« Sagesse (1902)/« Qu’en dis-tu, voyageur, des pays et des gares ? » » : différence entre les versions

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:Qu'en dis-tu, voyageur, des pays et des gares ?
Qu'en dis-tu, voyageur, des pays et des gares ?
:Du moins as-tu cueilli l'ennui, puisqu'il est mûr,
Du moins as-tu cueilli l'ennui, puisqu'il est mûr,
:Toi que voilà fumant de maussades cigares,
Toi que voilà fumant de maussades cigares,
:Noir, projetant une ombre absurde sur le mur ?
Noir, projetant une ombre absurde sur le mur ?
 
 
:Tes yeux sont aussi morts depuis les aventures,
:Ta grimace est la même et ton deuil est pareil :
:Telle la lune vue à travers des mâtures,
:Telle la vieille mer sous le jeune soleil,
 
 
:Tel l'ancien cimetière aux tombes toujours neuves !
:Mais voyons, et dis-nous les récits devinés,
:Ces désillusions pleurant le long des fleuves,
:Ces dégoûts comme autant de fades nouveau-nés,
 
 
:Ces femmes ! Dis les gaz, et l'horreur identique
:Du mal toujours, du laid partout sur tes chemins,
:Et dis l'Amour et dis encor la Politique
:Avec du sang déshonoré d'encre à leurs mains.
 
 
:Et puis surtout ne va pas t'oublier toi-même
:Traînassant ta faiblesse et ta simplicité
:Partout où l'on bataille et partout où l'on aime,
:D'une façon si triste et folle, en vérité !
 
 
:A-t-on assez puni cette lourde innocence ?
:Qu'en dis-tu ? L'homme est dur, mais la femme ? Et tes pleurs,
:Qui les a bus ? Et quelle âme qui les recense
:Console ce qu'on peut appeler tes malheurs ?
 
 
:Ah les autres, ah toi ! Crédule à qui te flatte,
:Toi qui rêvais (c'était trop excessif, aussi)
:Je ne sais quelle mort légère et délicate !
:Ah toi, l'espèce d'ange avec ce voeu transi !
 
 
:Mais maintenant les plans, les buts ? Es-tu de force,
:Ou si d'avoir pleuré t'a détrempé le coeur ?
:L'arbre est tendre s'il faut juger d'après l'écorce,
:Et tes aspects ne sont pas ceux d'un grand vainqueur.
 
 
:Si gauche encore ! avec l'aggravation d'être
:Une sorte à présent d'idyllique engourdi
:Qui surveille le ciel bête par la fenêtre
:Ouverte aux yeux matois du démon de midi.
 
Tes yeux sont aussi morts depuis les aventures,
Ta grimace est la même et ton deuil est pareil :
Telle la lune vue à travers des mâtures,
Telle la vieille mer sous le jeune soleil,
 
Tel l'ancien cimetière aux tombes toujours neuves !
:Si le même dans cette extrême décadence !
Mais voyons, et dis-nous les récits devinés,
:Enfin ! - Mais à ta place un être avec du sens,
Ces désillusions pleurant le long des fleuves,
:Payant les violons voudrait mener la danse,
Ces dégoûts comme autant de fades nouveau-nés,
:Au risque d'alarmer quelque peu les passants.
 
Ces femmes ! Dis les gaz, et l'horreur identique
Du mal toujours, du laid partout sur tes chemins,
Et dis l'Amour et dis encor la Politique
Avec du sang déshonoré d'encre à leurs mains.
 
Et puis surtout ne va pas t'oublier toi-même
:N'as-tu pas, en fouillant les recoins de ton âme,
Traînassant ta faiblesse et ta simplicité
:Un beau vice à tirer comme un sabre au soleil,
Partout où l'on bataille et partout où l'on aime,
:Quelque vice joyeux, effronté, qui s'enflamme
D'une façon si triste et folle, en vérité !
:Et vibre, et darde rouge au front du ciel vermeil ?
 
A-t-on assez puni cette lourde innocence ?
Qu'en dis-tu ? L'homme est dur, mais la femme ? Et tes pleurs,
Qui les a bus ? Et quelle âme qui les recense
Console ce qu'on peut appeler tes malheurs ?
 
Ah les autres, ah toi ! Crédule à qui te flatte,
:Un ou plusieurs ? Si oui, tant mieux ! Et pars bien vite
Toi qui rêvais (c'était trop excessif, aussi)
:En guerre, et bats d'estoc et de taille, sans choix
Je ne sais quelle mort légère et délicate !
:Surtout, et mets ce masque indolent où s'abrite
Ah toi, l'espèce d'ange avec ce voeu transi !
:La haine inassouvie et repue à la fois...
 
Mais maintenant les plans, les buts ? Es-tu de force,
Ou si d'avoir pleuré t'a détrempé le coeur ?
L'arbre est tendre s'il faut juger d'après l'écorce,
Et tes aspects ne sont pas ceux d'un grand vainqueur.
 
Si gauche encore ! avec l'aggravation d'être
:Il faut n'être pas dupe en ce farceur de monde
Une sorte à présent d'idyllique engourdi
:Où le bonheur n'a rien d'exquis et d'alléchant
Qui surveille le ciel bête par la fenêtre
:S'il n'y frétille un peu de pervers et d'immonde,
Ouverte aux yeux matois du démon de midi.
:Et pour n'être pas dupe il faut être méchant.
 
Si le même dans cette extrême décadence !
Enfin ! - Mais à ta place un être avec du sens,
Payant les violons voudrait mener la danse,
Au risque d'alarmer quelque peu les passants.
 
N'as-tu pas, en fouillant les recoins de ton âme,
:- Sagesse humaine, ah, j'ai les yeux sur d'autres choses,
Un beau vice à tirer comme un sabre au soleil,
:Et parmi ce passé dont ta voix décrivait
Quelque vice joyeux, effronté, qui s'enflamme
:L'ennui, pour des conseils encore plus moroses,
Et vibre, et darde rouge au front du ciel vermeil ?
:Je ne me souviens plus que du mal que j'ai fait.
 
Un ou plusieurs ? Si oui, tant mieux ! Et pars bien vite
En guerre, et bats d'estoc et de taille, sans choix
Surtout, et mets ce masque indolent où s'abrite
La haine inassouvie et repue à la fois...
 
Il faut n'être pas dupe en ce farceur de monde
:Dans tous les mouvements bizarres de ma vie,
Où le bonheur n'a rien d'exquis et d'alléchant
:De mes « malheurs », selon le moment et le lieu,
S'il n'y frétille un peu de pervers et d'immonde,
:Des autres et de moi, de la route suivie,
Et pour n'être pas dupe il faut être méchant.
:Je n'ai rien retenu que la grâce de Dieu.
 
- Sagesse humaine, ah, j'ai les yeux sur d'autres choses,
Et parmi ce passé dont ta voix décrivait
L'ennui, pour des conseils encore plus moroses,
Je ne me souviens plus que du mal que j'ai fait.
 
Dans tous les mouvements bizarres de ma vie,
:Si je me sens puni, c'est que je le dois être.
De mes « malheurs », selon le moment et le lieu,
:Ni l'homme ni la femme ici ne sont pour rien.
Des autres et de moi, de la route suivie,
:Mais j'ai le ferme espoir d'un jour pouvoir connaître
Je n'ai rien retenu que la grâce de Dieu.
:Le pardon et la paix promis à tout Chrétien.
 
Si je me sens puni, c'est que je le dois être.
Ni l'homme ni la femme ici ne sont pour rien.
Mais j'ai le ferme espoir d'un jour pouvoir connaître
Le pardon et la paix promis à tout Chrétien.
 
:Bien de n'être pas dupe en ce monde d'une heure,
:Mais pour ne l'être pas durant l'éternité,
:Ce qu'il faut à tout prix qui règne et qui demeure,
:Ce n'est pas la méchanceté, c'est la bonté.
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