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{{journal|La fontaine de Boileau|[[Sainte Beuve]]|[[Revue des Deux Mondes]] T.3, 1843}}
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<center>A Madame la comtesse Molé</center>
Que le vieux villageois nomme aussi ''la Rachée'' <
::Mais aujourd’hui laissons tout sujet de satire; ▼
::A Bâville aussi bien on t’en eût vu sourire, ▼
::Et tu tachais plutôt d’en détourner le cours, ▼
::Avide d’ennoblir tes tranquilles discours, ▼
::De chercher, tu l’as dit, sous quelque frais ombrage, ▼
::Comme en un Tusculum, les entretiens du sage, ▼
::Un concert de vertu, d’éloquence et d’honneur, ▼
::Et quel vrai but conduit l’honnête homme au bonheur. ▼
::Ainsi donc, ce jour-là, venant de ta fontaine, ▼
::Nous suivions au retour les coteaux et la plaine, ▼
::Nous foulions lentement ces doux prés arrosés, ▼
::Nous perdions le sentier dans les endroits boisés, ▼
::Puis sa trace fuyait sous l’herbe épaisse et vive: ▼
::Est-ce bien ce côté? n’est-ce pas l’autre rive? ▼
::A trop presser son doute, on se trompe souvent; ▼
::Le plus simple est d’aller. Ce moulin par devant ▼
::Nous barre le chemin; un vieux pont nous invite, ▼
::Et sa planche en ployant nous dit de passer vite: ▼
::On s’effraie et l’on passe, on rit de ses terreurs; ▼
::Ce ruisseau sinueux a d’aimables erreurs. ▼
::Et riant, conversant de rien, de toute chose, ▼
::Retenant la pensée au calme qui repose, ▼
::On voyait le soleil vers le couchant rougir, ▼
::Des saules ''non plantés'' les ombres s’élargir, ▼
::Et sous les longs rayons de cette heure plus sûre ▼
::S’éclairer les vergers en salles de verdure, ▼
::- jusqu’à ce que, tournant par un dernier coteau, ▼
::Nous eûmes retrouvé la route du château, ▼
::Où d’abord, en entrant, la pelouse apparue ▼
::Nous offrit du plus loin une enfant accourue, ▼
::Jeune fille demain en sa tendre saison, ▼
::Orgueil et cher appui de l’antique maison, ▼
::Fleur de tout un passé majestueux et grave, ▼
::Rejeton précieux où plus d’un nom se grave, ▼
::Qui refait l’espérance et les fraîches couleurs, ▼
::Qui sait les souvenirs et non pas les douleurs, ▼
::Et dont, chaque matin, l’heureuse et blonde tête, ▼
::Après les jours chargés de gloire et de tempête, ▼
::Porte légèrement tout ce poids des aïeux, ▼
::Et court sur le gazon, le vent dans ses cheveux. ▼
▲<small>(1) Il est indispensable, en lisant la pièce qui suit, d’avoir présente à la mémoire la satire VI de Boileau à Lamoignon, dans laquelle il parle de Bâville et de la vie qu’on y mène. </small><br />
▲<small> (3) Une ''rachée'' on appelle ainsi les rejetons nés de la racine après qu’on a coupé le tronc. Les ormes qui ombrageaient autrefois la fontaine avaient probablement été coupés pour repousser en ''rachée'': dejà le nom. </small><br />
</poem>
:SAINTE-BEUVE.
:Au Marais, ce 22 août.
<references/>
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