« Qu’est-ce que le bolchévisme ? » : différence entre les versions

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pensent à rien et s’adaptent simplement aux nouvelles conditions d’existence, ne tenant compte que de leurs intérêts
quotidiens. Que se passera-t-il demain ? Pour ces derniers,
la question les laisse indifférents. Ils ne croient puspas en ce
lendemain, de même qu’ils ne se rappellent pas ce qu’il y
avait hier. Les gens de cette espèce forment en Russie,
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sur l’ordre du Gouvernement, dans tout le pays, la police
avait été supprimée sans qu’on l’ait remplacée par quoi que
ce soit d’autre. AÀ Moscou on plaisantait : « Nous vivons
maintenant sur parole », disait-on. Et, en effet, on vécut
assez longtemps « sur parole », et on a relativement bien
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plus on moins rigoureuse, préférant agir par persuasion.
Il faut admirer que, malgré une situation aussi exceptionnelle, l’existence ait été après tout très supportable en
Russie jusqu’au coup d’Etatd’État bolchéviste. On pouvait voyager en chemin de fer et sur les routes, sans confort il est
vrai, mais aussi sans risque, — tout au moins sans grand
risque d’être dépouillé et tué. Même au fond des campagnes, on ne pillait pas les propriétaires. Les paysans s’emparaient de la terre, mais quant aux propriétaires eux-mêmes, à leurs maisons, à leur fortune personnelle, ils n’y
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ce point de vue, il faut dire que le Gouvernement Provisoire essayait bien d’atteindre un but révolutionnaire, mais
en créant en Russie une nature d’hommes de vérité, quelque chose du genre de ce qu’avaient rêvé et dont avaient
parlé le comte Tolstoï, le prince KropolkineKropotkine, et qui n’était
apparemment pas étranger à nos Slavophiles. Je sais évidemment fort bien que ni le prince Lwoff, ni Milioukoff,
ni Kerenski n’étaient assez naïfs pour tendre consciemment à la réalisation en Russie de l’idéal anarchiste ; mais,
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assumaient, les Bolchéviks ont décidé de rester fidèles
entièrement et complètement aux errements de la vieille
bureaucratie russe. Dès ce moment-là., pour quiconque était
tant soit peu clairvoyant, apparurent du coup l’essence
même du bolchévisme et son avenir.
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gouvernemental russe qui était le vrai.
 
OuiQui veut comprendre ce qui se passe à l’heure actuelle
en Russie doit examiner avec une attention particulière
les premiers phénomènes de création gouvernementale des
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Russie est liée au monde économiquement, politiquement
et moralement. Le bolchévisme ne crée pas, il vit de ce
qui a été avant lui. Pour sa politique intérieure, il a, comme je l’ai déjà dit, emprunté ses idées toutes faites à Araktcheieff et à Nicolas Ier. Quant à sa politique extérieure, il ne s’est pas montré plus original, à commencer par le traité
s’est pas montré plus original, à commencer par le traité
de Brest-Litovsk qu’il a conclu et à finir par ses tentatives
d’élaborer un accord avec l’Europe dont on parle tant maintenant. En tout ce qu’il a fait dans ce sens nous reconnaissons les procédés de la politique asiatique d’Abdul-Hamid,
que nous avons vus si souvent à l’œuvre. Les Bolchéviks ne
comptent pas sur leurs propres forces, pas plus qu’Abdul-Hamid ne comptait sur les siennes. La Russie martyrisée,
impuissante, rongée de querelles intestines ne ; peut rien réclamer pour elle et ne peut rien donner non plus, il ne
reste qu’une chose : chercher à jeter la discorde entre les
EtatsÉtats de l’Europe occidentale, entamer simultanément des
pourparlers avec l’Angleterre, la France, l’Italie et l’Allemagne, escomptant la trop grande diversité et même l’opposition de leurs intérêts, espérant qu’en fin de compte, si
l’on réussit à les heurter les uns contre les autres, on pourra
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trait le plus caractéristique, à mon sens, de ce qu’il y a de
plus essentiel dans le bolchévisme. Le bolchévisme est, je
le répète, réactionnaire ; il est impuissanteimpuissant à rien créer ; il
prend ce qu’il trouve sous sa main, ce que d’autres ont fait
sans lui. Bref, les Bolchéviks sont des parasites, dans leur
essence même. Bien entendu, ils ne s’en rendent pas compte
et ils ne le comprennent pas. Et même, s’ils le comprenaient,.
il est peu probable qu’ils consentiraient, à l’avouer ouvertement. Mais dans tous les domaines où ils ont exercé leur activité est apparue leur particularité essentielle. Ils formulent eux-mêmes la tâche qu’ils ont à accomplir en disant que,
d’abord, il faut tout détruire et ne commenceracommencer à créer qu’après
eux-mêmes la tâche qu’ils ont à accomplir en- disant que,
d’abord, il faut tout détruire et ne commencera créer qu’après
avoir détruit. Si les Bolchéviks idéologues ''aux'' ''yeux'' ''bleu''
''clair'' étaient capables de peser un moment leurs paroles, ils
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que le socialisme était une forme supérieure d’organisation
économique de la société, découlant avec la même nécessité
de l’organisation bourgeoise, que celle-ci a succédé à l’organisation féodale ; et le socialisme non seulement ne supposait
pas la destruction de l’organisation économique bourgeoise,
mais il comptait, au contraire, la conserver complètement et
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vivre, aux dépens de ce qui a été fait auparavant. Et en effet
les Bolchéviks ne détruisent rien, somme toute. Ils vivent
simplement avec ce qu’ils ont trouvé prêt dans ’l’anciennel’ancienne
organisation. Comme quelqu’un reprochait à Lénine que
les Bolchéviks se livraient au pillage, il répondit : « Oui, nous
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peine un seul qui serve à quelque chose. Tout le monde,
hommes, femmes, jeunes et vieux, est fonctionnaire. Les
Bolchéviks sont convaincus que quiconque n’est pas fonctionnaire est dangereux pour l’Etatl’État et persécute de toutes
façons ceux qui ne sont pas à son service : on les accable
de contributions, on les prive de cartes d’alimentation, on
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Les fabricants, les négociants et leurs collaborateurs principaux ont péri pour la plupart, ou se sont enfuis. Mais la
bourgeoisie est plus forte, en Russie, plus nombreuse, ''de''
''beaucoup'' ''plus'' ''nombreuse'' qu’elle n’était auparavant. Actuellement presque tous les paysans en Russie sont clésdes bourgeois. Ils gardent enfouis dans la terre des centaines de mille et même des millions de roubles émis sous le Tsar,
mille et même des millions de roubles émis sous le Tsar,
sous Kerenski, sous les Soviets, de roubles ukrainiens et autres valeurs, et nous n’arrivons pas à leur arracher leurs
richesses. Avec cela, la nouvelle bourgeoisie n’a plus aucune
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La Russie a toujours été le pays de l’arbitraire par excellence. Les ministres tsaristes du genre de Tcheglovitoff ou
de Maklakoff n’ont jamais compris quelle grande force
créatrice constituait dans un EtatÉtat une claire conception du
droit. AÀ tout moment ils insultaient le peuple et de la façon
la plus abominable, dans sa conception du droit et de la
morale. Il n’y avait pas en Russie de justice, non seulement de justice clémente, mais simplement juste. Le code
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et les autorités qui lui étaient imposées par une force extérieure. Mais, au fond de son âme, il gardait la foi en la vérité,
cette foi qui a trouvé son expression dans les meilleures
œuvres de la littérature russe. Il semblait même que !ele peuple eût foi aussi au Tsar et qu’il le considérât comme une
victime des mauvais conseillers qui l’entouraient. Mais, la
Révolution éclatant, il est devenu du coup clair que le peuple ne croyait déjà plus au Tsar. Si bizarre que ce soit, il ne
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tout de même, on supposait que le pouvoir appartiendrait à
celui qui saurait gagner les sympathies de la majorité de la
population, c’était unsune émulation d’un ordre spécial qui
commençait à naître entre les partis : lequel des deux réussirait le plus vite à faire le plus de promesses au peuple.
Et des promesses, on en faisait sans fin. Tantôt on autorisait le peuple à s’emparer des terres, tantôt des biens mobiliers, etc., etc. « Tout est à vous ! Prenez ! » — tel était le
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exactement le contraire de ce qu’ils avaient voulu faire.
Leur tâche consistait à introduire dans l’esprit du peuple
l’idée d’une vérité sociale supérieure, et ils ont abouti ùà
chasser de l’âme populaire toute notion de vérité.
 
Chez nous, les hommes politiques ont toujours été de
piètres psychologues. Personne ne soupçonnait et personne
ne soupçonne jusqu’à présent l’énorme importance qu’a !ala
la conception du droit du peuple dans l’œuvre de l’organisation sociale. Je, sais que les Bolchéviks parlent beaucoup
de psychologie de classes. Mais dans leurs bouches ce ne sont
que des mots qui n’ont pour eux aucune importance. En
Russie seules des réformes colossales étaient possibles. Il
faut noter que déjà, pendant les premières années de ’ala
guerre, il s’était produit dans notre patrie un déplacement
colossal diede la ligne de démarcation qui séparait la partie la
plus pauvre de la population des classes possédantes. En
1915, et surtout en 1916, il m’est arrivé de voyager à travers la Russie et de vivre longtemps à la campagne et j’ai
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venue l’interdiction de boire de l’alcool. Pour l’alcool, les
moujiks apportaient au trésor un milliard de roubles par
an ; de plus l’ivrognerie portaiportait à la campagne un double
préjudice, car le paysan russe, lorsqu’il voulais avoir de la
vodka et qu’il n’avait pas d’argent, donnait tout ce qu’on
voulait à vil prix. Et voilà que les nombreux milliards du paysan étaient restés dans la poche du paysan et qu’en l’espace de très peu de temps il s’était affranchi de cet tecette effroyable dépendance du ''koulak'' (mercanti de village) sous
laquelle il tombait auparavant par manque d’argent.
 
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— Qu’est-il donc arrivé, ''barine'' ? me demandait cet
homme. IIIl n’y a plus moyen de s’entendre avec le moujik !
Si tu as besoin de quelque chose, il te dit tout de suite :
Donne-moi cinq roubles, donne-m’en dix, c’est effrayant !
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vous alliez, partout on dissertait sur la haute mission de la
Russie. Mais quant à l’organisation de la Russie, personne
ne s’en occupait et ne voulait y songer. Toute allusion concernant cette organisation provoquait aussitôt une explosion d’indignation. Ne croyez pas que j’aie en vue l’ ''intelliguentsia'' moyenne ou la jeunesse intellectuelle. Il m’est
arrivé de me rencontrer avec les représentants les plus
éminents de la Russie pensante, et je ne puis m’en rappeler un seul qui, une fois au moins, m’ait entretenu des moyens à employer pour barrer la route aux événements tragiques dont, dès ce moment-là, on pouvait clairement apercevoir l’approche menaçante. Chez nous, comme partout
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« Je ne veux pas, je ne veux pour rien au monde du
royaume des cieux sur la terre ! » s’écriait, fou de ''rage'', le
représentant de la pensée chrétienne russe.
 
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Tout ce que je raconte ici ne contient pas un iota d’exagération. La haine de l’esprit petit-bourgeois, ou plutôt de
ce qu’il est convenu en Russie d’appeler de ce nom, est le mot d’ordre de toute la littérature russe onou, si l’on préfère,
de toute la Russie pensante. C’est Hertzen qui, le premier,
a introduit ce terme, Hertzen, le célèbre révolutionnaire
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venait à la recherche de son idéal, de ce que, parlant la langue de saint Augustin, on peut appeler ''amor'' ''dei'' ''usque'' ''ad''
''contemptum'' ''sui'', il ne trouva que l’esprit petit-bourgeois,
''amor'' ''sui'' ''usque'' ''ad'' ''contemptum'' ''dei''. Dans les pays européens on avait chassé les tsars, mais dans la tête des Européens, les tsars continuaient à habiter. On songeait non pas au ciel, mais à la terre. On s’organisait, pour aujourd’hui et pour demain. On luttait contre la pauvreté, le
non pas au ciel, mais à la terre. On s’organisait, pour aujourd’hui et pour demain. On luttait contre la pauvreté, le
froid, la faim, les épidémies. On construisait des fabriques, des usines, des chemins de fer. On établissait des
parlements, des tribunaux. Il semblait parfois que les gens
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que les appréhensions d’Hertzen doivent être traitées pour
le moins d’exagération : l’Europe était loin du royaume
, des cieux sur la terre, dans le passé, et maintenant encore
elle n’en est pas bien près. Je dirai, pour ma part, que ces
appréhensions des Russes étaient tout à fait injustifiées.
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aient disserté beaucoup sur ce sujet, tant à la Douma que
dans leurs publications clandestines. Mais toutes ces dissertations sont oubliées comme si elles n’avaient jamais existé.
AÀ l’heure actuelle, il n’y a en Russie que des journaux gouvernementaux et des orateurs gouvernementaux. Seul peut
écrire et parler qui glorifie l’activité des classes dirigeantes.
C’est une erreur de croire que les paysans et les ouvriers
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place en Russie, et cela bien moins encore, infiniment
moins encore que sous le régime des tsars. Sous les tsars
on s’exprimait dans ce que nous appelions la langue d’Esoped’Ésope, mais l’on pouvait tout de même parler sans risquer
la liberté et même la vie. Quant à se taire, cela n’était
défendu à personne. Maintenant il est défendu même de
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de notre maison me remit une grande enveloppe grise avec
la suscription : « ''Au'' ''camarade'' ''Chestoff''. » Je comprends
que c’est une convocation à une réunion. Je décachetédécachète.
C’est bien cela, on me convoque à une réunion où l’on
doit discuter la question : ''La'' ''dictature'' ''du'' ''prolétariat'' ''dans''
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dictature sur le prolétariat. On ne demande même pas aux
prolétaires ce qu’ils veulent. On leur ordonne simplement
de se servir de je ne sais quelle ''technicité'' qu’on prétend pouvoir arracher aux artistes. Mais s’il est vrai que le prolétariat se soit émancipé, il ne vous obéira pas et ne courra pas du tout après la ''technicité''. Il voudra, aussi bien que
pas du tout après la ''technicité''. Il voudra, aussi bien que
vous-mêmes, jouir de l’inappréciable trésor des grands
créateurs dans le domaine de l’art, de la science, de la
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peut-être même aussi le Ve siècle de la culture hellénique ;
mais il y a eu dans l’histoire d’autres ouragans qui ont
balayé et enterré sous le sable ce même Ve siècle et même.
d’une façon plus complète. Et puis après, sont venus des
hommes qui ont fouillé ce sable et y ont cherché les moindres traces de l’art hellénique conservées sous les ruines. »
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l’Art n’avaient pas besoin de telles paroles. Mais, à cette
réunion aussi bien qu’à d’autres analogues, de même qu’à
la lecture, des publications soviétistes, il s’est confirmé
pour moi, avec une incontestable évidence, ce qui m’était
d’ailleurs certain depuis le 7 novembre 1917, c’est-à-dire
depuis le moment du coup d’Etatd’État bolchéviste : à savoir ''que''
''le'' ''bolchévisme'' ''est'' ''un'' ''mouvement'' ''profondément'' ''réactionnaire''. Les Bolchéviks, comme nos vieux ''Krépostniki'' (partisans du servage), font le rêve de s’emparer de la ''technique'' européenne, mais libérée de tout contenu d’idées. Le
contenu d’idées, nos ''tchninovniks'' tsaristes et bolchévistes
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et leur talent, — voilà le rêve ! »
 
Il est difficile de concevoir quelque chose de plus absurde. Mais c’est de cellecette façon que les choses se sont
passées dans la Russie des XVIIIe et XIXe siècles, et c’est de
cette façon que les choses se passent maintenant. Des gens sans instruction, incapables et obtus, ont amassé des nuages sur le gouvernement bolchéviste et transforment déjà
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On raconte, il est vrai, que Lénine, lui aussi, aurait publiquement déclaré que les Bolchéviks avaient fait une ''révolution'' ''de'' ''salauds''. Mais est-ce exact ? A-t-il vraiment
prononcé de telles paroles ? Je n’ai pu le vérifier. En tous
cas ''se'' ''non'' ''è'' ''vero'' ''è'' ''ben'' ''trovato'' : toute l’activiiél’activité de la bureaucratie bolchéviste porte l’empreinte de la vulgarité
servile.
 
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restent des phrases et la réalité reste la réalité. Ce qu’il
fallait avant tout à l’ouvrier russe et au paysan russe, et
même à l’intellectuel russe, c’était d’obtenir le litretitre de
citoyen. Il fallait lui inspirer la conscience qu’il n’était pas
un esclave, bafoué par quiconque en a le pouvoir, mais
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rapidement que possible pour ne pas laisser passer le moment. Les grands mots sur la solidarité, sur les problèmes
internationaux, dont les Bolchéviks remplissaient abondamment leurs publications, n’ont jamais été entendus par
personne. Le peuple s’est convaincu ''qu’aujourd’hui'' ''comme'' ''hier'', ce qui existe ce n’est pas le droit, mais la force. Possédera celui qui aura pris, et l’on prenait sans la moindre gêne. Le pillage était suivi d’assassinats et de supplices.
Peu de gens songeaient au travail. AÀ quoi bon se livrer à
gêne. Le pillage était suivi d’assassinats et de supplices.
Peu de gens songeaient au travail. A quoi bon se livrer à
un travail pénible, quand il est si facile de s’enrichir sans
peine ? Dans l’atmosphère de férocité réciproque et de guerre
civile s’éteignaient les dernières étincelles de la foi en la
possibilité de réaliser « la vérité sur la terre »., cette vérité
fût-elle imaginaire. Dans les petites villes et dans les campagnes, le pouvoir tombait entre les mains de criminels et
de misérables, qui masquaient leurs appétits de loups sous
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bourgeois.
 
AÀ Pétrograd et à Moscou, où, à côté de bandits et de
filous, il y avait cependant des gens qui croyaient sincèrement à la toute-puissance du verbe, on se livrait à d’interminables palabres sur le paradis futur. Ce paradis reculait
évidemment de plus en plus dans les nimbes de l’avenir. Ce
qu’il y a à présent, c’est la faim, c’est le froid, ce sont les
épidémies, c’est enfin la haine réciproque toujours croissante. Et déjà plus de classe possédante ou non possédante.
L’ouvrier affamé hait également et le ''bourgeois'' et. son propre camarade, qui a .su ou qui a eu la chance de se procurer un morceau de pain de plus ou un peu de bois pour sa
famille qui a faim et froid.
 
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pendant deux mois presque tous les jours dans la presse
locale ; cet homme n’écrivait pas, il vociférait. Et il vociférait
toujours la même chose : « La campagne ne donne pas de.
pain, elle ne donne pas non plus de bois ni de grains...
Elle ne donne rien ! Ouvriers, si vous ne voulez pas mourir de faim et de froid, armez-vous et allez faire la guerre
à la campagne, autrement vous n’obtiendrez rien ! »
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dont jouissait l’Europe avant la guerre, et qu’il ne fût écrit
dans le sort des fils de la Russie de contempler le royaume
des cieux sur la terre, les procédés bolchévistes ont montré, dis -je, que ceux-là s’inquiétaient et se tourmentaient
vraiment pour rien. D’après les renseignements qui nous
parviennent aujourd’hui de Russie, on y a établi le travail
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y avoir, d’un côté, des classes privilégiées qui ne travaillent
pas et forcent les autres par des mesures terribles, impitoyables à travailler au-dessus de leurs forces, et, de l’autre,
des hommes sans privilèges, sans droits, qui, sans épargner leur santé et même leur vie, doivent fournir leur travail au profilprofit du ''tout''.
 
Voilà ce qu’a apporté le bolchévisme qui a tant promis
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hommes pas très intelligents qui se sont montrés bons prophètes. Et maintenant, lorsqu’on cherche à entrevoir l’avenir, on se demande : Qui croire, les intelligents ou les non
intelligents ? Les hommes intelligents partent du point de
vue qui leur paraitparaît l’évidence même, que les hommes et
les peuples sont guidés dans leurs actes par leurs intérêts
vitaux et sentent instinctivement ce qui leur est utile et ce
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le comprenait aussi. Sous son règne, à côté de l’Alliance
franco-russe, il y avait le ''Dreikaiser'' ''Bund'' (1’Union des
Trois Empereurs). Mais en 1914, ’esles monarques européens
se sont tout à coup jetés les uns sur les autres à la gloire de
la démocratie de l’Europe occidentale qu’ils exécraient le
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''son'' ''sort'', s’est trouvé justifié. Les hommes et les peuples
font tout pour précipiter leur perte, — si tel est leur destin.
 
Maintenant il est clair, je crois, pour tous, et pour les
Allemands et pour les non-Allemands, que si ''intérêts'' il y
avait-, ces intérêts exigeaient tout ce qu’on voulait, sauf
la guerre, que la guerre était contraire à tous les intérêts de
tous les hommes. En effet, si les Allemands avaient dépensé
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service des tâches constructives et non destructives, ils auraient pu transformer leur Vaterland en un paradis terrestre. On peut dire la même chose des autres peuples. La
guerre a coûté des sommes fantastiques : plus d’un billion
de francs. Et je ne parieparle même pas de tous ceux qui ont
péri, des villes détruites, etc… Je le répète, si les cercles
dirigeants qui tenaient dans leurs mains le sort de leurs
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poursuit sans cesse depuis le premier jour de la guerre. Je
me trouvais à ce moment-là à Berlin, rentrant en Russie de Suisse. Je fus forcé de faire un détour par la Scandinavie
jusqu’à Tornéo, puis parlapar la Finlande jusqu’à Pétrograd.
En Allemagne, je lene lisais évidemment que les journaux
allemands, et même jusqu’au moment de mon arrivée à Pétrograd j’étais en réalité obligé de me nourrir de journaux
allemands, car je ne connais aucune langue Scandinave. Je