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de grands chemins d’aujourd’hui et des coupeurs de bourses, que
V
nous punissons de la roue et de la corde ; et voilà ce que Tacite a

le front de louer, pour rendre la cour des empereurs romains
��462 AVANT-PROPOS.
méprisable, par le contraste de la vertu germanique ! Il appartient à un esprit aussi juste que le vôtre de regarder Tacite

(le grands chemins d'aujourd'hui cl des c()i]])cnrs de hourscs, que
nous i)uuissons de la roue et de la corde; et voilà ce que Tacite a
le Iront de louer, pour rendre la cour des empereurs romains
méprisahle, par le contraste de la vertu germanique ! Il appar-
tient à un esprit aussi juste que le vôtre de regarder Tacite
comme un satirique ingénieux, aussi profond dans ses idées que
comme un satirique ingénieux, aussi profond dans ses idées que
concis dans ses expressions, qui a fait la critique plutôt que l'his-
concis dans ses expressions, qui a fait la critique plutôt que l’histoire de son pays, et qui eût mérité l’admiration du nôtre, s’il avait été impartial.
toii'e de son pays, et qui eût mérité radmiralion du nôtre, s'il
avait été impartial.


Quand César passe en Angleterre, il trouve cette île plus sau-
Quand César passe en Angleterre, il trouve cette île plus sauvage encore que la Germanie. Les habitants couvraient à peine
leur nudité de quelques peaux de bêtes. Les femmes d’un canton
vage encore que la fiermanie. Les ha])ilants couvraient à peine
leur nudilé de quelques peaux de bêtes. Les femmes d'un canton
y appartenaient indifféremment à tous les hommes du même
y appartenaient indifféremment à tous les hommes du même
canton. Leurs demeures étaient des cahanes de roseaux, et leurs
canton. Leurs demeures étaient des cabanes de roseaux, et leurs
ornements des figures que les hommes et les femmes s'impri-
ornements des figures que les hommes et les femmes s’imprimaient sur la peau en y faisant des piqûres, et en y versant le
maient sur la peau en y faisant des piqûres, et en y versant le
suc des herbes, ainsi que le pratiquent encore les sauvages de
suc des herbes, ainsi que le pratiquent encore les sauvages de
l’Amérique.
l'Amérique.

Que la nature humaine ait été plongée pendant une longue

suite de siècles dans cet état si approchant de celui des brutes, et

inférieur à plusieurs égards, c'est ce qui n'est que trop vrai. La

î raison en est, comme on l'a dit ^ qu'il n'est pas dans la nature de

j riiomme de désirer ce qu'il m connaît pas. 11 a fallu partout, non-

i seulement un espace de temps prodigieux, mais des circonstances

1 heureuses, pour que l'homme s'élevât au-dessus de la vie ani-

■ maie.

Vous avez donc grande raison de vouloir passer tout d'un coup

aux nations qui ont été civilisées les premières. Il se peut que

longtemps avant les empires de la Chine et des Indes il y ait eu

des nations instruites, polies, puissantes, que des déluges de

j barbares auront ensuite replongées dans le premier état d'igno-

I rance et de grossièreté qu'on appelle l'état de pure na,ture.

j La seule prise de Constantinople a suffi pour anéantir l'esprit

de Tancienne Grèce-. Le génie des Romains fut détruit par les

Goths. Les côtes de l'Afrique, autrefois si florissantes, ne sont

presque plus que des repaires de brigands. Des changements


Que la nature humaine ait été plongée pendant une longue suite de siècles dans cet état si approchant de celui des brutes, et inférieur à plusieurs égards, c’est ce qui n’est que trop vrai. La
1. Voyez Introduction, paragraphe iii; et tome I''"" du Théâtre^ dans Zaïre,
raison en est, comme on l’a dit<ref>Voyez ''Introduction'', paragraphe {{sc|iii}} ; et tome I<sup>er</sup> du ''Théâtre'', dans ''Zaïre'', acte I, sc. {{sc|i}}.</ref> qu’il n’est pas dans la nature de l’homme de ''désirer ce qu’il ne connaît pas''. Il a fallu partout, non-seulement un espace de temps prodigieux, mais des circonstances heureuses, pour que l’homme s’élevât au-dessus de la vie animale.
acte I, se. I.


Vous avez donc grande raison de vouloir passer tout d’un coup aux nations qui ont été civilisées les premières. Il se peut que longtemps avant les empires de la Chine et des Indes il y ait eu des nations instruites, polies, puissantes, que des déluges de barbares auront ensuite replongées dans le premier état d’ignorance et de grossièreté qu’on appelle l’état de pure nature.
2. M. Daunoii remarque que : « En 1453 il no restait à Constantinople que
l'esprit du Bas-Empire; il y avait longtemps que l'esprit de l'ancienne Grèce avait
disparu. Les Turcs n'ont guère asservi que des théologiens, des courtisans et un
peuple déjà esclave. »


La seule prise de Constantinople a suffi pour anéantir l’esprit de l’ancienne Grèce<ref>M. Daunou remarque que : « En 1453 il ne restait à Constantinople que l’esprit du Bas-Empire ; il y avait longtemps que l’esprit de l’ancienne Grèce avait
��
disparu. Les Turcs n’ont guère asservi que des théologiens, des courtisans et un peuple déjà esclave. »</ref>. Le génie des Romains fut détruit par les Goths. Les côtes de l’Afrique, autrefois si florissantes, ne sont presque plus que des repaires de brigands. Des changements
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