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une succession de cuvettes plus ou moins évasées, se dégorgeant les unes dans les autres, en descendant de la vallée de la Durance à la mer. Tarascon était enveloppé à l’est par de vastes marécages, Arles par un véritable lac ; les collines de Cordes et de Montmajour, qu’environnent aujourd’hui des terres si fécondes, n’étaient alors que des îles. Le corps des vidanges d’Arles, dès long-temps organisé pour défendre le territoire contre l’envahissement des eaux, luttait péniblement contre cet état de choses. On se préoccupa sérieusement au XVIe siècle de le faire cesser c’était en Provence un temps de grandes entreprises. Des tentatives infructueuses furent faites en 1540, en 1548, en 1600 ; enfin, en 1619, on mit la main à l’œuvre, et le corps des vidanges se chargea, pour une somme de 28,000 livres, de conduire, au travers du territoire d’Arles, les eaux de la viguerie de Tarascon jusqu’à l’étang de Galéjon, qui communique avec la mer. C’est là l’origine du canal du Vigueyrat, qui devait en même temps servir d’émissaire principal aux eaux des marais d’Arles. Soit insuffisance, soit mauvais emploi des ressources, le corps des vidanges n’avait guère réussi qu’à s’embarrasser des eaux dont il délivrait ses voisins. L’air continuait à être infecté par les mauvaises vapeurs qui s’élevaient des eaux croupissantes, le terrain restait sans aucune sorte de profit ni rente [1], lorsqu’en 16421e Hollandais Van Ens vint, recommandé par la confiance du cardinal de Richelieu et par ses succès dans d’autres desséchemens faits en France. Il offrit de dessécher seul les marais, d’entretenir les travaux gratuitement pendant douze années après leur achèvement, et moyennant une légère redevance pendant les dix années suivantes, à la condition de recevoir en dédommagement les deux tiers de la surface desséchée à prendre dans les parties les plus basses. Ces conditions, si claires, si loyales et si sûres, devraient, encore aujourd’hui, servir de base aux traités du même genre. L’entreprise ne fut pas aussi avantageuse pour Van Ens qu’il l’avait espéré ; il dépensa près de 1,200,000 livres, somme énorme pour ce temps, et eut pour sa part environ 1,600 hectares de marais. Il en avait donc conquis 2,400, sans compter l’amélioration d’une étendue beaucoup plus considérable et l’assainissement de la contrée. Il fut le véritable auteur du canal du Vigueyrat, qui assèche encore aujourd’hui la plaine de Tarascon, et alimente depuis quinze ans, avec les eaux dont il la délivre, le bief de partage du canal de navigation d’Arles à Bouc.

Ce nouveau canal a changé tout le régime hydraulique de la plaine d’Arles : il a d’abord complètement isolé du bassin du Vigueyrat et des Vidanges 10,700 hectares compris entre le Rhône et lui ; en ouvrant son lit aux eaux du Vigueyrat, il a dégorgé cet émissaire ; enfin, en vertu

  1. Lettres-patentes de 1642.