« La Princesse de Clèves (édition originale)/Deuxième partie » : différence entre les versions
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— « Vous
— « Un ſoyr qu’il devait y avoir une comédie au Louvre, & que l’on n’attendait plus que le Roy & madame de Valentinois pour commencer, l’on vint dire qu’elle s’était trouvée mal, & que le Roy ne viendrait pas. On jugea aiſément que le mal de cette ducheſſe était quelque démeſlé avec le roi. Nous ſavions les jalouſies qu’il avait eues du maréchal de Briſſac, pendant qu’il avait été à la cour ; mais il était retourné en Piémont depuis quelques jours, & nous ne pouvions imaginer le ſujet de cette brouillerie.
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— Je vous l’avouerais ſi je le ſavais, repartit madame la dauphine, & je le ſaurais s’il était véritable. Ces ſortes de paſſions n’échappent point à la vue de celles qui les cauſent ; elles s’en aperçoivent les premières. Monſieur de Nemours ne m’a jamais témoigné que de légères complaiſances ; mais il y a néanmoins une ſi grande différence de la manière dont il a vécu avec moy, à celle dont il y vit préſentement, que je puis vous répondre que je ne ſuis pas la cauſe de l’indifférence qu’il a pour la couronne d’Angleterre.
— « Je m’oublie avec vous, ajouta madame la dauphine, & je ne me ſouviens pas qu’il faut que j’aille voir Madame. Vous
Après ces paroles, madame la dauphine quitta madame de Clèves, et, le lendemain, le mariage de Madame fut ſu de tout le monde. Les jours ſuivants, le Roy & les reines allèrent voir madame de Clèves. Monſieur de Nemours, qui avait attendu ſon retour avec une extreſme impatience, & qui ſouhaitait ardemment de luy pouvoir parler ſans témoins, attendit pour aller chez elle l’heure que tout le monde en ſortirait, & qu’apparemment il ne reviendrait plus perſonne. Il réuſſit dans ſon deſſein, & il arriva comme les dernières viſites en ſortaient.
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— « La Reine me quitta après m’avoir dit ces paroles ſans attendre ma réponſe. Vous pouvez croire que je demeurai l’eſprit bien rempli de ce qu’elle me venait de dire. Les deux jours qu’elle m’avait donnez pour y penſer ne me parurent pas trop longs pour me déterminer. Je voyais qu’elle voulait ſavoir ſi j’étais amoureux, & qu’elle ne ſouhaitait pas que je le fuſſe. Je voyais les ſuites & les conſéquences du parti que j’allais prendre ; ma vanité n’était pas peu flattée d’une liaiſon particulière avec une Reine, & une Reine dont la perſonne eſt encore extreſmement aimable. D’un autre coſté, j’aimais madame de Thémines, & quoyque je luy fiſſe une eſpèce d’infidélité pour cette autre femme dont je vous ay parlé, je ne me pouvais réſoudre à rompre avec elle. Je voyais auſſi le péril où je m’expoſais en trompant la Reine, & combien il était difficyle de la tromper ; néanmoins, je ne pus me réſoudre à refuſer ce que la fortune m’offrait, & je pris le haſard de tout ce que ma mauvaiſe conduite pouvait m’attirer. Je rompis avec cette femme dont on pouvait découvrir le commerce, & j’eſpérai de cacher celuy que j’avais avec madame de Thémines.
— « Au bout des deux jours que la Reine m’avait donnez, comme j’entrais dans la chambre où toutes les dames étaient au cercle, elle me dit tout haut, avec un air grave qui me ſurprit : « Avez-vous penſé à cette affaire dont je vous ay chargé, & en
— Oui, Madame, luy répondis-je, & elle eſt comme je l’ay dite à Votre Majeſté.
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