« Bulletin de l’astronomie et des sciences pour 1853 et 1854 » : différence entre les versions

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La crainte de tomber dans une ennuyeuse énumération nous empêche d'exposer ici en détail tout ce qui a été fait depuis l'an dernier dans la mécanique, la physique, la chimie et les arts en général. Nous avons dit qu'aucune de ces découvertes qui attirent l'attention du monde entier n'avait été faite en 1853. Les physiciens ont varié de plusieurs manières la belle expérience de M. Foucault, où ''l'on voit la terre tourner'' sous un appareil auquel, chose paradoxale, le mouvement donne une fixité absolue d'orientation. Les recherches chimiques sur la composition de l'air et sur l'alimentation et les produits agricoles ont amené d'utiles résultats. La médecine a continué d'employer et d'étudier les agens anesthésiques, c'est-à-dire qui suppriment la douleur. Les fameux bateaux américains, ayant pour moteur l'air chaud en place de la vapeur, n'ont point encore conquis le rang qu'on leur promettait ou plutôt qu'ils se promettaient eux-mêmes. Enfin, pour parler de ce qu'on n'a pas fait, on n'a point encore essayé en France et dans les autres pays l'emploi des chemins de fer du système de M. le baron Séguier, avec locomotive légère prenant point d'appui sur un rail intermédiaire, et susceptibles dès lors de franchir toutes les pentes, réduisant ainsi les frais d'exploitation comme ceux d'établissement à des proportions bien inférieures à ce qu'ils sont aujourd'hui. Nous reviendrons dans une étude spéciale sur ce point très important de la science pratique, qui rendra toutes les localités accessibles aux voies de fer.
 
Nous avons déjà dit aux lecteurs de la ''Revue'' qu'un câble sous-marin contenant quatre fils électriques a été établi entre la France et l'Angleterre au travers du Pas-de-Calais. Depuis trois ans, cette communication télégraphique transmet aux journaux de Londres et au gouvernement anglais les nouvelles du continent sans qu'aucune détérioration apparaisse encore dans ce télégraphe, qui a fait tant d'honneur, sinon de profit, au persévérant M. Brett, dont la conviction et l'obstination ont pu vaincre toutes les résistances et toutes les apathies pour rattacher sa ''pairie ingrate'' au continent. La science n'était pas moins intéressée à la réussite de M. Brett, pour rattacher par sa longitude exacte l'observatoire de Greenwich à celui de Paris <ref> Je suis très fier de voir mon nom mentionné honorablement à l'occasion de l'établissement de la communication télégraphique sous-marine, et je regrette de voir oublié le nom de M. l'abbé Moiguo, qui s'est montré encore plus actif que moi pour aplanir les obstacles devant M. Brett. ''MM. Arago and Babinet, and the members of the Bureau des Longitudes, and the Institut, have shown the gréatest interest in the completion of the connexion between Paris and Greenwich''. (1Royal Astronomical Society, ''Report of the council'', fébruary 13, 1852.) </ref>. L'année dernière a vu s'établir deux nouvelles voies de télégraphie sous-marine entre la Grande-Bretagne et l'Europe. L'une va de Douvres à Ostende et fait communiquer les chemins de fer et les télégraphes électriques de Belgique et d'Allemagne avec ceux d'Angleterre; l'autre traverse la mer d'Allemagne, de Hollande en Angleterre, à la hauteur de La Haye, et par son succès rend assurée la traversée télégraphique sous-marine de France en Algérie par la Corse, la Sardaigne et la côte voisine d'Afrique, traversée qui est aujourd'hui en voie d'exécution.
 
Personne n'ignore que c'est en Amérique que l'on a commencé à faire servir le télégraphe à la détermination exacte des longitudes. Dans des contrées où les montagnes et les fleuves n'ont point de nom et où les habitans arrivent pour la première fois, la position géographique seule fixe l'existence d'un établissement, d'une commune, d'une ville future. Les compagnies de télégraphie électrique y vendent aux communes leur longitude comme toute autre marchandise d'utile consommation. En Europe, le télégraphe électrique est appelé à rendre les plus grands services pour la détermination très exacte du même élément de position des points remarquables du globe. Une communication avait donc été établie entre l'observatoire anglais de Greenwich et celui de Paris. L'astronome royal d'Angleterre, M. Airy, après avoir fait, dans les premiers mois de 1853, d'heureux essais entre Londresn Cambridge et Edimbourg, se préparait à entreprendre conjointement avec M. Arago et les astronomes français la jonction des deux grands observatoires des deux nations, lorsque la maladie de M. Arago et plus tard la perte irréparable que les sciences ont faite en sa personne sont venues ajourner cette importante opération scientifique. Elle vient d'être accomplie tout récemment entre les observatoires de Greenwich et de Bruxelles par le télégraphe sous-marin de Douvres à Ostende grâce à l'activité de l'astronome royal de Belgique, M. Quételet, dont les travaux ont fait du reste autant d'honneur a sa patrie dans la météorologie que dans l'astronomie elle-même. Grâce à notre bureau des longitudes, la France n'aura dans quelques semaines rien à envier à la Belgique, ni l'observatoire de Paris à celui de Bruxelles. On espère pouvoir établir de Londres jusqu'à Berlin, Vienne et Florence, une communication unique et directe. Il nous semble que ce but serait atteint bien plus sûrement et facilement en plaçant la pile électrique au milieu de l'intervalle que l'on veut franchir, et que les batteries voltaïques du bureau télégraphique de Strasbourg transmettraient des signaux sans aucune chance de trop grande déperdition jusqu'aux dernières limites des fils européens actuels tant vers l'orient que vers l'occident. Ce sera une opération capitale pour la détermination de la figure de la terre.
 
La grande exposition de l'industrie française de l'année prochaine nous amènera sans doute quelques découvertes remarquables dans les arts. L'année 1853 a vu l'éclairage électrique prendre rang parmi les moyens de remplacer la lumière du jour pour des travaux de chantier en plein air continués d'urgence pendant la nuit. Sur plusieurs de nos théâtres de la capitale, on a introduit ces effets de lumière électrique ''qui font spectacle''. Nous croyons que la science et l'industrie n'ont pas encore dit leur dernier mot sur cette puissante illumination aussi facile à établir partout qu'efficace dans son action; mais c'est surtout pour ''la télégraphie non électrique'' que son emploi nous semblerait utile. Puisque avec les seuls mouvemens à droite et à gauche de la pointe d'une aiguille aimantée on transmet une dépêche, on le ferait également bien avec deux points lumineux électriques, susceptibles de briller l'un au-dessus de l'autre, ou l'un à côté de l'autre. Les trois indications de la pointe de l'aiguille aimantée, savoir : - en place, - à droite, - à gauche, seraient remplacées par les trois indications suivantes : - une seule lumière, - deux lumières l'une sur l'autre, - deux lumières l'une à côté de l'autre. Avec ce système télégraphique, si facile à dissimuler, il n'est presque point de cas où une place assiégée ne pût communiquer avec l'extérieur, comme les forts isolés avec le corps de la place, ou bien les navires stationnaires en mer avec la côte. Nous ne faisons aucun doute que si la télégraphie électrique n'eût pas été inventée ou plutôt mise en pratique avec les chemins de fer, le système télégraphique des feux électriques n'eût été adopté partout, et qu'il ne soit dès aujourd'hui exclusivement applicable à toutes les contrées privées de voies ferrées et de fils électriques.
 
 
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<small>(1) Je suis très fier de voir mon nom mentionné honorablement à l'occasion de l'établissement de la communication télégraphique sous-marine, et je regrette de voir oublié le nom de M. l'abbé Moiguo, qui s'est montré encore plus actif que moi pour aplanir les obstacles devant M. Brett. ''MM. Arago and Babinet, and the members of the Bureau des Longitudes, and the Institut, have shown the gréatest interest in the completion of the connexion between Paris and Greenwich''. (Royal Astronomical Society, ''Report of the council'', fébruary 13, 1852.) </small><br />
 
 
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La place fait observer, à la louange des théories astronomiques, que la science du ciel est la seule qui jusqu'ici puisse avec certitude prédire les événemens futurs. A la vérité, ces événemens ne sont pas de ceux qui passionnent la société. Qu'importe à la plupart des hommes de savoir que dans plusieurs milliers d'années notre étoile polaire actuelle cédera sa place à la brillante étoile de la Lyre, et que des astres cachés aujourd'hui sous l'horizon de Paris y reparaîtront pour quelques dizaines de siècles? Cependant les éclipses, les marées, les mouvemens du soleil et de la lune, ceux des planètes et l’aspect variable des configurations célestes qui brillent dans chaque, saison attirent encore l'attention du public non citadin, et surtout de ceux qui sont pourvus d'une lunette. L'indication de ce qu'il y a à voir dans le ciel intéresse toujours les questionneurs qui s'adressent à ceux qu'ils croient initiés à ces infaillibles pronostics des mathématiques. Faisons de l'astronomie curieuse pour cette année; mais notons que d'ici à 1861 une série d'observations uniques sur les planètes, les comètes, les éclipses, les particularités physiques des planètes, du soleil et des étoiles, viendra réclamer l'attention des amateurs.
 
Les éclipses cette année n'offriront rien de curieux en France et en Europe. Les marées ne seront pas d'une très grande force; celles du 28 février, du 14 avril, du 13 et du 14 mai, du 9 et du 10 août, du 8 septembre et du 7 octobre seront les plus remarquables et amèneront assez d'eau vers Quillebeuf, à l'embouchure de la Seine, pour que les mascarets dont nous avons parlé dans la ''Revue'' (1)<ref> Voyez la livraison du 1er novembre 1852. </ref> fassent un spectacle unique de déploiement en grand des lunes motrices de la nature. Les marées de septembre et d'octobre seront au-dessus de la moyenne, et mériteront d'avoir des spectateurs parisiens témoins de ce beau phénomène naturel; c'est le même qu'observait, à ses grands périls, la flotte d'Alexandre à l'ouverture de l'Indus. «On était à la troisième heure du jour lorsque l'océan, soumis à des lois immuables, commença à envahir le fleuve et à le faire reculer. Les eaux, d'abord arrêtées, couraient ensuite vers leur source avec plus de rapidité que les torrens n'en ont en descendant des montagnes.» Suit l’énumération de tout ce que ce mascaret produisit d'accidens et de désordres pour la flotte échouée. Cette description de Quinte-Curce aurait pu littéralement être écrite aussi bien sur les rives de la Seine inférieure que sur les rives de l'Indus inférieur. Avis au lecteur sensible aux beaux spectacles de la nature obéissant à des forces étrangères à notre globe.
 
Les taches du soleil et les comètes seront aussi impossibles à prévoir que curieuses à observer. Les portraits daguerréotypes du soleil sont au premier rang d'utilité pour la théorie des taches du soleil, qui sont liées à la nature interne de cet astre. L'éclipse totale de soleil du 31 décembre 1861 nous dira sans doute bien des choses sur ces curieux problèmes physiques, attendons.
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BABINET, de l’Institut.
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<small>(1) Voyez la livraison du 1er novembre 1852. </small><br />
 
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BABINET, de l’Institut.