ma chère Marina.
{{didascalie|(Ils sortent.)}}
{{didascalie|(On voit le temple de Diane à Éphèse. Entre Gower.)}}
{{personnage|Gower : }}Maintenant le sable de notre horloge est presque écoulé...
Encore un peu et c'est fini. Accordez-moi pour dernière complaisance (et
Ligne 1 876 ⟶ 1 871 :
temple d'Éphèse, notre roi et toute sa suite. C'est à vous que nous devons,
et nous en sommes reconnaissants, que Périclès soit arrivé sitôt.
{{didascalie|(Gower sort.)}}
{{Scène| III}}
{{didascalie|Le temple de Diane à Éphèse. Thaïsa est près de l'autel en qualité de
grande prêtresse. Une troupe de vierges. Cérimon et autres habitants d'Éphèse.}}
{{didascalie|Entrent Périclès et sa suite, Lysimaque, Hélicanus, Marina et
une dame.}}
{{personnage|Périclès : }}Salut, Diane ! pour obéir à tes justes commandements, je me
déclare ici le roi de Tyr, qui chassé par la peur, de ma patrie, épousai la
Ligne 1 892 ⟶ 1 890 :
venir à bord de mon navire, où en rappelant le passé elle se fit connaître
pour ma fille.
{{personnage|Thaisa : }}C'est sa voix, ce sont ces traits... vous êtes, vous êtes... O roi
Périclès !
{{didascalie|(Elle s'évanouit.)}}
{{personnage|Périclès : }}Que veut dire cette femme... ? Elle se meurt : au secours !
{{personnage|Cérimon : }}Noble seigneur, si vous avez dit la vérité aux pieds des autels
de Diane, voilà votre femme.
{{personnage|Périclès : }}Respectable vieillard, cela ne se peut ; je l'ai jetée de mes bras dans la mer.
{{personnage|Cérimon : }}Sur cette côte même.
{{personnage|Périclès : }}C'est une vérité.
{{personnage|Cérimon : }}Regardez cette dame. Elle n'est mourante que de joie. Un
matin d'orage, elle fut jetée sur ce rivage : j'ouvris le cercueil, j'y trouvai de
riches joyaux, je lui ai rendu la vie et l'ai placée dans le temple de Diane.
{{personnage|Périclès : }}Pouvons-nous voir ces joyaux ?
{{personnage|Cérimon : }}Illustre seigneur, ils seront apportés dans ma maison, où je
vous invite à venir... Voyez, Thaïsa revit.
{{personnage|Thaisa : }}Oh ! laissez-moi le regarder. S'il n'est pas mon époux, mon saint
ministère ne prêtera point à mes sens une oreille licencieuse. O seigneur,
êtes-vous Périclès ? Vous parlez comme lui ; vous lui ressemblez.
N'avez-vous pas cité une tempête, une naissance, une mort ?
{{personnage|Périclès : }}C'est la voix de Thaïsa.
{{personnage|Thaisa : }}Je suis cette Thaïsa, crue morte et submergée.
{{personnage|Périclès : }}Immortelle Diane !
{{personnage|Thaisa : }}Maintenant, je vous reconnais. Quand nous quittâmes
Pentapolis en pleurant, le roi mon père vous donna une bague semblable.
{{didascalie|(Elle lui montre une bague.)}}
{{personnage|Périclès : }}Oui, oui ; je n'en demande pas davantage. O dieux ! votre
bienfait actuel me fait oublier mes malheurs passés. Je ne me plaindrai pas,
si je meurs en touchant ses lèvres. Oh ! viens, et sois ensevelie une
seconde fois dans ces bras !
{{personnage|Marina : }}Mon cœur bondit pour s'élancer sur le sein de ma mère.
{{didascalie|(Elle se jette aux genoux de Thaïsa.)}}
{{personnage|Périclès : }}Regarde celle qui se jette à tes genoux ! C'est la chair de ta
chair,-Thaïsa, l'enfant que tu portais dans ton sein sur la mer, et que
j'appelai Marina ; car elle vint au monde sur le vaisseau.
{{personnage|Thaisa : }}Béni soit mon enfant !
{{personnage|Hélicanus : }}Salut, ô ma reine !
{{personnage|Thaisa : }}Je ne vous connais pas.
{{personnage|Périclès : }}Vous m'avez entendu dire que, lorsque je partis de Tyr, j'y
laissai un vieillard pour m'y remplacer. Pouvez-vous vous rappeler son
nom ? Je vous l'ai dit souvent.
{{personnage|Thaisa : }}C'est donc Hélicanus ?
{{personnage|Périclès : }}Nouvelle preuve. Embrasse-le, chère Thaïsa ; c'est lui. Il me
tarde maintenant de savoir comment vous fûtes trouvée et sauvée ; quel est
celui que je dois remercier, après les dieux, de ce grand miracle ?
{{personnage|Thaisa : }}Le seigneur Cérimon. C'est par lui que les dieux ont manifesté
leur puissance ; les dieux qui peuvent tout pour vous.
{{personnage|Périclès : }}Respectable vieillard, les dieux n'ont pas sur la terre de
ministre mortel plus semblable à un dieu que vous. Voulez-vous me dire
comment cette reine a été rendue à la santé ?
{{personnage|Cérimon : }}Je le ferai, seigneur. Je vous prie de venir d'abord chez moi,
où vous sera montré tout ce qu'on a trouvé avec votre épouse ; vous saurez
comment elle fut placée dans ce temple ; enfin, rien ne sera omis.
{{personnage|Périclès : }}Céleste Diane ! je te rends grâces de ta vision, et je t'offrirai
mes dons. Thaïsa, ce prince, le fiancé de votre fille, l'épousera à
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ma chère Marina ; et j'embellirai, pour le jour de tes noces, ce visage, que
le rasoir n'a pas touché depuis quatorze ans.
{{personnage|Thaisa : }}Cérimon a reçu des lettres qui lui annoncent la mort de mon père.
{{personnage|Périclès : }}Qu'il soit admis parmi les astres ! Cependant, ma reine, nous
célébrerons leur hyménée, et nous achèverons nos jours dans ce royaume.
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languissons d'entendre ce que nous ignorons encore. Seigneur,
guidez-nous.
{{didascalie|(Ils sortent.)}}
{{didascalie|(Entre Gower.)}}
{{personnage|Gower : }}Vous avez vu, dans Antiochus et sa fille, la récompense d'une
passion monstrueuse ; dans Périclès, son épouse et sa fille (malgré les
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meurtre qu'ils avaient voulu commettre. Accordez-nous toujours votre
patience, et goûtez de nouveaux plaisirs. Ici finit notre pièce.
{{didascalie|(Gower sort.)}}
FIN DU CINQUIÈME ET DERNIER ACTE.
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