« Publications démocratiques et communistes » : différence entre les versions

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{{journal|Publications démocratiques et communistes|[[Auteur:Louis de Carné|Louis de Carné]]|[[Revue des Deux Mondes]] T.27, 1841}}
 
==__MATCH__:[[Page:Revue des Deux Mondes - Période initiale, 4e série, tome 27.djvu/728]]==
 
::I – Pamphlets de M. de Lamennais.
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Dans un écrit destiné à organiser au sein des masses le mouvement réformiste, à en provoquer la manifestation par toutes les voies légales, un écrivain de la presse démocratique expose avec franchise la stratégie de l’opinion à laquelle il appartient ; et, s’arrêtant tout à coup devant le vide de cette réforme qu’il vient pourtant de réclamer avec tant d’insistance, il éprouve le besoin de justifier des efforts qu’on taxerait à bon droit de stériles, s’ils n’étaient un premier pas dans cette voie de rénovation dont la réforme serait l’instrument en même temps que le gage.
 
« La vie de notre siècle et de notre pays n’est pas dans cette agitation superficielle des passions politiques, qui ne sont trop souvent par elles-mêmes qu’une fièvre énervante. Elle est dans les idées qui germent, croissent, se ramifient de toutes parts, portant en silence au cœur d l’humanité une sève qui régénère ; un monde intellectuel se forme dans les esprits qui, par une sorte de création nouvelle, transformera le monde des faits, car c’est la destinée fatale de notre génération, en même temps que c’est sa gloire, d’avoir à se refaire elle-même, à refaire ses sentimens, ses intérêts, et jusqu’à son existence physique, par l’effet libre de sa pensée. Ainsi donc, ne nous y trompons pas, c’est au fond de la régénération de l’homme intérieur qu’il s’agit aujourd’hui; ce sont les mœurs, les croyances, la science des choses divines et humaines qui sont surtout à relever de leur prostration. Sans cette rénovation intime, nulle réforme ne serait complète, nul progrès réel et normal. Nous dévoilerions, si notre sujet admettait de telle digressions, comment dans une zone obscure et souterraine de la société actuelle, dans ce qu’on pourrait appeler les catacombes de notre époque, un travail sourd et profond s’accomplit par le développement du sentiment de la fraternité dans le sein des masses, et par l’investigation philosophique la plus hardie comme la plus sérieuse de la part des penseurs. Les hommes qui ne voient de la réalité que son écorce, ne s’imagineraient jamais quel chemin a fait l’esprit humain depuis un quart de siècle, et comment les élémens d’un ordre moral nouveau se montrent déjà dans une conception de la providence divine et de la vie générale du monde, plus large que celle admise aux siècles passés, dans le dogme de la perfectibilité, secondé par une profonde métaphysique, et dans le principe, de mieux en mieux compris, de la solidarité naturelle et obligatoire qui lie les hommes entre eux. De là certainement sortira l’avenir (1)<ref>''Urgence de la reforme électorale en présence des difficultés actuelles'', par Th. Fabas, p. 13. </ref>.
 
« Peuple! s’écrie à son tour le grand écrivain qui n transporté à la souveraineté populaire la dogmatique infaillibilité dont il fit si longtemps l’apanage d’une autre puissance; peuple, réveille-toi enfin! Esclaves, levez-vous, rompez vos fers, ne souffrez pas que l’on dégrade plus long-temps en cous le nom d’homme! Voudriez-vous qu’un jour, meurtris par les fers que vous leur aurez légués, vos enfans disent: Nos pères ont été plus lâches que les esclaves romains! Parmi eux il ne s’est pas rencontré un Spartacus. Il s’en rencontrera, et plus d’un, n’en doutons pas : autrement que resterait-il qu’à jeter un peu de terre sur cette génération maudite et pourrie (2)<ref>''De l’Esclavage moderne'', par F. Lamennais, p. 78. </ref>? »
 
« O peuple, dis-moi, qu’es-tu? Ce que tu es! Si j’ouvre la charte, j’y lis une solennelle déclaration de ta souveraineté: cela fut écrit après ta victoire. Si je regarde les faits, je vois qu’il n’est point, qu’il ne fut jamais de servitude égale à la tienne, car l’esclavage même ne privait l’homme que de sa liberté, le tien te prive de la vie même. Paria dans l’ordre politique, tu n’es, en dehors de cet ordre, qu’une machine à travail. Aux champs, tes maîtres te disent : « Laboure, moissonne pour nous. » Tu sais ce qu’on te dit ailleurs, tu sais ce qui te revient de tes fatigues, de tes veilles, de tes sueurs. Refoulé de toutes parts dans l’indigence et l’ignorance, décimé par les maladies qu’engendrent le froid, la faim, l’air infect des bouges où tu te retires après le labeur des jours et d’une partie de la nuit, réclames-tu quelque soulagement on te sabre, on te fusille, ou, comme le bœuf à l’abattoir, tu tombes sous le gourdin des assommeurs payés et patentés etc. (3)<ref>''Le Pays et le gouvernement'', par F. Lamennais, p. 88. </ref>
 
Pourquoi ces paroles enflammées, pourquoi ce tableau des souffrances humaines qui n’a rien de spécial à notre temps, et cette complaisance à étaler des plaies que jamais peut-être autant de mains ne se sont empressées à guérir ? Est-ce uniquement de pétitions et de signatures Pour la réforme électorale qu’il s’agit au fond de tout cela? Le résultat final d’une telle excitation dans la pensée des hommes qui la provoquent, ne doit-il être qu’une modification à la constitution politique qui nous régit ? Un pareil but suffirait-il pour provoquer le réveil de ces trente-trois millions d’hommes que l’on convie à rompre leurs chaînes ? et ne faut-il pas croire, ne fût-ce que pour excuser ce délire de l’intelligence et de la passion, que l’on poursuit au moins à traverse cette route sombre et sanglante une secrète panacée pour toutes les douleurs, une transformation radicale dans la condition même de l’humanité ? Telle est assurément la pensée de l’auteur, et vous pouvez entendre le tribun se changer en prophète :
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« Voilà ce que le peuple crie avec une voix pareille à celle de l’ouragan ; et moi je couvre mon visage de mes vêtemens déchirés, et je frissonne à l’odeur du feu et du sang (4)<ref>''La Bible de la liberté'', par l’abbé Constant, p. 3, 43, 85, etc. </ref>. »
 
Par respect pour nos lecteurs et pour nous-même, nous ne feuilleterons pas plus long-temps ces sanglantes pages, qui sont dans l’ordre politique ce qu’est dans l’ordre moral le monstrueux romain qu’on n’ose nommer; à côté de la réhabilitation du vol, nous trouverions, en effet, celle du parricide et l’invitation à l’épouse de plonger le fer dans le sein de l’époux qui, « en retenant captive la femme qui ne l’aime plus, attache une vipère sur son cœur.»
 
C’est assez, c’est trop peut-être, car la justice du pays a déjà parlé, et ces hideuses folies ont rencontré devant elles l’autorité du bon sens public et de la loi. Mais la pensée fondamentale qui les inspire, l’éversion du principe de la propriété, se révèle chaque jour, il faut bien le reconnaître et le confesser, sous les formes les plus hardies et les plus diverses. Pendant qu’un troisième transfuge du sacerdoce, l’auteur de la brochure ''Ni châteaux ni chaumières'', justifiait devant la justice ses idées politiques et religieuses, en les présentant comme empruntées à Mably et à Volney, nous lisions avec une curiosité avide et triste l’œuvre d’un esprit original qui porte de remarquables qualités d’écrivain au service d’un parti dont le symbole s’élabore avec une audacieuse persévérance dans les profondeurs où il se cache. L’auteur d’un volume étendu publié sous ce titre : ''Qu’est-ce que la propriété'' (5)<ref>''Qu’est-ce que la Propriété, ou Recherches sur le principe du droit et du gouvernement'' par P.-J. Proudhon. </ref>, a entrepris d’établir par une suite de théorèmes que cette institution est la violation la plus manifeste et la plus insigne de toutes les lois de la nature, de la logique et de l’expérience, et que la propriété ne saurait se défendre en fait non plus qu’en droit. C’est la boite de Pandore, et l’auteur en fait sortir tous les maux sous lesquels gémit l’espèce humaine depuis le commencement des temps; mais tout annonce et présage, selon lui, une transformation radicale de la société, qui, pour trouver le bonheur dont elle a si vainement poursuivi l’image, n’a plus qu’à changer son hypothèse fondamentale, comme Copernic changea celle de la science.
 
La métaphysique et l’algèbre sont tour à tour invoquées dans le hardi procès intenté à la foi des nations, et l’auteur, rejetant avec une apparence de profondeur touts les hypothèses et toutes les théories, s’attache à démontrer qu’aucune d’elles ne constitue d’une manière solide le droit de propriété. Ce droit ne prend pas sa source dans la nature elle-même, comme l’ont voulu Rousseau, Reid, et tant d’autres, car le tien et le mien sont l’expression de droits personnel, il est vrai, mais égaux, et, appliqués aux choses hors de nous, ils indiquent l’usage et non la propriété; ce droit ne résulte pas de l’occupation, ainsi que l’établissement Cicéron, les anciens, et après eux la plupart des jurisconsultes modernes, car si la raison et l’utilité commune consacrent le principe de la paisible jouissance du premier occupant, comment ne pas voir qu’un abîme sépare cette possession, essentiellement subordonnée au double fait de la détention et de l’usage, de la propriété héréditairement et arbitrairement transmissible? La propriété ne sort pas du droit divin, car si Dieu a attribué la terre au genre humain, quiconque n’a rien reçu doit protester contre l’usurpation. Le droit de propriété ne résulte pas davantage du travail, car l’histoire dément formellement cette origine; il n’est pas consacré par le droit des gens, car il a été la source de toutes les calamités sous lesquelles gémissent les peuples, et depuis dix-huit cents ans il est sous le coup des anathèmes de l’Évangile, dont l’église n’a pénétré ni le génie ni la portée. La propriété ne s’appuie donc que sur la loi civile, c’est-à-dire sur la souveraineté de la force, destinée à disparaître bientôt devant la souveraineté du droit. L’avenir maintiendra la possession individuelle en la réglant de manière à déterminer la p1us grande masse de production possible, mais il flétrira la propriété comme il a flétri l’esclavage car la propriété c’est l’esclavage de la nature extérieure. Supprimer le droit de propriété en réglant rationnellement le mode de possession, tel est aujourd’hui le véritable problème à résoudre. Cette difficulté tranchée, l’égalité s’établira naturellement et d’elle-même dans la région du travail, comme elle est établie dans les relations de la vie civile, car, toute capacité travaillant étant de même que tout instrument de travail un capital accumulé, l’inégalité de traitement, de salaire et de fortune, sous prétexte d’inégalité de capacité, est injustice et vol.
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«''Anarchie'', absence de maître, de souverain, telle est la forme de gouvernement dont nous approchons tous les jours, et que l’habitude invétérée de prendre l’homme pour règle, et sa volonté pour loi, nous fait regarder comme le comble du désordre et l’expression du chaos.. Les plus avancés parmi nous sont ceux qui veulent le plus grand nombre possible de souverains, la royauté de la garde nationale est l’objet de leurs vœux les plus ardens. Bientôt sans doute, quelque jaloux de la milice citoyenne dira: Tout le monde est roi; mais, quand ce quelqu’un aura parlé, je dirai, moi : Personne n’est roi, nous sommes, bon gré mal gré, nous, associés. Toute question de politique intérieure doit être vidée d’après les données de la statistique départementale; toute question de politique extérieure est une affaire de statistique internationale. ''La science du gouvernement appartient de droit à l’une des sections de l’Académie des Sciences'', dont le secrétaire perpétuel devient nécessairement premier ministre; et puisque tout citoyen peut adresser un mémoire à l’Académie, tout citoyen est législateur... Tout ce qui est matière de législation et de politique est objet de science, non d’opinion : la ''puissance législative'' n’apparient qu’à la raison méthodiquement reconnue et démontrée.»
 
On éprouve vraiment une impression douloureuse en voyant l’intelligence humaine descendre ainsi par l’escalier de la logique jusqu’au dernier degré de la pauvreté, pour ne pas dire de la démence. Voilà donc les lois merveilleuses dont le monde est en travail ! C’est pour arriver au lieu commun de toutes les écoles, à l’éternelle et banale formule de la souveraineté de la raison, que vous vous constituez en lutte contre l’autorité des siècles! C’est là tout ce que vous avez trouvé au bout de vos argumens! Comment et sous quelles formes comprenez-vous votre société rationalisée, de quelle force coercitive l’armez-vous contre les agressions et les résistances individuelles; quelles règles et quelle croyances substituez-vous à celles qui n’ont jamais fléchi dans la conscience des peuples? Vous n’avez garde de le dire, et vous échappez au vide de votre pensée par le pédantisme de sa forme. Vous triomphez des incertitudes de la science, des contradictions des philosophies et de la confusion des doctrines, et vous sommez la propriété de montrer ses titres sous peine de reculer devant l’audace de vos attaques. Niez donc aussi la liberté, la justice, l’égalité naturelle des hommes, car toutes ces choses ont été contestées, et aucune ne saurait se défendre avec une évidence mathématique. Pourquoi le fort ne prévaudrait-il pas contre le faible, pourquoi l’impérieux instinct les désirs ne serait-il pas la règle des devoirs? Pourriez-vous démontrer la légitimité de l’obéissance et du respect que l’homme porte, dans la plénitude de ses facultés, aux cheveux blancs et à la vieillesse décrépite de son père? Le fils n’est-il pas engendré dans l’insouciance et la volupté, et comment un fugitif souvenir viendrait-il enchaîner sa vie? Cela est-il rationnel, scientifiquement parlant, et le sauvage écrivain dont nous parcourions tout à l’heure les déplorables pages n’établit-il pas aussi, au nom de la suprême raison, et sous forme d’axiome, que c’est le père assassiné et non le fils parricide qu’il faut exposer en spectacle d’épouvante et d’horreur (6)<ref>''La Bible de la liberté'', pag. 92.</ref>?A ces formules algébriques alignées avec une telle confiance, qu’on nous permette de préférer un petit écrit, choisi comme spécimen entre vingt autres publications populaires à peu près semblables. Là, nous trouvons dans sa sincérité naïve le plan de vie de la ruche communiste, tracé par l’un de ces peintres grossiers qui ne cachent pas leurs informes pensées sous un appareil prétentieux. Parcourez cet écrit (7)<ref>''Exposé d’une constitution sociale ayant pour base le dogme de l’égalité, et procurant par là le bien-être à chaque membre de la société'', par Bri.</ref>, destiné à alimenter ces loisirs fébriles des usines à feu continu et les intervalles lucides des plaisirs de la Courtille, et vous y trouverez un tableau complet de la vie démagogique, qui n’a rien à envier aux minutieuses et succulentes peintures tracées par l’auteur du ''Nouveau Monde industriel''.
La France sera divisée en parties égales d’une contenance de cinq à six hectares, au centre desquelles s’élèvera des villes devant sans doute disparaître comme inutiles) une jolie petite maison en briques destinée à chaque famille, à peu près dans le système des cabanes de la vallée suisse au Jardin-des-Plantes. Là chacun trouvera les plaisirs et l’abondance pour prix du service qu’il devra prêter à la société. Dix heures de travail par jour, de seize à cinquante ans, obtenues des trente-trois millions de Français suffisant amplement pour obtenir des résultats fort supérieurs à la masse de la production actuelle, les travailleurs seront libérés de toute obligation sociale passé cet âge. Les condamnations pour crimes et délits augmenteront seules le temps de la tâche individuelle. Pour les états repoussans, le travail finira cinq ans plus tôt, et pour les états dangereux, dix ans avant le terme fixé. Cette prime suffira pour établir entre toutes les professions le nivellement sans lequel toute organisation démocratique est impossible. L’application des machines, de la vapeur et des autres forces naturelles encore inconnues, est destinée d’ailleurs à avancer de plus en plus le terme de cette libération des travaux matériels, qui rendra à l’intelligence humaine la pleine disposition d’elle-même. Le pouvoir, constitué par l’élection, recevra la souveraine mission d’assigner à chacun sa tâche, selon ses dispositions constatées par la voie d’examen ou par les qualités extérieures: œuvre facile, d’ailleurs, du moment où l’égalité des salaires aura enlevé la plus grande partie de leur importance actuelle aux professions d’élite et où le bénéfice d’une vétérance anticipée fera même rechercher comme une faveur le labeur aujourd’hui repoussé par les préjugés. Toute différence devra disparaître entre les deux sexes, quant à l’exercice des droits politiques. La vie sera d’ailleurs commune, en ce sens, du moins, que des dépôts publics fourniront les objets nécessaires à la nourriture, au vêtement et à tous les besoins. Le gouvernement étant le régulateur suprême de l’industrie et du commerce, la production n’excèdera jamais les besoins, appréciés avec une rigueur mathématique. Enfin le signe représentatif des valeurs devra disparaître, puisqu’il n’y aura plus d’échange, et que chacun, sur le vu de sa quittance de travail quotidien ou annuel, recevra de l’autorité sociale les objets législativement affectés à son alimentation et à ses besoins. Sous un état de choses qui garantira à tous, dans un avenir prochain, des jouissances certaines et faciles, la morale dogmatique deviendra comme superflue, et dès-lors sera assurée cette harmonie sociale que les rigueurs pénales et les croyances religieuses sont aujourd’hui impuissantes à maintenir. L’égalité sera enfin réalisée dans les lois, parce qu’elle le sera dans les mœurs, et le pouvoir, assis sur des bases nouvelles et élargies, deviendra le chef et le directeur absolu de toutes les forces individuelles qui se choquent aujourd’hui sous un régime de concurrence aveugle et dévorante.
 
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« Donc, et nous ne saurions trop insister sur ce résultat, la concurrence force la production à s’accroître et la consommation à décroître; donc elle va précisément contre le but de la science économique; donc elle est tout à la fois oppression et folie.
 
« Quand la bourgeoisie s’armait contre les vieilles puissances qui ont fini par crouler sous sa main, elle les déclarait frappées de stupeur et de vertige. Eh bien ! elle en est là aujourd’hui, car elle ne s’aperçoit pas que tout son sang coule, et la voilà qui, de ses propres mains, est occupée à se déchirer les entrailles. Oui, le système actuel menace la propriété de la classe moyenne, tout en portant une atteinte à la propriété des classes pauvres (8)<ref>''Organisation du travail'', par M. Louis Blanc. </ref>. »
 
Ce passage résume d’une manière assez complète la théorie économique dont les esprits réfléchis ne peuvent manquer de suivre les développemens avec une curieuse attention. Des disciples de Say pourraient sans doute objecter à M. Louis Blanc que le système de la concurrence et de la liberté commerciale ne saurait être jugé si vite, et qu’il est impossible de la condamner en dernier ressort sur des applications incomplètes et au milieu des résistances que lui opposent encore la plupart des gouvernemens européens quant à nous, nous n’abordons pas en ce moment ce côte de la question, et notre projet n’est en rien de faire ici de l’économie politique; mais qu’on nous permette de constater la direction inattendue que prennent depuis peu d’années des efforts si long-temps tournés contre tous les pouvoirs, au nom de toutes les libertés.
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Le gouvernement réglerait au début la hiérarchie des fonctions parmi les travailleurs; celle-ci se constituerait plus lard par la voie élective. L’évidente économie et la supériorité incontestable de la vie en commun ne tarderaient pas à faire sortir de l’association des travaux l’association volontaire des besoins et des plaisirs. Ainsi serait radicalement absorbé dans une nouvelle unité le régime de l’isolement et de la rivalité individuelle, et l’hostilité des efforts serait remplacée par leur convergence.
 
Un écrit récent, sorti d’une plume moins exercée, mais plein de faits présentés avec mesure (9)<ref>''De l’Etat des ouvriers et de son amélioration par l’organisation du travail'', par Adolphe Boyen, compositeur typographie. </ref>, a tracé pour ainsi dire pas à pas les degrés divers de cette immense révolution. L’auteur propose de procéder à l’œuvre de l’organisation du travail, vers laquelle la force des choses vient déjà d’entraîner la législature (10)<ref>Loi sur le travail des enfans dans les ateliers et manufactures. </ref>, par une recomposition des conseils de prud’hommes, au sein desquels on ferait enter en proportion égale les délégués des fabricans et ceux des travailleurs; la présidence en serait dévolue à un représentant du gouvernement, modérateur naturel des intérêts contraires. Ces conseils détermineraient un minimum de salaire, réglementeraient les heures, les prix et les autres conditions du travail. Un grand conseil général de l’industrie et du commerce serait formé à Paris, et communiquerait avec tous les conseils locaux. Dans toutes les mairies, des registres seraient ouverts pour inscrire les commandes, les demandes de main-d’œuvre et celles des ouvriers manquant d’ouvrage; ceux-ci seraient acheminés avec indemnité et feuille de route, selon les besoins, dans les diverses localités, d’après le système qui préside aux mouvemens de l’armée ; enfin une direction éclairée par la connaissance complète des faits dominerait l’industrie comme elle domine la défense militaire, l’administration et les finances de la nation.
 
L’idée d’une direction générale émanant de ce grand centre a également inspiré l’auteur d’un travail spécial sur la ''misère des classes laborieuses en France et en Angleterre'', et l’on va voir pa rles paroles suivantes où en sont aujourd’hui dans un grand nombre d’esprits les maximes sacramentelles du ''laissez-faire'' et du ''laissez-passer''
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<small>(1) ''Urgence de la reforme électorale en présence des difficultés actuelles'', par Th. Fabas, p. 13. </small><br />
 
<small>(2) ''De l’Esclavage moderne'', par F. Lamennais, p. 78. </small><br />
 
<small>(3) ''Le Pays et le gouvernement'', par F. Lamennais, p. 88. </small><br />
 
<small>(4) ''La Bible de la liberté'', par l’abbé Constant, p. 3, 43, 85, etc. </small><br />
 
<small>(5) ''Qu’est-ce que la Propriété, ou Recherches sur le principe du droit et du gouvernement'' par P.-J. Proudhon. </small><br />
 
<small> (6) ''La Bible de la liberté'', pag. 92.</small><br />
 
<small> (7) ''Exposé d’une constitution sociale ayant pour base le dogme de l’égalité, et procurant par là le bien-être à chaque membre de la société'', par Bri.</small><br />
 
<small>(8) ''Organisation du travail'', par M. Louis Blanc. </small><br />
 
<small>(9) ''De l’Etat des ouvriers et de son amélioration par l’organisation du travail'', par Adolphe Boyen, compositeur typographie. </small><br />
 
<small>(10) Loi sur le travail des enfans dans les ateliers et manufactures. </small><br />