« Concours académiques et du livre de M. Matter » : différence entre les versions

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EvidemmentÉvidemment, sans ces deux Académies M. Matter n’écrivait pas, et j’ai eu tort de condamner d’une façon absolue la pente à se laisser aller aux tentations extérieures ; l’auteur dont nous parlons avait besoin d’une excitation étrangère ; il était sans doute par lui-même tout ce qu’il s’est manifesté successivement, historien, philosophe, théologien, jurisconsulte, publiciste, orateur ; mais il attendait une impulsion : les sujets académiques furent pour lui ce que furent pour Achille les armes présentées par Ulysse.
 
M. Matter a commencé par écrire, sur la proposition de l’Académie des inscriptions, un essai historique touchant l’école d’Alexandrie : je ne m’étonnerais pas si ce sujet eût séduit un penseur ; il est grand et occupe une place importante dans l’histoire des idées humaines. Cette lutte, ce dernier effort du paganisme qui résume ses forces, ses traditions, ses souvenirs, ses théories et ses systèmes, pour en opposer le cortège et l’armée à l’invasion d’une doctrine nouvelle, qui veut se soumettre la société par la puissance mystérieuse et la démocratique simplicité de sa morale ; la figure, le caractère et le génie de Proclus, le mysticisme extatique de Plotin, son maître Ammonius Saccas, le conflit de l’hébraïsme et du paganisme pouvaient à coup sûr tenter un esprit philosophique, curieux des leçons contenues dans le passé du monde. Quand le livre de M. Matter parut, je me rappelle y avoir avidement couru, pour m’instruire un peu à fond de ce qui se passait véritablement dans l’intérieur de cette école d’Alexandrie. Mon mécompte fut grand ; au lieu d’une profonde, érudite et intelligente histoire, je ne trouvai qu’une sèche et maigre nomenclature de noms d’hommes, de titres d’ouvrage ; mais la raison des opinions, la diversité et le mérite des systèmes, la variété des sciences explorées, le caractère et la convenance avec leurs siècles des personnages, ne figuraient pas dans l’ouvrage couronné. Et encore je ne parle ici que de la face des choses dont j’étais le plus curieux ; je ne relève pas le développement des sciences exactes et de la critique littéraire, également laissé sans appréciation et sans vie.
 
Plus tard le gnosticisme, ce christianisme plus raffiné, plus idéalisé, qui tendait à se séparer complètement de l’hébraïsme et qu’admirent secrètement les plus savans pères de l’église, fut offert à M. Matter par l’Académie des inscriptions comme un nouvel objet d’élucubration.
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d’élucubration. Cette fois l’auteur lauréat fut moins malheureux ; il pouvait s’appuyer sur d’excellens travaux que lui prêtait l’Allemagne ; et son histoire critique du gnosticisme vaut beaucoup mieux que son essai sur l’école d’Alexandrie. Après ces deux ouvrages couronnés l’un en 1817, l’autre en 1826, l’auteur parut un instant avoir enfin mis la main sur l’aliment convenable à l’activité de son esprit, et vouloir se tenir à l’étude des idées philosophiques et religieuses, car en 1829 il publia une ''Histoire universelle de l’église chrétienne'', dont les deux premiers volumes ont paru. J’ai lu ce livre avec le même empressement que les deux autres ; c’est une compilation et un abrégé ; l’originalité individuelle et la sagacité philosophique m’en ont semblé absentes.
 
Il est à croire que M. Matter se cherchait encore quand l’Académie française proposa son prix extraordinaire : il paraît que l’histoire de la philosophie ancienne et l’histoire du christianisme ne lui suffisaient pas, et qu’il avait pour la science de la législation un penchant secret qui se fit jour enfin. Suivons-le dans cette autre carrière, et tâchons de reconnaître s’il a trouvé définitivement ce qui convient à son esprit ; non que nous veuillions le moins du monde comprimer l’essor de M. Matter, et si un nouveau programme académique vient encore lui révéler une nouvelle aptitude, nous y souscrivons par avance.
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L’influence des mœurs sur les lois dérive de la nature des unes et des autres : partout les mœurs ont imprimé aux lois leur nature, leur caractère et leur physionomie ; elles influencent leur origine, leur nature et leur esprit ; elles agissent sur les institutions politiques et les formes de gouvernement qui régissent les peuples : ainsi il ne faudra pas d’institutions belliqueuses chez un peuple qui aura les goûts, les habitudes de l’industrie et du commerce. Après l’influence des mœurs sur les lois générales d’une société, l’auteur passe à l’influence sur les lois civiles ou les lois ordinaires : il se demande si cette influence incontestable est un bien ou un mal ; il découvre que les bonnes mœurs inspirent les bonnes lois, qu’elles ont la puissance de conserver ces dernières et de les maintenir en vigueur ; que là où il n’y aurait point de bonnes mœurs, les lois seraient impuissantes et nulles ; que les bonnes mœurs amènent l’amélioration progressive des lois, que par cela seul qu’elles sont bonnes, elles portent en elles-mêmes un élément de progression qui tend sans cesse à se développer ; que le développement des mœurs et celui des lois sont si naturellement parallèles, que toute révolution, toute amélioration sensible dans les premières amène une révolution, une amélioration analogue dans les secondes. Telle est
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la puissance des mœurs, que là même où elles sont peu fécondées par les lumières de la civilisation, leur action politique est sensible ; enfin sur ce point, l’auteur arrive à cette conclusion neuve, dont nous citerons les termes : « Sous quelque point de vue que nous examinions l’influence des bonnes mœurs sur les lois présentes, absentes, bonnes, mauvaises, neuves ou surannées, cette influence est également admirable, également digne des plus sérieuses méditations de l’ami des hommes, du citoyen, de l’homme d’état, du législateur, du moraliste, du prince, de l’écrivain, du prêtre et du philosophe. » L’influence des mauvaises mœurs sur les lois devient à son tour l’objet des méditations de M.Matter. ll professe qu’elles altèrent les facultés morales et intellectuelles des peuples, que les lois sont mauvaises quand les mœurs le sont, que les mauvaises mœurs sapent par leur base les institutions politiques, qu’elles en corrompent les meilleures, qu’elles en font des corps sans vie et sans âme, qu’elles y glissent leur poison, et que toujours la ruine des lois, des empires suit la ruine des institutions et des mœurs. Après ces rares découvertes, l’auteur arrive à cette conclusion non moins originale : Que les bonnes mœurs inspirent et conservent les bonnes lois, réforment les mauvaises et les épurent, font prospérer les institutions et les empires ; que dans tous les temps aussi, les mauvaises mœurs altèrent les bonnes lois, corrompent les meilleures institutions, et mènent à leur ruine les peuples les plus célèbres, et que par conséquent la liaison des mœurs et des lois est intime. Mais l’influence des lois sur les mœurs semble à l’auteur plus difficile à déterminer que celle des mœurs sur les lois ; elle doit exister, elle existe, elle est attestée par l’histoire. Les lois générales et les institutions politiques des peuples exercent sur les mœurs leur influence. Un gouvernement démocratique tendra à rendre les mœurs démocratiques : un gouvernement aristocratique tendra à rendre les mœurs aristocratiques. De même pour la monarchie et la théocratie. Il n’est donc point de lois, conclut l’auteur, point d’institutions politiques dont l’influence morale ne soit digne à torts égards de l’attention du législateur et du moraliste ; Mais il est des circonstances qui déterminent et modifient l’influence des lois sur les mœurs ; d’abord cette action est plus forte en raison du caractère plus ou moins pur, et par conséquent plus ou
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ou moins imposant de la loi. L’influence des lois dépend encore du caractère et de la nature de l’autorité qui les rend ; elles dépendent aussi de l’époque où, elles sont rendues. Enfin lorsqu’elles sont mauvaises, elles ne sauraient exercer une grande action, et l’auteur conclut hardiment qu’elles ne sont pas bonnes. L’influence des lois est naturellement conforme à leur nature, l’action des bonnes lois est une action bonne en morale et en politique, l’action des mauvaises lois est aussi funeste en politique qu’en morale. Les bonnes lois sont les meilleures gardiennes des bonnes mœurs. Il ne faut pas trop les multiplier, pour qu’elles soient efficaces, il faut les appuyer sur les bonnes mœurs ; enfin, nouvelle conclusion originale, l’influence des bonnes mœurs et des bonnes lois les unes sur les autres est toujours heureuse, féconde en glorieux résultats pour les législateurs, pour les peuples et pour l’humanité. Mais rien n’est plus funeste que l’influence des mauvaises lois sur les mœurs. Pour comprendre toute l’étendue du mal produit par les mauvaises lois, il faut voir pourquoi elles sont mauvaises : elles sont mauvaises quand elles sont contraires à la nature de l’homme, quand elles sont contraires à la morale publique, quand elles sont trop sévères ; enfin elles sont mauvaises quand elles favorisent des passions mauvaises ; elles sont encore mauvaises quand elles sont entièrement contraires au génie du peuple qu’elles doivent gouverner. L’auteur consacre une dernière partie à donner des conseils au législateur : il lui recommande de s’attacher au sentiment, à l’idée et à la tendance qui domine chez la nation qu’il veut gouverner. Il lui signale l’éducation morale et politique des peuples comme un excellent moyen d’amélioration. Enfin l’éducation de la jeunesse lui paraît devoir être l’objet des méditations du législateur. Elle est grande la mission du législateur chargé de l’éducation de la jeunesse de l’éducation des peuples, de l’interprétation de leurs mœurs, de leurs lois, de leur génie et de leur tendance. Enfin, conclusion littérale et dernière de l’auteur, toujours s’épurent les mœurs et le perfectionnement des lois, s’appuyant toujours davantage les unes sur les autres ; se prêtant réciproquement un éclat plus pur et une puissance plus active, elles nous conduiront toujours plus près du terme de gloire et de prospérité auquel elles sont chargées par la Providence de nous conduire.
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III. RAPPORTS DES LOIS ET DES MOEURSMŒURS.
 
De leur action réciproque chez quelques peuples, dont l’histoire est marquée de caractères originaux.
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: - De la coutume.
 
 
: -
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: - De la raison philosophique.
 
: - De la tradition.