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une femme qu’elle est belle, qu’elle est trop belle et qu’elle sait tirer du piano des soupirs, des sanglots et des larmes véritables, et ne pouvoir lui dire que ces deux mots : Oui, monsieur, c’est être dénué plus que de raison du don d’exprimer sa pensée. Pierre Nozière, tu es un infirme, va te cacher ! » Hélas ! je ne pouvais pas même me cacher tout à fait. Il me fallait paraître en classe, à table, en promenade. Je cachais mes bras, mes jambes, mon cou, comme je pouvais. On me voyait encore et j’étais bien malheureux. Avec mes camarades, j’avais au moins la ressource de donner et de recevoir des coups de poing ; c’est une attitude, cela.

Mais avec les amies de ma mère, j’étais pitoyable. J’éprouvais la bonté de ce précepte de l’Imitation :

Fuis avec un grand soin la pratique des femmes.

« Quel conseil salutaire ! me disais-je. Si j’avais fuie Mme Gance dans cette soirée funeste où, jouant un nocturne avec tant de poésie, elle fit passer dans l’air de voluptueux frissons ; si je l’avais fuie alors, elle ne m’aurait pas dit : « Aimez-vous la musique ? »