« Histoire et description naturelle de la commune de Meudon » : différence entre les versions

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Mais revenons aux argiles qui nous offriront des minerais assez intéressants pour que j'aie cru devoir leur consacrer un assez long paragraphe. Elles renferment, comme tout le monde le sait, des pierres désignées sous le nom de meulières, recherchées, depuis un temps immémorial, pour les constructions dans les lieux bas et humides à cause de leur inaltérabilité et d'une porosité qui les rend si propres à recevoir la chaux hydraulique. On voit encore dans les bois de Gallardon et dans les Bruyères de Sèvres, ces dernières ayant appartenu autrefois au domaine de la couronne, de nombreux trous remplis d'eau croupissante, d'où l'on a extrait, m'a-t-on assuré, une partie des pierres qui entrent dans la construction des murs, des terrasses, etc., du parc de Versailles. L'exploitation de cette roche dans toutes les localités qui en renferment, n'a pas discontinué ; la consommation en est même devenue effrayante ; la ville de Paris s'est d'abord fait avec cette roche une haute ceinture de neuf lieues de longueur ; elle s'est ensuite élevé des abattoirs, des marchés, que sais je ? Le choléra-morbus lui a valu en moins de cinq ans vingt-cinq à trente lieues d'aqueducs construits exclusivement encore avec les mêmes matériaux ; enfin, loin d'en voir diminuer l'emploi, on en tire aujourd'hui de tous les côtés, à quinze ou vingt lieues à la ronde, pour revêtir les fortifications de Paris sur une étendue non moins grande. Encore deux ou trois entreprises de ce genre et cette roche deviendra d'une rareté extrême aux environs de Paris ; car il faut bien se persuader qu'elle ne se reproduit pas plus que le charbon de terre, ainsi que beaucoup de personnes le pensent sérieusement : « ''Non crescunt lapides,'' » a dit Linné. Du reste, il n'en resterait pas pour graine : on l'exploite maintenant avec le plus grand soin, et les anciennes fouilles sont même reprises avec avantage.
 
Quoi qu'il en soit, cette roche ne jouit pas partout des propriétés qui la font rechercher pour prendre le mortier et résister au boulet au moins aussi bien que des briques ; elle n'est pas toujours poreuse, et ce n'est guère que sur le bord des grands plateaux qu'elle est le plus cellulaire et conserve le nom de meulière, tandis qu'elle devient compacte et s'appelle caillasse<ref>Ces deux noms lui sont imposés parles carriers de Meudon, qui prétendent y voir deux espèces de pierres bien distinctes, tandis que ce ne sont réellement que deux variétés de la même roche, considérée géologiquenent.</ref> vers le centre ; on le concevra aisément si l'on a égard à la manière dont jusqu'à présent on a supposé que la meulière s'est formée. L'explication que je vais chercher à en donner est susceptible, il est vrai, de recevoir un grand ébranlement, depuis qu'on a reconnu que l'électricité joue un si grand rôle dans la cristallisation, le départ ou l'homogénéité de tant de substances, telles que celles des filons dans les roches primordiales, tels que les silex dans le calcaire sédimentaire, les pyrites dans les argiles, etc., ces derniers ayant évidemment fait partie intégrante des dépôts informes dans lesquels ils se trouvent. En attendant que l'électrochimie prévale dans ce cas-ci, si nous ne consultons que ce qui se passe dans tout dépôt obéissant purement et simplement aux lois de la pesanteur, et si je m'étaie surtout de ce que j'ai observé près des Geysers en Islande<ref> ''Description géologique de l'Islande et du Groënland'', page 180, dans le voyage scientifique de la corvette ''la Recherche'', pendant les année»années 1835 et 1836.</ref>, nous dirons que la matière des meulières, primitivement gélatineuse, devait se déposer confusément sur les bords des marais, de là sa porosité ; et tranquillement vers le centre, de là sa compacité ; c'est pour la même raison qu'on ne trouve guère de traces d'animalisation (lymnées, planorbes, rhyzômes de nénuphar, graines de kara, etc.) que sur les rives de ces anciens lacs d'eau douce, comblés aujourd'hui, tandis qu'on en cherche vainement vers le centre, là où la profondeur des eaux et l'abondance de la silice qui se précipitait n'auraient pas permis à des animaux et à des végétaux de vivre.
 
D'après les considérations que je viens de donner relativement à la formation des meulières d'eau douce, je conseillerai, quand on voudra les obtenir poreuses, de les rechercher dans la ceinture des plateaux qui les recèlent, et de s'abstenir, en tous cas, de fouiller les pentes inclinées où elles n'ont pu se former dans cette situation ; si l'on en trouve, elles sont ordinairement en fragments provenant des éboulements du plateau supérieur ot disséminées dans une terre argilo-sablonneuse.