« La Bourse, la Spéculation et l’Industrie » : différence entre les versions

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Ce qui établirait surtout, et de la manière la plus convaincante l’importance des progrès industriels réalisés en France dans la période dont il s’agit, ce serait la comparaison du capital mobilier de 1836 avec celui de 1855. Malheureusement cette comparaison est bien difficile à faire : on peut toutefois, ce me semble, remarquer que beaucoup d’industries nouvelles, créées d’une époque à l’autre, sont représentées par un capital considérable, sans que les industries anciennes aient perdu de leur importance, au contraire. Ce fait constate donc non un déplacement de capitaux, mais la création d’un capital nouveau et un accroissement énorme de richesse mobilière et industrielle. Prenons pour exemple les chemins de fer : à l’exception de quelques petites lignes de Rhône et Loire, toutes les entreprises sont nouvelles. Or leur capital émis était en novembre 1851 de 1,406 millions actions et de 1,260 millions obligations, soit 2 milliards 600 millions, qui représentent au moins 4 milliards par suite de la prospérité de ces entreprises et de la plus-value des titres. Les sociétés de crédit ont un capital de 560 millions. Les compagnies d’assurances ont été créées avec 287 millions de capital, et leurs actions ont atteint un taux bien autrement important. Les compagnies de gaz, d’eaux de navigation, de mines, de glaces, de sucrerie, de métallurgie, de télégraphie les sociétés immobilières fondées dans ces dernières années, toutes les compagnies financières en un mot, représentent, avec celles qui datent d’avant 1836, un total de 13 millions d’actions en nombre et de 4 milliards de francs en valeur de souscription; et de 3 milliards d’obligations en nombre avec une valeur de 1,432 millions de francs émis. Toutefois, dans ce total, dont 351 sociétés anonymes absorbent à elles seules près de 2 milliards, la part du passé est très minime, de telle sorte que les 7 milliards de francs ''valeur d’émission'' des actions et obligations de ces diverses sociétés en commandite doivent être considérés, en presque totalité, comme un accroissement réel de la richesse industrielle du pays. Il y aurait encore d’ailleurs, pour avoir une idée complète de cet accroissement, à tenir compte de toutes les entreprises particulières que l’industrie et le commerce ont tentées sous la forme de sociétés en nom collectif, et qui ne figurent point par conséquent dans les chiffrés précédens.
 
Il est impossible, on ne saurait trop le répéter de tirer de ces calculs une conclusion parfaitement nette. Si l’on a pu circonscrire dans des limites assez exactes le mouvement de la spéculation sur les valeurs de bourse (1)<ref> Il est presque inutile de faire observer que les valeurs cotées à la Bourse ne sont pas le seul aliment de la spéculation : toutes les marchandises, les cotons, les blés, les esprits, etc., donnent lieu à des affaires de spéculation pure, à terme et à prime, aussi bien que la rente et les actions de chemins de fer. </ref>, on n’arrive pas à préciser de même les progrès du commerce et de l’industrie et à mettre en regard la marche parallèle de l’agiotage et du travail. Néanmoins il y à dans les résultats de l’activité industrielle en France depuis vingt années de quoi rassurer ceux qui ne se paient ni de mots ni de sentimens préconçus, et à côté de la spéculation, dont les élémens tendent visiblement à s’améliorer, les affaires réelles se sont développées dans une proportion qu’on pourrait se permettre de croire non pas seulement égale, mais très supérieure, — les chiffres même en font loi.
 
Ce n’est pas tout, et il ne faudrait pas seulement tirer de ce rapprochement un argument contre les arrêts portés par ceux qui confondent le mouvement fécond des affaires avec l’agitation stérile et coupable du jeu proprement dit. Il serait bon encore de prouver que l’industrie, en développant une activité si grande, n’a pas outrepassé ses forces et s’est inspirée de plus en plus de principes vrais et de sentimens généreux. Quel est le caractère de l’industrie moderne? On retourne souvent contre elle l’argument invoqué plus haut en faveur de la spéculation, et de même qu’on a pu dire à l’avantage de celle-ci qu’elle se confondait de plus en plus avec l’industrie, on se plaît souvent à condamner cette dernière comme une forme nouvelle de la spéculation proprement dite. Dans l’une et l’autre, c’est le même objet qui est en vue, le même but poursuivi, le même résultat d’un gain facile et prompt cherché et obtenu. Qu’il y ait du vrai dans ces reproches, que toutes les entreprises industrielles ne soient pas sérieusement méditées et pratiquées, on en saurait certes le nier. La situation des finances publiques dans une grande partie des états européens, le déficit des budgets, le nombre des emprunts; émis non-seulement par suite d’événemens politiques, mais encore pour suffire à la création de grands travaux entrepris peut-être avec trop de hâte, nous ont révélé déjà un malaise que de nouvelles complications pourraient changer en une situation des plus graves. Sans employer dans le même sens l’expression familière à M. Prudhon, il est évident que la ''liquidation'' n’est pas faite, et que l’Europe entière, états et particuliers, doit aviser au classement définitif de tous les titres qui représentent des entreprises plutôt en cours d’exécution qu’achevées, et donnant leurs résultats définitifs. D’autre part cependant, si l’industrie ne guérit pas, comme la lance d’Achille, les blessures qu’elle fait elle-même, ses progrès sont tels et peuvent s’étendre dans une proportion si indéfinie, que nous avons encore à parcourir une bien longue carrière avant d’arriver au terme où il convient de s’arrêter. Les chemins de fer, la télégraphie viennent à peine de laisser entrevoir les merveilles que leur diffusion doit produire; les continens s’apprêtent à ouvrir, à travers leurs espaces, des passages nouveaux à l’audace des peuples anciens; les empires jusqu’ici fermés voient tomber leurs murailles et les terres les plus lointaines semblant tressaillir à l’approche du génie de la civilisation moderne. Que de richesses promises, non pas à l’âpre convoitise des spéculateurs, mais au travail honnête de l’industrie! Devant de telles perspectives un peu trop d’empressement est excusable; d’ailleurs cette précipitation a su se contenir, chez nous, dans des limites plus étroites que partout ailleurs, et nous nous sommes signalés par des mérites qu’il serait injuste de méconnaître. Sans entrer à cet égard dans un examen qui exigerait de longs développemens, il suffit, pour constater la prudence, l’équité et le libéralisme de l’industrie et du commerce français, de constater leur tenue dans la crise actuelle, l’amélioration incontestable du sort des ouvriers, les rapports qui deviennent de plus en plus étroits avec les nations voisines, enfin le concours que nous prêtons à l’étranger sous la forme d’entreprises de tout genre, parmi lesquelles l’établissement des chemins de fer tient le premier rang.
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BAILLEUX DE MARIZY.
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<small>(1) Il est presque inutile de faire observer que les valeurs cotées à la Bourse ne sont pas le seul aliment de la spéculation : toutes les marchandises, les cotons, les blés, les esprits, etc., donnent lieu à des affaires de spéculation pure, à terme et à prime, aussi bien que la rente et les actions de chemins de fer. </small><br />
 
<references>
 
BAILLEUX DE MARIZY.