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l’Ohio et le Missouri. Les Américains ne changeront pas leurs habitudes pour trouver grace devant notre tarif ; la nature des choses le leur défend. A nous donc de conformer notre tarif à leur pratique obligée et de proportionner exactement le droit sur la farine au droit sur le blé, sinon nous encourons le risque de nous priver, de gaieté de cœur, d’une ressource. Ne poussons pas le respect pour les aphorismes de la douane jusqu’à courir la chance d’affamer les hommes.

Il est impossible de ne pas exprimer le regret que la loi provisoire, en vertu de laquelle toute immunité possible est accordée aux grains et aux farines jusqu’à la récolte prochaine, n’ait pas fait partager les mêmes faveurs aux viandes salées. L’Amérique, si elle y était sollicitée par la modération de nos douanes, nous en fournirait à de très favorables conditions. C’est une nourriture que l’hygiène approuve lorsque les populations ne s’y livrent pas exclusivement, et ont la faculté de la mêler de légumes frais. Les Anglais de toutes les classes en consomment beaucoup plus que nous, et on ne voit pas que leur race s’en abâtardisse. Chez nous, où, relativement au taux ordinaire des salaires, la viande est à un prix excessif, et où cependant il serait essentiel d’introduire dans l’alimentation des classes ouvrières une forte proportion de denrées animales, les salaisons de l’Amérique présentent une ressource dont nous serions coupables de ne pas profiter. Dans notre manie de taxer toute chose à l’entrée, et d’établir de préférence des taxes prohibitives, nous avons mis sur les salaisons de porc, qui seraient les plus recherchées de toutes, un droit de quatre sous par livre. Aussi le peu qui nous en arrive est-il réexporté [1].

L’exportation des grains devrait être libre à plus forte raison. Notre législation semble l’autoriser, mais en la soumettant à un droit mobile qui l’interdit souvent. C’est préjudiciable à l’agriculture et de fait sans utilité pour les populations. Au premier abord, il semble qu’en empêchant une partie des blés de la Basse-Bretagne, par exemple, de se rendre en Angleterre, ou en Belgique, ou en Hollande, vous serviez les intérêts du consommateur français : ce n’est qu’un faux-semblant. Ce serait avantageux, en effet, à nos consommateurs, si toute la population française était concentrée dans la Basse-Bretagne, et encore alors, dans les mauvaises années surtout, ce blé resterait-il de lui-même, sans que la loi eût à le lui enjoindre ; mais le consommateur marseillais ou lyonnais, dont vous prétendez faire le bien en retenant le blé de la

  1. D’après le Tableau du commerce, en 1844 la France a reçu de l’étranger 412,918 kilogrammes de salaison de porc, dont 264,083 de l’Amérique du Nord. 118,462 kilogrammes seulement, estimés officiellement à 82,924 fr., sont entrés dans la consommation française. Quant aux salaisons de boeuf, il en est arrivé dans nos ports 675,000 kilog., dont 607,127 des États-Unis. 9,844 seulement, évalués à 6,891 fr., sont passés dans la consommation.