« Bretons de Lettres » : différence entre les versions

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Charles Leconte de Liste quitta l'île BourBourbon, le 11 mars 1837, pour venir étudier le
droit en France. Il laissait ses parents désolés de son départ. « J'ai beau chercher à me
bon, le 11 mars 1837, pour venir étudier le
droit en France. Il laissait ses parents déso
lés de son départ. « J'ai beau chercher à me
faire une raison de son absence, écrivait son
père, quand son souvenir me revient, et il me
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ami, n'être jamais obligé de te séparer de tes
enfants à d'aussi immenses distances ; cela
nuit au bonheur de la vie. » Avant de s'insinstaller à Rennes pour y suivre les cours de la
Faculté de droit, Charles devait passer quelque temps chez son oncle, M. Louis Leconte,
taller à Rennes pour y suivre les cours de la
Faculté de droit, Charles devait passer quel
que temps chez son oncle, M. Louis Leconte,
avoué à Dinan. C'était le plus proche parent
 
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fils pendant le temps de ses études, en lui
donnant tout pouvoir pour l'administration du
budget et la direction de la vie du jeune étuétudiant.
diant.
 
La correspondance échangée entre les paparents de Bourbon et le cousin de Bretagne,
rents de Bourbon et le cousin de Bretagne,
les notes que j'ai prises dans les archives de
l'Université et dans les journaux et revues de
Rennes, — notes et correspondance éclairées
ou complétées par quelques lettres de Charles
Leconte de Lisle et par des souvenirs de fafamille, — m'ont permis de suivre, à Rennes,
mille, — m'ont permis de suivre, à Rennes,
pendant près de six années, les traces du
mauvais étudiant qui devait être un grand
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première rectification s'impose.
 
« Trois ans, il demeura à Rennes, sous préprétexte d'y faire son droit... On le rappela à
texte d'y faire son droit... On le rappela à
 
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« Paris, novembre 1807,
 
« Monsieur, vous venez de publier un intéintéressant article sur Leconte de Lisle. Puisque
vous me faites l'honneur de citer mon témoignage et que vous croyez pouvoir relever
ressant article sur Leconte de Lisle. Puisque
dans mes souvenirs quelques légères inexactitudes, je crois vous être agréable en mettant
vous me faites l'honneur de citer mon témoi
gnage et que vous croyez pouvoir relever
dans mes souvenirs quelques légères inexac
titudes, je crois vous être agréable en mettant
sous vos yeux le document dont je me suis
servi. Je le tire des notes autographes que
Leconte de Lisle avait bien voulu écrire pour
me renseigner: « Mon père d'origine nornormande et Bretonne. Deux branches, aînée
mande et Bretonne. Deux branches, aînée
et cadette. Le nom est ainsi orthographié
dans les anciens papiers de famille : Le
Conte de Lisle, branche aînée ; Le Conte
de Préval, cadette. Les Préval n'ont gardé
que le nom patronymique, J'ai réuni, le prepremier ''le'' et ''Conte'', pour éviter le semblant d'un
mier ''le'' et ''Conte'', pour éviter le semblant d'un
titre.....
 
Venu en France à 3 ans, retourné à BourBourbon à 10 ans avec ma famille, deuxième
bon à 10 ans avec ma famille, deuxième
 
<center>
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près de trois années dans la vie du Maître.
 
Tout d'abord, quelques mots sur les oriorigines de famille et le nom de Leconte de Lisle
gines de famille et le nom de Leconte de Lisle
ne seront pas inutiles, pour rectifier tant
d'erreurs accumulées sur ces deux points.
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son petit-fils Thomas, son arrière petit-fils
Charles. Un des fils de celui-ci fut Thomas,
« aïeul paternel de Leconte de Lisle au cincinquième degré. »
quième degré. »
 
Le fils de Thomas fut Jean, qui vivait dans
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se conserver longtemps dans la famille, » et
que pourtant M. Louis Leconte, le maire de
Dinan, ne parvint pas à se faire concéder légalégalement et auquel dès lors il renonça.
lement et auquel dès lors il renonça.
 
Ce Michel Leconte de Préval, qui était apoapothicaire, habitait Pontorson, petite ville aux
frontières de la Bretagne. Parmi d'autres enfants, il eut un fils Jacques Leconte, sieur
thicaire, habitait Pontorson, petite ville aux
frontières de la Bretagne. Parmi d'autres en
fants, il eut un fils Jacques Leconte, sieur
de Préval, qui fut l'arrière grand-père de
Leconte de Lisle. Il fit ses études de médecine
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:Va loin de cet autel porter tes faux serments.
 
Le patriote poète n'en fut pas moins empriemprisonné, et, rendu à la liberté au 9 thermidor,
sonné, et, rendu à la liberté au 9 thermidor,
 
 
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ce fut en vers encore qu'il manifesta sa joie.
Les ''Souvenirs'' de M. Néel de Lavigne constaconstatent le succès de ces vers et la célébrité locale
tent le succès de ces vers et la célébrité locale
de leur auteur.
 
Son fils fut Charles-Guillaume Jacques, né
en 1787. Il n'avait pas terminé ses études de
médecine quand, en 1813, il fut nommé chichirurgien sous-aide au corps de Bavière. À la
rurgien sous-aide au corps de Bavière. À la
chute de l'Empire, il quitta son poste, et, en
1816, il se décida à partir pour lîle Bourbon.
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des XVII{{e}} et XVIII{{e}} siècles, pour se distinguer
entre frères et cousins et n'impliquaient pas
même une prétention à la noblesse ; ils marmarquaient, et encore pas toujours, la possession
quaient, et encore pas toujours, la possession
d'une terre,
 
La terre de l'isle est située sur les anciennes
paroisses de Saint Samson de l'Isle et de CenCendres, qui font partie aujourd'hui de la pa-
roisse de Pleine-Fougères, au diocèse de Rennes. Elle relevait autrefois de l'évêché de Dol
dres, qui font partie aujourd'hui de la pa-
roisse de Pleine-Fougères, au diocèse de Ren
nes. Elle relevait autrefois de l'évêché de Dol
et des moines de Marmoutiers. Une vieille
 
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Couësnon, de vastes marais couverts d'eau
pendant l'hiver, la cathédrale de Dol d'un
côté, le mont Saint-Michel de l'autre, les hauhauteurs d'Avranches à l'Est », au nord et à l'ouest
teurs d'Avranches à l'Est », au nord et à l'ouest
la mer et Saint-Malo, voilà les horizons à vol
d'oiseau de cette région où est enclose la
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à Dinan, Bretons tout à fait.
 
C'est par un mariage avec la fille de Fran-
çois Estienne, acquéreur de cette terre et qui
en prit le nom, que Michel Leconte de Préval
devint propriétaire de la petite terre de l'Isle.
Le premier qui en porta le nom fut son petit-fils Charles-Marie, grand-père de notre poète.
fils Charles-Marie, grand-père de notre poète.
Bien que ''légalement'' ce nom ne lui appartint
pas, il le porta si constamment que son fils,
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''dit'' de Lisle. Aussi quand le chirurgien démisdémissionnaire partit pour Bourbon, emportait-il
son nom presque ''légitimement'' constitué et désormais en fit-il sa signature incontestée,
sionnaire partit pour Bourbon, emportait-il
son nom presque ''légitimement'' constitué et dé
sormais en fit-il sa signature incontestée,
avec la seule variante de l'apostrophe mise
ou omise à ''Lisle''.
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pour y exercer la médecine et y faire de la
culture. Il s'y était marié avec Mlle Elisée de
Riscourt de Lanux ; en 1818, Charles-Marie-René, qui fut le poète était né.
René, qui fut le poète était né.
 
Quand il fut question d'envoyer Charles en
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connaître, je te prie, l'intérieur de ton ménage. Combien as-tu d'enfants ? Leur âge,
nage. Combien as-tu d'enfants ? Leur âge,
leur nom ? Que nous nous connaissions avant
de nous voir. »
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d'une nature tin peu sèche, d'une correction
bourgeoise un peu étroite, de principes un
peu durs. Il était peu fait, lui, l'homme d'afaffaires et le citadin d'une petite ville bretonne,
faires et le citadin d'une petite ville bretonne,
pour comprendre et pour diriger un jeune
homme librement élevé à Bourbon et déjà
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exquise faiblesse pour l'enfant exilé.
 
Elle marque, dès le début, les préoccupapréoccupations les plus vives, les inquiétudes les plus
tions les plus vives, les inquiétudes les plus
minutieuses. Les moindres détails de la vie
de l'étudiant seront l'objet de soucis constants
et de recommandations pressantes. Si les paparents du poète ne l'ont jamais ''compris'', au
rents du poète ne l'ont jamais ''compris'', au
dire d'un biographe qui reçut les confidences
du Maître, ils l'ont, du moins, profondément
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l'Isle, est qu'il habite le quartier le plus aéré
et conséquemment le plus sain. Je suis loin
de vouloir et de pouvoir lui fournir un logelogement autre que modeste et propre, mais
ment autre que modeste et propre, mais
encore que je ne veuille pas faire une dépense
folle, suis-je désireux que sa chambre soit
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nécessaires et commodes — on se plaît mieux
chez soi, quand on est bien logé — et bien
située pour l'air et la vue — c'est l'expéexpérience qui me l'a appris...
rience qui me l'a appris...
 
« Il est peu difficile en nourriture. Quant
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chargée de son linge (celle chez qui il logerait,
par exemple), cela serait fort utile pour lui,
car nul, que je sache, ne porfa plus loin l'ininsouciance en pareille matière. »
souciance en pareille matière. »
 
L'excellent père lient à ce que son fils
« soigne son costume : il se respectera dadavantage, quand il sera bien mis. »
vantage, quand il sera bien mis. »
 
« Je n'ai pas le désir, écrit-il, qu'il soit un
fashionable, mais cependant je serais désodésobligé que sa mise ne fût pas soignée. Veuille,
bligé que sa mise ne fût pas soignée. Veuille,
mon ami, y de nner la main, sans permettre
l'excès contraire, qui jusqu'ici n'a jamais été
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dans ses goûts, mais que je désapprouve au-
tant que la négligence. Qu'il soit de nc tou-toujours mis avec goût et propreté. L'homme bien
jours mis avec goût et propreté. L'homme bien
mis se respecte toujours plus que celui qui
en raison de son mauvais maintien ne craint
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d'être bien mis à Rennes, à cette époque, voici
ce qu'en écrivait, à la date du 12 février 1838,
le chroniqueur des Modes du Journal. ''L'AuxiAuxiliaire Breton : « Redingote pardessus en drap
liaire Breton : « Redingote pardessus en drap
peloté. La jupe ne dépasse pas le dessous des
genoux, elle n'est pas fendue et l'ampleur par
derrière est formée par deux gros plis grevés.
La taille est très longue et d'une largeur proprodigieuse. Les boutons d'un très grand diamètre ; les parements, le col et les poches
digieuse. Les boutons d'un très grand dia
mètre ; les parements, le col et les poches
garnis de velours... Le paletot est très bien
porté ; les habits à la française sont une fanfantaisie négligée. Les pantalons ajustés à la
botte passent de mode ; on revient aux pantalons droits ; en négligé, on porte encore
taisie négligée. Les pantalons ajustés à la
botte passent de mode ; on revient aux pan
talons droits ; en négligé, on porte encore
quelques pantalons à plis. Les chapeaux n'ont
pas varié : fond ballonné avec rebords plus
larges devant et derrière que sur les côtés. »
 
On n'en demandait pas tant au jeune étuétudiant et sa pension ne lui permettait pas de
diant et sa pension ne lui permettait pas de
telles fantaisies. Son père semble pourtant
 
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qui le force à sortir des habitudes de trop
de laisser aller qui lui sont naturelles. Si je
me sers du mot ''rang'', je veux dire tout simsimplement une bonne société, peu soucieux
qu'il était ici de voir le monde. Nous craignons qu'il vive trop retiré, ce qui est toujours peu avantageux pour un jeune homme,
plement une bonne société, peu soucieux
qu'il était ici de voir le monde. Nous crai
gnons qu'il vive trop retiré, ce qui est tou
jours peu avantageux pour un jeune homme,
lorsqu'il est destiné, si rien ne s'y oppose, à
entrer dans la magistrature. »
 
Mais ce n'était pas tout d'habiter un logelogement sain, de vivre d'une vie confortable, de
fréquenter la bonne société, et d'avoir la tenue d'un homme du monde, Charles Leconte
ment sain, de vivre d'une vie confortable, de
fréquenter la bonne société, et d'avoir la te
nue d'un homme du monde, Charles Leconte
de Lisle devait encore, au gré de ses parents,
se teinter d'art, non pas sans doutede ute pour l'art
en lui-même, mais pour ce qu'il peut ajouter
d'agrément au bonheur d'une vie bourgeoise.
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Dinan est prié par lettre d'y tenir la main.
 
« Malheureusement, Charles n'est pas encore musicien; fais en sorte qu'il le devienne ;
core musicien; fais en sorte qu'il le devienne ;
tu en conçois tout l'agrément, toi qui as le
bonheur de l'être. Indique-lui un bon maître,
car presque toujours, en ces sortes de mamatières, l'élève dépend du maître. »
tières, l'élève dépend du maître. »
 
Le chapitre des plaisirs était prévu dans ce
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pluies », et l'hiver le préoccupe.
 
Charles ne doitde it pas regarder « à une brasse
de bois de plus ou de moins. » Non pas qu'on
le croie « une demoiselle, mais on travaille
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« J'aime encore mieux, écrit M, Leconte de
l'Isle, sa santé que sa science. Nous travailletravaillerons pour lui, sa mère et moi ; nous avons
rons pour lui, sa mère et moi ; nous avons
essentiellement besoin qu'il se porte bien pour
être heureux. »
 
Et comme s'il se rendait compte que ce sont
beaucoup et de bien minutieuses recommanrecommandations, et qu'elles pourraient sembler exagé-
rées, le bon père s'en excuse de ucement auprès de son cousin :
dations, et qu'elles pourraient sembler exagé
rées, le bon père s'en excuse de ucement au
près de son cousin :
 
« Tu songeras que c'est un père qui envoie
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Hélas ! que ne pouvait-il déléguer, avec
son autorité, un peu de sa tendresse : mais
Charles Leconte de Lisle ne devait pas troutrouver près de son oncle de Dinan l'indulgence
ver près de son oncle de Dinan l'indulgence
de ses parents, et la vie à Rennes allait être
pour lui bien différente de celle de Bourbon.
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la vérité sur son fils. Si elle est pénible, il
tâchera d'y remédier. Qui n'a pas commis des
fautes dans la vie ? Encore vaut-il mieux conconnaître les erreurs de son fils que de le croire
naître les erreurs de son fils que de le croire
dans la bonne voie, quand il est égaré. »
 
Ligne 523 ⟶ 465 :
plaisirs et de ses leçons particulières, non
qu'il soit aucunement capable d'en mésuser,
mais il est si étourdi qu'il laisserait son secrésecrétaire ouvert et il pourrait être dupe. Lorsqu'il sera habitué a soigner lui-même ses
taire ouvert et il pourrait être dupe. Lors
qu'il sera habitué a soigner lui-même ses
affaires, il est digne de toute confiance ; lui
aussi sera un honnête homme. »
Ligne 534 ⟶ 474 :
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En même temps qu'ils prouvent la sensi-sensibilité profonde et la vraie tendresse de M.
Leconte de l'Isle, ces extraits de sa correspondance, ainsi que ceux qui suivront, ont un
bilité profonde et la vraie tendresse de M.
Leconte de l'Isle, ces extraits de sa corres
pondance, ainsi que ceux qui suivront, ont un
autre intérêt et plus grand pour nous, c'est
de nous permettre de connaître le caractère
Ligne 551 ⟶ 489 :
 
Charles Leconte de Lisle avait écrit à ses
parents, du cap de Bonne-Espérance, une letlettre qui leur était parvenue au commencement
tre qui leur était parvenue au commencement
du mois de juillet 1837. Ils n'avaient pas reçu
d'autres nouvelles de lui : peut-être, le bateau
n'avait-il pas fait escale à Sainte-Hélène, comcomme l'avait annoncé le capitaine ? Du moins,
me l'avait annoncé le capitaine ? Du moins,
les navires anglais qui avaient touché à l'Île
de France n'avaient rien apporté et personne
n'avait entendu parler du voyageur.
 
M. Leconte de l'Isle écrivit alors à son coucousin ; il ne voulait pas croire a un accident,
sin ; il ne voulait pas croire a un accident,
 
<center>
Ligne 569 ⟶ 504 :
 
mais il prenait prétexte de son inquiétude
pour prier l'oncle de Charles de bien lui rerecommander de de nner régulièrement de ses
commander de de nner régulièrement de ses
nouvelles. « Une négligence de sa part à nous
écrire ferait bien souffrir sa pauvre mère et
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Cette lettre, datée du 3 juillet 1837, est
pleine d'émotion. La mort de deux compacompatriotes, Tanguy et Théophile de Querhoënt, à
triotes, Tanguy et Théophile de Querhoënt, à
huit mois de distance, l'arrivée à Bourbon
d'un Malouin, le capitaine Moucet, commancommandant le ''Robert Surcouf'' ; tous ces événements,
dant le ''Robert Surcouf'' ; tous ces événements,
joints au départ de son fils et au manque de
nouvelles, ont remué au cœur de l'exilé les
vieux souvenirs du pays natal.
 
C'est que M. Leconte de lisle ne se consiconsidérait que comme un exilé sur la terre de
dérait que comme un exilé sur la terre de
Bourbon. Il avait placé, de manière à l'avoir
toujours sous les yeux, une ''Vue de Dinan'' que
lui avait envoyée Louis Leconte. « Je suis fort
aise, lui écrivait-il, de la revoir tous les jours,
encore qu'elle soit bien gravée dans mon sousouvenir. » Et il en prenait occasion pour renouveler sa demande de toutes les vues de Dinan
venir. » Et il en prenait occasion pour renou
veler sa demande de toutes les vues de Dinan
du même auteur. « Les 4.000 lieues qui nous
séparent ne m'enlèveront jamais mon affecaffection pour la terre natale. »
tion pour la terre natale. »
 
Son projet bien arrêté était de rentrer au
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</center>
 
pays. C'est avec le capitaine Moucet qu'il rêvait d'y revenir. Quand on lui annonce la
vait d'y revenir. Quand on lui annonce la
mort de Mlle Robinot, de Dinan, il s'en désole ;
il se faisait « un plaisir de la compter au
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Moucet qui regagnait Saint-Malo, M. Leconte
de l'Isle disait toute son impatience d'avoir
des nouvelles. Cette lettre, datée du 12 sepseptembre 1837, était à peine partie que les nouvelles tant attendues arrivaient par ''l'Ange
tembre 1837, était à peine partie que les nou
velles tant attendues arrivaient par ''l'Ange
Gardien''. Avec quelle joie les parents de
Bourbon connurent l'arrivée de leur fils dans
la famille de son oncle et le bon accueil qui
lui avait été fait. L'avoué de Dinan annonannonçait à son cousin qu'il allait, avant peu, être
çait à son cousin qu'il allait, avant peu, être
nommé maire. Le reste de la lettre était moins
agréable à lire et quelques points noirs étaient
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</center>
 
à la « coquetterie, un peu de vanité et d'aamour-propre. »
mour-propre. »
 
Dès le 27 novembre, M. Leconte de l'Isle répondait à son cousin pour remercier « les protecteurs, les amis de son enfant. » Et ce n'était
pas seulement pour la cordialité de leur accueil, c'était même, c'était surtout pour la
pondait à son cousin pour remercier « les pro
tecteurs, les amis de son enfant. » Et ce n'était
pas seulement pour la cordialité de leur ac
cueil, c'était même, c'était surtout pour la
tutelle morale qui s'exerçait déjà par des
observations, quoique peut-être prématurées,
sur le caractère de Charles. Il a besoin pourpourtant qu'on le rassure sur cette vanité et
tant qu'on le rassure sur cette vanité et
cet amour-propre qu'on lui signale. « Soit
faiblesse de père, soit changement chez Charles,
je ne m'en étais pas aperçu. Il aime la toitoilette, me dis-tu : j'avais craint le contraire,
lette, me dis-tu : j'avais craint le contraire,
tant ce triste pays où je suis exilé avait jeté
d'abandon dans son âme, dans sa tenue. Les
excès ne valent rien ; je serais aussi peiné
qu'il s'occupât trop de sa mise que je serais
contrarié qu'il se négligeât. » On devine pourpourtant que, s'il fallait choisir entre les deux
tant que, s'il fallait choisir entre les deux
excès, l'excellent homme pencherait plutôt
pour un peu de coquetterie. « Un costume
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ferme en quelque sorte, à mon avis, l'entrée
des réunions trop faciles où l'on contracte
de mauvaises habitudes, » Un point sur lelequel les deux cousins sont d'accord, c'est la
quel les deux cousins sont d'accord, c'est la
 
 
Ligne 674 ⟶ 590 :
</center>
 
nécessité de mettre de l'ordre dans les dépenses du jeune homme et l'obligation pour
penses du jeune homme et l'obligation pour
lui d'en fournir le compte à son tuteur. Sans
doute, il arrivera souvent à Charles de faire
infraction à cet article de son règlement de
vie : le désordre, l'insouciance du lendemain,
l'absence des idées d'économie « sont si grangrandes à Bourbon, dans ce malheureux pays »
des à Bourbon, dans ce malheureux pays »
où, même pour un homme d'ordre, le mal
est contagieux. Ce sera à son oncle « qui a si
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haute situation » à laquelle il va être appelé !
 
Soit par suite des préoccupations de sa no-nomination d'abord, puis des charges de sa fonction, soit mauvaise humeur de sa tutelle, je
mination d'abord, puis des charges de sa fonc
tion, soit mauvaise humeur de sa tutelle, je
ne sais ; toujours est-il que M. Louis Leconte,
après cette lettre, ne de nna plus de ses nounouvelles, c'est-à-dire des nouvelles de Charles.
velles, c'est-à-dire des nouvelles de Charles.
 
La famille de Bourbon patienta jusqu'au
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Qu'est-il de nc arrivé? L'étudiant aurait-il
commis quelque faute ? Mais, outre que Char-
 
 
<center>
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te peser trop, conclut-il. Je conçois combien
il faut de complaisance pour cela. Sa mère et
moi, nous vous en remercions bien sincèresincèrement. »
ment. »
 
Ce qui augmentait l'inquiétude des parents
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rien reçu de lui !
 
« Il a eu tort, écrit avec un peu d'ameramertume ce pauvre père attristé ; aurait-il oublié
notre amour pour lui ? Si loin, c'eût été cependant bien doux pour nous de recevoir de
tume ce pauvre père attristé ; aurait-il oublié
notre amour pour lui ? Si loin, c'eût été ce
pendant bien doux pour nous de recevoir de
ses nouvelles. » Et à la pensée de cet enfant
qu'il n'a pas embrassé depuis si longtemps,
l'attendrissement le gagne. Il faut que l'étuétudiant soit présent a Bourbon un peu plus que
diant soit présent a Bourbon un peu plus que
par le souvenir, et on demande au cousin que
Charles fasse faire sa miniature par le meilmeilleur artiste de Rennes ; on paiera la somme
leur artiste de Rennes ; on paiera la somme
nécessaire. « Ce sera toujours pour eux un
 
Ligne 774 ⟶ 679 :
exagération blâmable » ont fortement blessé
son oncle ; bref, il est républicain et M. le
Maire n'entend pas que son neveu le comprocompromette. M. Louis Leconte se plaint encore d'une « piétendue myopie » qui ne lui paraît qu'af-
mette. M. Louis Leconte se plaint encore d'unee
« piétendue myopie » qui ne lui paraît qu'af
fectation et pose, et de dépenses exagérées
de toilette, et d'achats excessifs de livres. Il
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</center>
 
y a lieu de signaler enfin certains déportedéportements de ce jeune homme, qui n'est pas du
ments de ce jeune homme, qui n'est pas du
tout la ''demoiselle'' qu'on lui avait annoncée.
 
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été si ''pure'', le mot est souligné dans une lettre
du 5 mai 1838 ; son caractère « si égal, si poli
avec tout le monde », qu'ils en sont littéralelittéralement « tombés des nues ». Les compagnons
ment « tombés des nues ». Les compagnons
de voyage de Charles avaient tous « chanté
ses louanges » ; sa de uceur, son affabilité, son
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dans la société. Je n'en reviens pas, écrit M.
Leconte de l'Isle. Je m'y perds. Quant à sa
timidité, ou plutôt son caractère froid et réservé, cela lui est naturel, il est peu communicatif, peu causeur. La nature l'a fait ainsi ;
servé, cela lui est naturel, il est peu commu
nicatif, peu causeur. La nature l'a fait ainsi ;
le temps, les femmes, la société le changeront
peut-être. »
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l'Isle, ses idées en politique exagérées au-delà de toute expression et tu es assez bon
delà de toute expression et tu es assez bon
enfant pour me demander comment j'ai pu
lui en inculquer de pareilles. Eh morbleu ! je
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jeunes gens. Cette exaltation de pensée tient,
comme chez les jeunes gens de son âge, à sa
jeune organisation ; ses idées religieuses prenprennent chez lui une teinte plus forte, parce
nent chez lui une teinte plus forte, parce
qu'il sait mieux soutenir son paradoxe. »
 
Certainement, le père ne prêtend pas défendre les exagérations de son fils ; cela serait
«impardonnable à son âge, mais il veut plaider la cause de son enfant, » lui conserver
fendre les exagérations de son fils ; cela serait
«impardonnable à son âge, mais il veut plai
der la cause de son enfant, » lui conserver
l'affection de son oncle dont il a tant besoin ;
et, d'ailleurs, avec les années, tout cela s'attéatténuera. « Le temps et les bons conseils viendront facilement à bout de son républicanisme. »
nuera. « Le temps et les bons conseils vien
dront facilement à bout de son républicanis
me. »
 
Il est clair qu'en défendant le jeune Charles,
M. Leconte de l'Isle veut éviter surtout de froisfroisser son sévère cousin et qu'il n'ajoute foi qu'à
ser son sévère cousin et qu'il n'ajoute foi qu'à
moitié à toutes les accusations dont on charge
son fils. Il avait meilleure opinion de lui et
cette bonne opinion se trouvait encore confir-
 
 
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que M. Leconte de l'Isle dut se tenir à quatre
pour ne pas rabrouer son farouche cousin, il
serait à désirer quelle fût vraiment un enfanenfantillage, mais le grand-père, le père et un
tillage, mais le grand-père, le père et un
oncle de Charles étant « atteints de cette
infirmité, » quoi d'étonnant à ce que Charles
en souffrit également ? Aussi son père lui avait-il bien recommandé de ne jamais travailler le
soir, sans être éclairé par « deux grosses chandelles. » Ses économies de bouts de chandelle
il bien recommandé de ne jamais travailler le
soir, sans être éclairé par « deux grosses chan
delles. » Ses économies de bouts de chandelle
« seraient contre lui. » Quant aux dépenses
exagérées, ne faut-il pas que sa chambre soit
bien située, bien aérée, les meubles simples,
mais en quantité suffisante ; sa mise doitde it être
« constamment soignée. » Quant aux livres,
que M. le Maire soit juge de ce qui est utile ?
Ligne 902 ⟶ 790 :
bien ! »
 
Parti de Bourbon, le 11 mars 1837, débardébarqué a Nantes dans les derniers jours de juin,
qué a Nantes dans les derniers jours de juin,
Charles Leconte de Lisle avait gagné Dinan,
où sa famille l'attendait. De Nantes, il avait
annoncé son arrivée « en cinq mots », et de
Dinan, il adressait à sa sœurs?ur, avec un complécomplément de nouvelles, un recueil illustré : ''Paris-Londres''.
ment de nouvelles, un recueil illustré : ''Paris-
Londres''.
 
Au commencement d'octobre, son oncle et
sa tante le conduisaient à Rennes pour y sursurveiller son installation. On lui avait trouvé une
veiller son installation. On lui avait trouvé une
chambre, dans la partie basse de la ville, au
bord de la rivière, non encore canalisée, au
n° 4 de la rue des Carmes. En dépit des re-recommandations réitérées de son père qui désirait « une exposition bien aérée, » importante surtout « dans une ville humide comme
commandations réitérées de son père qui dé
sirait « une exposition bien aérée, » impor
tante surtout « dans une ville humide comme
Rennes », ce qui avait déterminé le choix,
c'était le voisinage d'un parent des Leconte,
Ligne 949 ⟶ 830 :
 
Cet « oubli » contrariait vivement M. Le-
conte de l'Isle. « Il n'eût pas manqué d'y renrencontrer » (chez M. Robinot) « des hommes de
contrer » (chez M. Robinot) « des hommes de
robe, dont la société ne pouvait manquer de
lui être utile et la connaissance avantageuse. »
Ligne 958 ⟶ 838 :
Hélas ! c'était trop tôt parler de robe et de
magistrature ; il fallait d'abord, avant de faire
sont droit, obtenir le diplôme de bachelier ès-lettres, et les choses n'allèrent pas toutes
lettres, et les choses n'allèrent pas toutes
seules de ce côté. Cette formalité n'est pas
 
Ligne 969 ⟶ 848 :
sans ennuyer M. Leconte de l'Isle, qui n'en
comprend pas la nécessité. « Je compte sur
ton aide, écrit-il à son cousin, et sur tes conconnaissances de Rennes pour lui faciliter son
naissances de Rennes pour lui faciliter son
ridicule examen de baccalauréat. Je viens de
voir qu'il était essentiel d'être bachelier avant
Ligne 981 ⟶ 859 :
admis à prendre la première inscription de
Droit, il fallait encore, « autre sottise de ce
gouvernement, » pour être admis au baccalaubaccalauréat, fournir un certificat d'études. M. Leconte
de l'Isle avait omis de munir son fils, au départ, de l'attestation nécessaire. Il fallut écrire
réat, fournir un certificat d'études. M. Leconte
à Bourbon et l'année fut prise par ces difficultés.
de l'Isle avait omis de munir son fils, au dé
part, de l'attestation nécessaire. Il fallut écrire
à Bourbon et l'année fut prise par ces diffi-
cultés.
 
Charles avait déjà fait en France un premier
Ligne 996 ⟶ 871 :
ans. »
 
D'autre part, je liens de M. Auguste Lacaus-
sade, compatriote du Maître et son collègue à
 
Ligne 1 005 ⟶ 880 :
 
la Bibliothèque du Sénat, que « Leconte de
Lisle et lui étaient élèves de la pension Brieu-Brieugne, place aux Cochons, à Nantes<ref>L'archiviste de la ville de Nantes, M. René Blanchard a
gne, place aux Cochons, à Nantes<ref>L'archiviste de la ville de Nantes, M. René Blanchard a
bien voulu m'adresser les renseignements suivants dont je le
remercie :
Ligne 1 023 ⟶ 897 :
l'assertion de Leconte de Lisle, quant à son
âge, et lire qu'il arriva à Nantes, vers six ans,
— ce qui paraît plus naturel, d'ailleurs, puispuisqu'il y venait en pension, — et qu'il en repartit vers treize.
qu'il y venait en pension, — et qu'il en repar
tit vers treize.
 
Et maintenant, le Maître a-t-il étudié au
collège de Dinan ? Une lettre de lui écrite à
Rennes, à la date du 12 janvier 1838, et dont
un extrait m'a été adressé par M. Rellier-Dumaine, le montre occupé à faire « démonter
entièrement pour remporter, » un grand bureau qui taisait partie de son mobilier de
Dumaine, le montre occupé à faire « démonter
entièrement pour remporter, » un grand bu
reau qui taisait partie de son mobilier de
Rennes, cherchant le moyen d'expédier ses
malles à Dinan et prenant soin « de payer
Ligne 1 042 ⟶ 912 :
</center>
 
tout » avant son départ, selon la recommanrecommandation de son oncle.
dation de son oncle.
 
Il est probable que, prévoyant les difficultés
Ligne 1 063 ⟶ 932 :
 
C'est à cette époque qu'il faudrait rapporter
les témoignages tournis en faveur de son séjour au collège de Dinan, par M. Bellier Dumaine, dans une lettre que j'ai publiée dans
jour au collège de Dinan, par M. Bellier Du-
maine, dans une lettre que j'ai publiée dans
l'''Hermine'', tome XVII, page 179.
 
Ligne 1 096 ⟶ 963 :
avaient dirigé ses études, avant qu'il les eût
continuées avec lui. » Enfin on voulut bien
passer sur ce manque « des formalités vouvoulues et borner les difficultés à la demande
lues et borner les difficultés à la demande
qu'on lui faisait faire, » et lui permettre de
passer l'examen, les premiers jours de nonovembre.
vembre.
 
Quels étaient ces maîtres, non désignés
d'une manière spéciale ? On s'en tira « d'une
manière générale » en inscrivant, au lieu du
nom de ces maîtres, sans doutede ute ceux de la
pension Brieugne, la mention : « Élève du ''ColCollège de Nantes'' et de son père ».
lège de Nantes'' et de son père ».
 
Tout conspirait d'ailleurs, contre ce pauvre
baccalauréat et « quelques difficultés » sem-
 
<center>
Ligne 1 117 ⟶ 981 :
 
blent être venues du candidat lui-même.
Charles se montrait peu soucieux de s'y prépréparer, à moins que, se trouvant suffisamment
parer, à moins que, se trouvant suffisamment
préparé d'avance, il ne crût inutile de peiner
sur des bouquins classiques, Déjà se manifesmanifestaient en lui les premières rébellions et l'artiste s'éveillait dans l'étudiant.
taient en lui les premières rébellions et l'ar
tiste s'éveillait dans l'étudiant.
 
Ce serait la peinture qui aurait motivé sa
Ligne 1 131 ⟶ 992 :
Deux artistes de Paris, amis de son ami
Cliquot, l'avaient invité « à faire avec eux une
petite tournée » ; ce dernier l'engagea à parpartir avec lui, contrarié qu'il eût été de revenir
seul. Charles consentit à l'accompagner « certain de pouvoir revenir de suite » mais le
tir avec lui, contrarié qu'il eût été de revenir
seul. Charles consentit à l'accompagner « cer
tain de pouvoir revenir de suite » mais le
manque d'argent les retint en route et notre
étudiant en rupture d'études dut faire « treize
Ligne 1 196 ⟶ 1 055 :
 
Il le fut, en effet, le 14 novembre 1838, et
voici le certificat qui lui fut délivré en atten-
dant le diplôme,
 
COLLÈGE ROYAL DE RENNES
 
Je soussligné, proviseur du Collège Royal de RenRennes, remplissant les fonctions de de yen près la
nes, remplissant les fonctions de de yen près la
Commission du baccalauréat, certifie que l'elève
Leconte de l'Isle, né à Saint-Paul (de Bourbon), a été
Ligne 1 216 ⟶ 1 074 :
de Lisle. Je les ai copiées sur le registre du
baccalauréat de la Faculté des Lettres. Elles
ne manquent pas, sur certains points, de quelquelque piquant.
que piquant.
 
Les voici :
Ligne 1 244 ⟶ 1 101 :
Voilà ! Maintenant, mélangez ces ''assez bien'',
ces ''médiocre'', ces ''passable'', ces ''suffisant'', ces
''faible'', et ces ''très faible'', vous avez le traductraducteur d'Homère et d'Eschyle, d'Euripide et
teur d'Homère et d'Eschyle, d'Euripide et
d'Horace, le curieux de toutes les histoires
et de toutes les géographies, le philosophe,
Ligne 1 259 ⟶ 1 115 :
le jeune bachelier ne se plaignit pas. Si les
notes étaient « sévères, » il ajoutait en riant
qu'elles étaient « justes ». Deux lettres témoitémoignent de sa joie d'en avoir fini. (15 novembre
gnent de sa joie d'en avoir fini. (15 novembre
et décembre 1838). Fort peu prépaie à son
baccalauréat, il n'était pas sans crainte. « Heu-
 
 
Ligne 1 278 ⟶ 1 133 :
faire. » L'aveu est gentil, pour un garçon de
vingt ans, dans sa naïveté qui charme, et il
conclut : « La ville de Rennes me plaît beaubeaucoup, rien ne me manque : là bibliothèque,
coup, rien ne me manque : là bibliothèque,
le théâtre, une chambre tranquille, commode
et point d'amis !!! Que demanderais-je de
Ligne 1 285 ⟶ 1 139 :
 
Ce jour même, 14 novembre 1838, Charles
Leconte de Lisle prenait sa première inscripinscription de droit. J'en ai trouvé le certificat dans
tion de droit. J'en ai trouvé le certificat dans
les archives.
 
Ligne 1 303 ⟶ 1 156 :
</center>
 
est datée, par erreur sans doutede ute, du 13 novemnovemvembre. Quant à l'extrait de naissance qui
vembre. Quant à l'extrait de naissance qui
manquait encore à cette date, il ne figure pas
au de ssier de Leconte de Lisle. Fut-il préprésenté, je ne le crois pas, car celui de tous les
senté, je ne le crois pas, car celui de tous les
autres étudiants est soigneusement épinglé
avec les autres pièces qui les concernent ; un
Ligne 1 315 ⟶ 1 166 :
faut attribuer ces variantes d'orthographe du
nom sur les registres des deux Facultés et ce
sont ces variantes sans doutede ute qui avaient été
cause des dernières difficultés pour le certicertificat d'études.
ficat d'études.
 
Quoi qu'il en soit, le 14 novembre 1838.
Ligne 1 323 ⟶ 1 173 :
à la Faculté des Lettres de Rennes.
 
« Encore que Rennes ne soit pas préciséprécisément une ville enchanteresse, a dit M, Henri
ment une ville enchanteresse, a dit M, Henri
Houssaye dans son discours de réception à
l'Académie Française, Leconte de Lisle s'y
Ligne 1 330 ⟶ 1 179 :
vivait. »
 
La ''Civitas Rubra'', l'ancienne ville aux mumurailles de briques rouges, Rennes n'est pas
« une ville enchanteresse ! » M. Henri Houssaye n'est pas le premier à décocher contre
railles de briques rouges, Rennes n'est pas
« une ville enchanteresse ! » M. Henri Hous-
saye n'est pas le premier à décocher contre
 
<center>
Ligne 1 341 ⟶ 1 188 :
la capitale de la Bretagne un de ces traits
malicieux que nous recevons et recueillons,
nous autres Rennais, avec une souriante trantranquillité. La mauvaise réputation de Rennes
quillité. La mauvaise réputation de Rennes
auprès des écrivains et des artistes ne date
pas d'aujourd'hui !
Ligne 1 348 ⟶ 1 194 :
Ce sont les Angevins qui ont commencé.
Baldric, évêque de Dol, appelait Rennes « un
nid de scorpions et un repaire de bêtes doudoublement féroces<ref>''Préface de la vie de Robert d'Arbrisset'', citée par
blement féroces<ref>''Préface de la vie de Robert d'Arbrisset'', citée par
S. Ropartz dans ses ''Poèmes de Marbode'' traduits en vers
français.</ref>. » Son compatriote et ami
Ligne 1 355 ⟶ 1 200 :
aimables, une satire contre notre ville, qui
s'aggrave de cela qu'il fut évêque de Rennes
(on aimerait à croire que ce poème fut antéantérieur à son épiscopat) et de ceci qu'elle est
rieur à son épiscopat) et de ceci qu'elle est
écrite en vers catapultins<ref>M. Léon Ernault, dans son livre ''Marbode, sa vie et ses
œuvres'', cite tel vers de notre évêque :
Ligne 1 362 ⟶ 1 206 :
qui pourrait servir d'inscription sur sa catapulte dirigée contre
Rennes ou d'épigraphe à ce méchant poème.</ref>. M. Henry Houssaye,
qui est un vrai lettré, ne les lira pas sans plaiplaisir. Voici ce morceau, curieux de facture, où la
sir. Voici ce morceau, curieux de facture, où la
consonne d'appui et la de uble assonnance et
la triple répétition pourraient faire envie aux
Ligne 1 394 ⟶ 1 237 :
C'est une boutade, a dit un Rennais,
Alphonse Marteville (1), qui en a essayé une
traduction, et cet ami et contemporain de LeLeconte de Lisle ajoute, en parlant de la ville
conte de Lisle ajoute, en parlant de la ville
qu'habitait le jeune étudiant en droit : « Qui
reconnaîtrait aujourd'hui (vers 1840) la ville
Ligne 1 501 ⟶ 1 343 :
a senti la nécessité. En reproduisant le poème
de Marbode dans l'édition de 1708, il écrivait :
''Ne Redonenses indigenas, tot nominibus et virtutivirtutibus nunc illustres, XXdere voluisse, videremur.''
bus nunc illustres, ??dere voluisse, videremur.''
Nous ne voudrions pas, nous aussi, blesser
nos compatriotes, non moins vertueux et non
moins illustres maintenant qu'au dix-huitième
siècle... et avant ! car ce ''nunc'' de Beaugendre
n'est pas sans impertinence pour les contemcontemporains de Marbode. Nous ne sommes pas au
porains de Marbode. Nous ne sommes pas au
bout cependant du chapelet des méchancetés
débitées contre Rennes et les poètes vraiment
ont abusé contre nous de leur droit à l'irritairritabilité.
bilité.
 
Elle est encore d'un compatriote Breton,
d'un Morlaisien, Charles Alexandre, celle bou-boutade qui n'est pas sans valeur... poétique.
tade qui n'est pas sans valeur... poétique.
 
<center>
Ligne 1 547 ⟶ 1 385 :
:Semblent des mâts noyés dans l'océan des bois.
 
Un Rennais, M. Raoul de la Grasserie, sasavant de ublé d'un poète, n'a pas été clément
vant de ublé d'un poète, n'a pas été clément
pour sa ville natale :
 
Ligne 1 601 ⟶ 1 438 :
</center>
 
de son œuvre imprimée<ref>''Ait grand air'', poésies. </ref> ou inédite, le panépanégyriste de Rennes, non pas de ses habitants,
gyriste de Rennes, non pas de ses habitants,
mais de sa nature et surtout, — il n'a que cela
de commun avec M. de la Grasserie, — de son
Ligne 1 609 ⟶ 1 445 :
Son Thabor avec ses marronniers et ses
enfants, son Jardin des Plantes avec ses vieux
chênes et ses oiseaux, lui ont inspiré ses meilmeilleurs vers.
leurs vers.
 
Ah ! ce Thabor, Hippotyte Lucas aussi l'a
chanté dans ses ''Heures d'amour'', mais en amouamoureux, pour les yeux de sa bien-aimée, car
reux, pour les yeux de sa bien-aimée, car
c'est elle qu'il suivait partout à travers Rennes
jusqu'à ''notre Musée''. Où M. Taine a vu des
Ligne 1 621 ⟶ 1 455 :
il cherche partout la bien aimée, et partout
il ne trouve qu'Elle; le reste est indifférent.
Les rues ou elle passe ne sont que ''vieilles'', l'ééglise où elle entre n'est que ''vénérée'', le porche
glise où elle entre n'est que ''vénérée'', le porche
qu'elle franchit n'est que sombre.
 
Ligne 1 648 ⟶ 1 481 :
peu d'anachronisme dans cette admiration, la
régularisation de la place du Palais étant
toute moderne, mais le Palais, sans doutede ute,
méritait à lui seul cette stupeur élogieuse,
d'autant que le jeune voyageur était natif et
Ligne 1 674 ⟶ 1 507 :
 
quelque côté que vous tourniez vos pas, vous
rencontrez des allées verdoyantes ou des jar-jardins fleuris, ouvrant devant vous leurs oasis
dins fleuris, ouvrant devant vous leurs oasis
embaumées. Aussi conçoit-on facilement, en
parcourant ses parcs publics, que Rennes ait
Ligne 1 712 ⟶ 1 544 :
Rennes qu'Évarisle Boulay-Paty, qui y fit son
droit, a écrit : « Pauvres villes, où point çà
et là un artiste inconnu, poète, peintre, mu-musicien, sculpteur, qui s'échappe bien vite et
qu'elles sont tout à coup stupéfaites d'entendre proclamer grand homme, dans ce
sicien, sculpteur, qui s'échappe bien vite et
qu'elles sont tout à coup stupéfaites d'en-
tendre proclamer grand homme, dans ce
Paris, le Capitale des Reaux-Arts ! Bonnes
gens de compatriotes, qui, après avoir dénidénigré sans jugement le jeune homme, s'enor-
gueillissent de l'homme fait sans enthousiasme et qui, après avoir tenu l'aigle dans
gré sans jugement le jeune homme, s'enor-
gueillissent de l'homme fait sans enthou-
siasme et qui, après avoir tenu l'aigle dans
leurs mains sans en reconnaître les plumes,
le voient avec étonnement planer haut et
Ligne 1 733 ⟶ 1 561 :
n'avez-vous pas profité du voyage fait pour
rester quelque temps dans la vieille ville qui
vous a inspiré des vers si jolis ? On aime, mal-malgré Paris et le temps qui nous presse, à parcourir ces rues tranquilles qui rappellent le
gré Paris et le temps qui nous presse, à par-
courir ces rues tranquilles qui rappellent le
passé ; on retrouve mille émotions dans les
lieux chéris autrefois. La belle jeunesse nous
Ligne 2 016 ⟶ 1 842 :
dit un de ses biographes, l'abbé Quérard, il
eût peut-être été l'un des plus grands poètes
de son siècle, » Mais, par modestie, sans doutede ute,
comme saint Mathurin qui aurait pu être le
Bon Dieu et ne voulut pas, le Vénérable Mont-
Ligne 2 183 ⟶ 2 009 :
Il est vrai que le souvenir du Canal est as-
socié par Boulay-Paty aux souvenirs chers « de
sa mère et de sa sœurs?ur...
 
:Elle, ma sœurs?ur et moi, nous descendions les Lices.
 
Et, la rime y aidant un peu, — chez Boulay-
Ligne 2 203 ⟶ 2 029 :
de nos jours pour la seconde fois.
 
:Le beau qui meurt, poète, à tes pleurs doitde it s'attendre.
 
Et les pleurs de Boulay-Paty n'ont pas man-
Ligne 2 785 ⟶ 2 611 :
80 BRETONS DE LETTRES
 
taient sans doutede ute des étrangers de passage que
Manet a photographiés dans nos rues. Voyons
maintenant ce qu'il pense des Rennaises ; un
Ligne 2 843 ⟶ 2 669 :
Quant aux leçons d'histoire, il en aime l'étude,
ajoutait M. Leconte de L'isle ; une Faculté des
Lettres étant établie à Rennes, je ne doutede ute pas
qu'il ne se rende à ces conférences avec plai-
sir. M. Salvandy a bien mérité de la patrie.
Ligne 2 936 ⟶ 2 762 :
que je suis, écrivait-il à la date du 10 juin
1839, silencieux que tu es toi-même, dans la
crainte sans doutede ute de trop m'affliger, je courbe
la tête, priant Dieu qu'il s'amende, plus en
état, à des distances pareilles, de pleurer,
Ligne 2 972 ⟶ 2 798 :
payé ça, mon cher confrère ? vous vous êtes
 
Et j'entends encore Leconte de Liste, me rapportant sa ré-
ponse, qui prenait des proportions épiques ??:ues :
 
- Confrère ! Confrère !… Le misérable ! riche comme il est
et poète comme il n'est pas !</ref> et dont la postérité ne connaîtra
jamais sans doutede ute l'inventaire, — les comé-
diens, seuls, ont de ces honneurs-là ! — je ne
sais si on a retrouvé la flûte dont retentirent
les échos de sa chambre d'étudiant à Rennes,
et certaine pipe et certaines lunettes. Et ce-
pendant flûte, pipe et lunettes, car c'était une
pipe et des lunettes alors, ont joué un rôle
Ligne 2 987 ⟶ 2 813 :
 
Un de ses premiers ennuis lui est venu de
ces lunettes et de cette pipe : il dut ses pre-
mières joies musicales, — ses dernières sans
doute, car il goûtait peu la musique vers la fin