« Histoire et description naturelle de la commune de Meudon » : différence entre les versions

Contenu supprimé Contenu ajouté
Aucun résumé des modifications
Aucun résumé des modifications
Ligne 847 :
Grâce à ce que le soleil vient presque tous les jours dorer les coteaux de Meudon, et à la puissance d'un engrais connu sous le nom de gadoue que fournissent les rues de Paris, et qui, s'il fume bien la terre, ne parfume guère, il faut l'avouer, l'air du pays, on récolte, dis-je, du vin très convenable pour les personnes qui veulent s'exciter l'appétit. Il est très apéritif et possède un certain bouquet ou goût de terroir qui n'est pas à dédaigner ; avec du soin on en fait un vin clairet très agréable ; et, afin de rassurer mes lecteurs qui pourraient m'opposer celui de Surêne, je m'empresse de leur rappeler qu'au dire de Pline les vins de la Gaule ont été autrefois recherchés en Italie : c'est qu'à cette époque on visait moins à la quantité aux dépens de la qualité, qu'aujourd'hui.
 
L'olivier d'Europe (''Olea europœaeuropaea''), qui vient quelquefois en pleine terre à une latitude plus élevée que la nôtre, en Angleterre, par exemple, et qui paraît même avoir été cultivé avec quelque succès dans Lutèce, au temps des Romains, n'aurait-il pas réussi également à Meudon, il y a un siècle et demi environ ? C'est ce qu'on serait tenté de croire, d'après ce vers de l'abbé du Jarry :
 
::''Vous n'étalez pas moins d'appas,''
::''Ombrages chéris de Pallas !''<ref>''Ode'' précitée.</ref>
 
Cependant j'aime mieux supposer que ces ombrages chéris de Minerve ne sont autre chose que ceux des chênes consacrés à Jupiter, son père.
Ligne 862 :
Passons maintenant en revue les principaux arbres que la nature et la main des hommes ont disséminés sur tout le territoire de Meudon.
 
La belle propriété du général JacqueminetJacqueminot, quoique contiguë au village, n'en renferme pas moins un beau groupe de chênes séculaires. Le rendez-vous de chasse du rond d'Ursine se fait remarquer aujourd'hui par un magnifique arbre du genre ''Fagus'', appartenant à la variété ''purpurea'', et qui, par son feuillage des plus sombres, est comme en deuil au milieu de ses congénères (''F. sylvatica''). Les conifères sembleraient aussi devoir très bien réussir, à en juger par les exemples suivants. De magnifiques allées de pins ornent le petit parc du château de Meudon ; il existe aussi des massifs de ces mêmes arbres pleins de vigueur, dans l'ancien enclos du couvent des Capucins, converti aujourd'hui en villas délicieuses ; dans celle de M. Joly, si heureusement située, on remarque deux pins rivalisant par leur port avec tout ce que l'on peut rencontrer de plus beau en ce genre dans les forêts de la Scandinavie ou de la Russie. Près de là, dans une autre jolie propriété, dont j'ai déjà parlé sous le nom de la Ferme , ce sont, au contraire, des sapins dans toute leur vigueur, et dont les longs rameaux s'abaissent avec grâce jusqu'à raser la terre. Les cèdres ne le cèdent point en beauté à ces arbres de forme pyramidale, et semblent aussi avoir rencontré une nouvelle patrie sur les hauteurs de Meudon. L'ancien parc de Bellevue en renfermait de superbes, et il en existe encore un groupe fort remarquable près du passage du chemin de fer ; la magnifique propriété de M. Scribe, à Montalet, est ornée aussi d'un arbre du même genre, qui rivalise presque avec le cèdre populaire du Jardin-des-Plantes, planté par Bernard de Jussieu en 1735. Dans la forêt même, au milieu du carrefour de l'Étoile-du-Pavé de Meudon, j'ai vu planter un de ces végétaux dont la tige s'élève déjà majestueusement et se couvre de strobiles ; enfin, dans l'agreste village de Vélizy, près de la porte du bois, rien n'est plus gracieux à voir qu'un de ces entants du Liban, dont les rameaux aplatis, en s'étendant au dessus d'une pauvre chaumière, semblent vouloir la mettre sous leur protection.
 
Indépendamment de tous ces arbres résineux au feuillage invariable comme celui des palmiers, d'autres végétaux, encore plus étrangers qu'eux, y réussissent à merveille. Ainsi, l'on voit le tulipier du Japon, égaler presqu'en hauteur les arbres de la forêt, et se couvrir de larges corolles rougeâtres autour de la Mare-Adam, dont le centre est occupé par un cyprès chauve (''Taxodium distichum'') de l'Amérique septentrionale, que l'on a bien tort d'élaguer. Je n'ai pas besoin de parler des catalpas ; dans les jardins de Bellevue, ils confondent partout leurs larges feuilles avec les feuilles profondément digitées du marronnier ; aux thyrses panachés de ce magnifique végétal de l'Inde<ref>: 0h ! que j'aime à vous voir, bois aux larges feuillages <br /> :: Dont l'Inde embellit ses rivages!..,. (<br /> ::: (''Ode'' traduite de Boutard sur Meudon.)</ref>, succèdent ceux d'un rouge éclatant de son congénère (''Œsculus rubicunda'') ; le Magnolia de la Chine y étale aussi ses pétales blancs comme l'albâtre ; enfin, à peine le Jardin-des-Plantes a-t-il eu reçu le ''Paulownia imperialis'' du Japon, que nous avons vu ici un de ses rejetons pousser à vue d'œil en pleine terre, et développer des feuilles qui contrastent singulièrement, par leur grande dimension, avec celles des autres arbres<ref>A propos de ces arbres exotiques, il m'est impossible de passer sous silence les magnifiques résultats oblenus par SI. Gabriel Pelvilain, de Meudon, dans le potager du château dont il est le jardinier en chef. Il s'y est livré depuis longtemps à la culture des ananas. J'ai été à même de voir ces végétaux dans des contrées où ils croissent en pleine terre, telles que le Sénégal, Cayenne et la Martinique, et je dois avouer que les nombreux élèves de M. Pelvilain, par la beauté, le volume et la saveur des fruits, me les rappellent parfaitement. Cet habile horticulteur, qui a remporté tous les prix que peuvent accorder les sociétés d'encouragement pour l'horticulture, est, je crois, le premier qui soit parvenu en France à obtenir des ananas de semis. Mais le plus remarquable de tous ses essais est, sans contredit, le bananier du paradis (Musaparasidiaca''Musa parasidiaca''), qui, au bout de dix-huit mois environ , laisse pendre un régime de toute beauté ; les bananes succulentes s'y pressent comme dans ceux des colonies, et leur belle teinte jaunâtre contraste de la manière la plus tranchée avec celle d'un vert foncé des immenses feuilles rubanées qui couronnent le figuier d'Adam.</ref>.
 
Comme partout ailleurs, on remarque dans la forêt de Meudon de très beaux chênes séculaires ; les plus remarquables se trouvent dans les lieux bas, et surtout près de la porte de Clamart ; mais rien n'égale celui de Doisu, connu aussi sous le nom de chêne de Henri III : c'est assurément l'un des plus anciens arbres de la forêt, si même il n'en est pas le doyen. A le voir isolé, on le prendrait pour un de ces chênes que les habitants de l'Épire consacraient à Jupiter. Il se trouve près d'un pavillon que Henri IV a habité, et qui s'est bien conservé jusqu'à présent, quoiqu'il ne soit cimenté que par un torchis, le plâtre n'étant pas connu à cette époque.
Ligne 876 :
C'est ainsi que, dans le violent ouragan qui eut lieu le 18 juillet 1841, une grande partie des baliveaux qui restaient d'une coupe voisine du carrefour du Belvéder, et exposés à toute sa fureur, furent déracinés, brisés ou renversés. La cause avait été si puissante, que les troncs de plusieurs de ces arbres, bien qu'ils fussent des chênes dans toute leur vigueur, étaient comme tordus sur eux-mêmes et réduits en lanières. Il y avait aussi deux ou trois chênes de grande dimension renversés, avec une motte de terre énorme qu'ils avaient entraînée dans leur chute.
 
Ayant eu l'idée de rechercher si les vents pouvaient laisser une empreinte profonde au sein même de la forêt de Meudon, j'en ai précisément acquis la preuve dans le voisinage du lieu où il avait abattu tant d'arbres. La forêt, sur ce point élevé de 164 mètres au dessus du niveau de la mer, et de 44 mètres seulement au dessus du pavé de Versailles, forme un cul-de-sac dont l'ouverture, dirigée du sud-est au nord-ouest, regarde cette ville ; et, pour le dire en passant, c'est précisément la direction que suivent en Europe les vents les plus violents et les plus constants. A mon grand étonnement, j'ai donc reconnu que les chênes, même les plus gros, épars sur le penchant occidental de cette vallée, se trouvaient dans les mêmes conditions que les arbres des côtes de la Manche exposés a toute la fureur des tempêtes ; en effet, leur tête, au lieu d'être pyramidale, s'infléchit et prend une forme que je ne saurais mieux comparer qu'à celle d'un bonnet phrygien , dont la pointe serait tournée vers la colline ; ou bien à celle d'un balai de bouleau qui aurait servi quelque temps dans le même sens, disposition surtout frappante dans les arbres des côtes ; l'action violente et prolongée des vents de nord-ouest sur ce point de la forêt, favorisée encore par la disposition de la vallée, est donc des plus manifestes. Nous avons eu occasion de constater nous-même en Islande et en Laponie<ref>Voyez pages 61 el 366 de la partie géologique et botanique du voyage en Islande el au GroenlandGroënland.</ref> que l'action des vents dominants est telle, qu'elle devient, pour me servir d'une expression capable de rendre ma pensée, rasante ; non seulement les chétifs arbustes de ces contrées septentrionales, sont exactement couchés sur le sol, entre les débris de pierres qui le recouvrent, et leur permet de développer quelques timides bourgeons, mais leurs troncs sinueux indiquent encore parfaitement la direction du puissant agent qui ne cesse d'inquiéter la nature. Enfin, si l'on examine le tronc des gros arbres de la forêt de Meudon, on verra qu'ils sont généralement plus couverts de cryptogames ou plus moussus, dans toute la partie qui correspond au sud-ouest que dans les autres, nouvelle preuve delà permanence des vents humides qui soufflent dans cette direction.
 
Puisque je me suis déjà permis de donner quelques conseils d'économie forestière, j'appellerai encore l'attention sur la terre de bruyère et l'arrachement des mauvaises plantes que son exploitation entraîne.
Ligne 919 :
* Phallus impudicus.
 
'''LYCOPÉRDONNÉESLYCOPERDONNÉES.'''
 
* LycoperdutnLycoperdum cervinum.
 
Observation. Ce champignon, qui ressemble si bien par sa forme à la truffe, et connu aussi sous le nom de truffe jaune ou de truffe de cerf, parce que ces animaux la recherchent, dit-on, à l'époque du rut, a été récemment découvert par M. Chambellant, garde-général, dans la forêt de Meudon, en faisant défoncer une allée près du Mail ; il a été aussi recueilli le long des murs du clos de ce nom, par M. Loron jeune qui le cultive. N'oublions pas de rappeler que ce Sosie végétal déjà observé à Fontainebleau, au bois de Boulogne, et dans lequel beaucoup de personnes, qui ont horreur des champignons de couche, se plaisent, par une singulière contradiction, à ne voir qu'une véritable truffe , passe pour être pernicieux aux hommes<ref>M. Adolphe BrongniarlBrongniart m'a cependant assuré que la véritable truffe ( ''Lycoperdon tuber'') se trouvait aux environs de Paris ; mais elle est facile à distinguer de la fausse (''Lycoperdon cervinum''), avec laquelle les marchands la mélangent, dit-on, aujourd'hui, par sa couleur extérieure noirâtre, et surtout par son odeur ''sui generis''.</ref>.
 
* Lycoperdum lividum.