« Le Rosier de Madame Husson (recueil, Ollendorff 1902)/Une soirée » : différence entre les versions
Contenu supprimé Contenu ajouté
m a déplacé Une Soirée vers Une Soirée (1887) |
Aucun résumé des modifications |
||
Ligne 16 :
Le maréchal des logis Varajou avait obtenu huit jours de permission pour les passer chez sa sœur, {{Mme}} Padoie. Varajou, qui tenait garnison à Rennes et y menait joyeuse vie, se trouvant à sec et mal avec sa famille, avait écrit à sa sœur
Le père Varajou, ancien horticulteur à Angers, retiré maintenant des affaires, avait fermé sa bourse à son garnement de fils et ne le voyait guère depuis deux ans. Sa fille avait épousé Padoie, ancien employé des finances, qui venait
Donc Varajou, en descendant du chemin de fer, se fit conduire à la maison de son beau-frère. Il le trouva dans son bureau, en train de discuter avec des paysans bretons des environs. Padoie se souleva sur sa chaise, tendit la main par-dessus sa table chargée de papiers, murmura : « Prenez un siège, je suis à vous dans un instant », se rassit et recommença sa discussion.
Les paysans ne comprenaient point ses explications, le receveur ne comprenait pas leurs raisonnements ; il parlait français, les autres parlaient breton, et le commis qui servait
Ce fut long, très long. Varajou considérait son beau-frère en songeant : « Quel crétin ! » Padoie devait avoir près de cinquante ans ; il était grand, maigre, osseux, lent, velu, avec des sourcils en arcade qui faisaient sur ses yeux deux voûtes de poils. Coiffé
Il était, lui, un de ces braillards tapageurs pour qui la vie
Padoie, ayant enfin éloigné ses paysans, demanda :
Ligne 34 :
— Pas mal, comme vous voyez. Et vous ?
— Assez bien, merci.
— Oh !
— Oh ! je sais, je sais ;
— Et Joséphine va bien ?
— Oui, oui, merci, vous la verrez tout à
— Où est-elle donc ?
— Elle fait quelques visites ; nous avons beaucoup de relations ici ;
— Je
Mais la porte
— Il y a longtemps que tu es ici ?
Ligne 60 :
Ils passèrent dans la pièce voisine, laissant Padoie à ses chiffres et à ses contribuables.
Dès
—
— Quoi donc ?
Ligne 68 :
— Il paraît que tu te conduis comme un polisson, que tu te grises, que tu fais des dettes.
Il eut
— Moi ! Jamais de la vie.
Ligne 74 :
— Oh ! ne nie pas, je le sais.
Il essaya encore de se défendre, mais elle lui ferma la bouche par une semonce si violente
Puis elle reprit :
— Nous dînons à six heures, tu es libre
Resté seul, il hésita entre dormir ou se promener. Il rregardait tour à tour la porte conduisant à sa chambre et celle conduisant à la rue. Il se décida pour la rue.
Donc il sortit et se mit à rôder,
Il gagna le port, si morne, revint par un boulevard solitaire et désolé, et rentra avant cinq heures. Alors il se jeta sur son lit pour sommeiller
La bonne le réveilla en frappant à sa porte.
—
Il descendit.
Ligne 94 :
Dans la salle humide, dont le papier se décollait près du sol, une soupière attendait sur une table ronde sans nappe, qui portait aussi trois assiettes mélancoliques.
M. et {{Mme}} Padoie entrèrent en même temps que Varajou. On
Après la soupe vint le bœuf, du bœuf trop cuit, fondu, graisseux, qui tombait en bouillie. Le sous-officier le mâchait avec lenteur, avec dégoût, avec fatigue, avec rage.
{{Mme}} Padoie disait à son mari :
— Tu vas ce soir chez M. le premier président ?
Ligne 104 :
— Oui, ma chère.
— Ne reste pas tard. Tu te fatigues toutes les fois que tu sors. Tu
Alors elle parla de la société de Vannes, de
Puis on servit des pommes de terre en purée, avec un plat de charcuterie, en
Puis du fromage.
Quand Varajou comprit
Et il se sauva, dès sept heures.
A peine dans la rue, il commença par se secouer comme un chien qui sort de
Et il se mit à la recherche
On entendait leur voix compter : « Dix-huit, — dix-neuf. — Pas de chance. — Oh ! joli coup ! bien joué !— Onze. — Il fallait prendre par la rouge. — Vingt. — Bille en tête, bille en tête. — Douze. Hein !
Varajou commanda : « Une demi-tasse et un carafon de fine, de la meilleure. »
Puis il
Il était accoutumé à passer ses soirs de liberté avec ses camarades, dans le tapage et la fumée des pipes. Ce silence, ce calme
Il se dit : « Cristi, me voilà remonté. Il faut que je fasse la fête. » Et
— Hé,
— Voilà,
— Dites,
— Je
— Comment ici ?
— Mais je
— Va donc, moule, et les demoiselles,
— Les demoiselles ! ah ! ah !
— Oui, les demoiselles,
— Des demoiselles ?
Ligne 156 :
Le garçon se rapprocha, baissa la voix :
— Vous demandez
— Mais oui, parbleu !
— Vous prenez la deuxième rue à gauche et puis la première à droite. —
— Merci, ma vieille.
— Merci,
Et Varajou sortit en répétant : « Deuxième à gauche, première à droite, 15. » Mais au bout de quelques secondes, il pensa : « Deuxième à gauche, — oui, — Mais en sortant du café, fallait-il prendre à droite ou à gauche ? Bah ? tant pis, nous verrons bien. »
Et il marcha, tourna dans la seconde rue à gauche, puis dans la première à droite, et chercha le numéro 15.
—
Il entra donc et, comme personne ne venait, il appela :
Ligne 186 :
— Oui monsieur.
— Je
— Oui, monsieur.
Ligne 194 :
— Oui, monsieur.
Il monta, ouvrit une porte et aperçut, dans une pièce bien éclairée par deux lampes, un lustre et deux candélabres à bougies, quatre dames décolletées qui semblaient attendre
Trois
— Bonjour, mesdames.
La vieille se retourna, parut surprise, mais
— Bonjour, monsieur.
Mais, voyant
— Alors, ça va bien ?
Ligne 214 :
Puis il ne trouva plus rien, et tout le monde se tut.
Cependant il eut honte, à la fin, de sa timidité, et riant
— Eh bien, on ne rigole donc pas. Je paye une bouteille de vin
Il
Alors Varajou poussa un hurlement
— Ah ! ah ! ah ! farceur !
Et songeant à tous les bénéfices de cette situation inespérée, à
Les trois jeunes dames, se levant
Et deux messieurs apparurent, décorés, tous deux en habit. Padoie se précipita vers eux :
— Oh ! monsieur le président
Varajou
— Où donc sommes-nous ici ? demanda-t-il.
Mais Padoie, saisi soudain
— Où
</div>
|