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mars très froid, marchant, tapant des pieds, courant par les chemins, chaque fois que je venais defermer le livre, dans l’exaltation de la lecture finie, des forces accumulées dans l’immobilité, et du vent salubre qui soufflait dans les rues du village. J’aurais voulu surtout qu’il me dît si j’avais plus de chance d’arriver à la vérité en redoublant ou
32 SÉSAME ET LES LYS
non ma sixième et étant plus tard diplomate ou avocat à la Cour de cassation. Mais aussitôt la belle phrase unie il se mettait à décrire une table couverte « d’une telle couche de poussière qu’un doigt aurait pu y tracer des caractères », chose trop insignifiante à mes yeux pour que je pusse même y arrêter mon attention; et j’en étais réduit à me demander quels autres livres Gautier avait écrits qui contenteraient mieux mon aspiration et me feraient connaître enfin sa pensée tout entière.
mars très froid, marchant, tapant des pieds, cou-

rant par les chemins, chaque fois que je venais de
Et c’est là, en effet, un des grands et merveilleux caractères des beaux livres (et qui nous fera comprendre le rôle à la fois essentiel et limité que la lecture peut jouer dans notre vie spirituelle) que pour l’auteur ils pourraient s’appeler « Conclusions » et pour le lecteur « Incitations ». Nous sentons très bien que notre sagesse commence où celle de l’auteur finit, et nous voudrions qu’il nous donnât des réponses, quand tout ce qu’il peut faire est de nous donner des désirs. Et ces désirs, il ne peut les éveiller en nous qu’en nous faisant contempler la beauté suprême à laquelle le dernier effort de son art lui a permis d’atteindre. Mais par une loi singulière et d’ailleurs providentielle de l’optique des esprits (loi qui signifie
fermer le livre, dans Pexaltation de la lecture finie,
des forces accumulées dans l’immobilité, et du
vent salubre qui soufllait dans les rues du village.
J’aurais voulu surtout qu’il me dît si j’avais plus
de chance d’arriver à la vérité en redoublant ou
non ma sixième et étant plus tard diplomate ou
avocat à la Cour de cassation. Mais aussitôt la
belle `phrase ünie il se mettait à décrire une table
couverte « d'une telle couche de poussière qu’un
doigt aurait pu y tracer des caractères », chose trop
insignifiante à mes yeux pour que je pusse même
yarrêter mon attention; et j’en étais réduit à me
demander quels autres livres Gautier avait écrits
qui contenteraient mieux mon aspiration et me
feraient connaître enfin sa pensée tout entière.
Etc’est là, en effet, un des grands et merveilleux
caractères des beaux livres (et qui nous fera
comprendre le rôle à la fois essentiel et limité que
la lecture peut jouer dans notre vie spirituelle) que
pour l’auteur ils pourraient s’appeler « Conclu-
sions » et pour le lecteur « Incitations ». Nous
sentons très bien que notre sagesse commence où
celle de Vauteur finit, et nous voudrions qu’il
nous donnât des réponses, quand tout ce qu’il
peut faire est de nous donner des désirs. Et ces
désirs, il ne peut les éveiller en nous qu’en nous
faisant contempler la beauté suprême à laquelle
le dernier effort de son art lui a permis d’attein-
dre. Mais par une loi singulière et d’ailleurs pro-
videntielle de l’optique des esprits (loi qui signifie
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