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fertile. » Des faits historiques que nous venons de retracer sommairement, on peut conclure que Timbuktu a décliné en puissance depuis le XVIe et le XVIIe siècle. Kano comme marché, Sokoto comme centre politique, ont en partie hérité de son ancienne splendeur. Toutefois, telle qu’elle demeure, elle est encore une des grandes cités du Soudan ; on sait que le gouvernement français a proposé une récompense au voyageur qui y entrera en allant de l’Algérie au Sénégal ou réciproquement, et il serait heureux en effet qu’on pût la relier un jour aux deux foyers de commerce et de civilisation que la France entretient en Afrique.

M. Barth avait reçu un accueil assez favorable à Timbuktu, dont les habitans l’avaient pris pour un envoyé du sultan de Stamboul ; cependant il ne tarda pas à se trouver dans une situation difficile et précaire. Ce n’était pas que le principal cheik de la ville, le chef fellani, qui dès l’abord l’avait protégé, eût changé de sentimens à son égard : au contraire, ce musulman éclairé avait appris la véritable qualité de l’Européen et le but scientifique de sa mission sans cesser d’être animé de sentimens bienveillans à son égard ; mais l’anarchie régnait entre les divers chefs de la ville, et la présence du chrétien excitait la défiance d’une population fanatique. Pour comble d’ennui, la guerre civile désolait les environs, et mettait obstacle au départ. Dans plusieurs lettres datées de 1854, M. Barth faisait savoir à ses amis d’Europe qu’obligé de vivre dans une réclusion continuelle, sans cesse inquiété par une population hostile, accablé des fatigues de son immense voyage, il avait été pris de la fièvre, et que sa santé, un instant rétablie, menaçait de s’altérer profondément. Enfin, après bien des délais et des obstacles, il trouva un moment favorable à son départ, et obtint d’en profiter. Après sept mois de séjour à Timbuktu, il reprit la direction du Bornu, long et pénible, mais unique chemin qui pût lui rouvrir l’accès de l’Europe.

Pendant que Barth redescendait lentement et avec mille fatigues le cours du grand fleuve, un de ses compatriotes, un jeune homme de vingt ans, parcourait à son tour les régions qui entourent le Tsad, et, cherchant les traces de son compatriote, s’avançait à sa rencontre du côté du Niger. Vogel, Allemand comme Barth et comme Overweg, s’était proposé à l’amirauté anglaise pour prendre en Afrique la place de Richardson, quand on avait appris que celui-ci était tombé sur le champ de bataille de la science. Il était docteur en médecine, botaniste et astronome. Il fut accepté, et le 2 février 1853 il quitta Southampton, se dirigeant sur Tripoli, où il fut rejoint par un personnage du Bornu, qui retournait à Kukawa. De Tripoli à Murzuk et au Tsad, il suivit l’itinéraire précédemment tracé par le voyageur Denham, rectifiant les positions, relevant les hauteurs, recueillant des observations sur la constitution géologique du sol. Parvenu à Kukawa, il y fut reçu avec la même bienveillance que ses devanciers. Ne pouvant rejoindre Barth, qui ignorait qu’on lui envoyât un nouveau compagnon et qui se trouvait déjà engagé dans le long chemin de Sokoto à Timbuktu, Vogel résolut de compléter les observations recueillies par ses prédécesseurs sur les régions qui avoisinent le Tsad, et, à peine remis d’une fièvre violente qui l’avait saisi à son arrivée, il se joignit à une expédition que le cheik du Bornu se préparait à diriger dans le pays des malheureux Musgus. Dans cette expédition,