« Aurore (Nietzsche)/Livre deuxième » : différence entre les versions

Contenu supprimé Contenu ajouté
YannBot (discussion | contributions)
m Correction des redirects après renommage
YannBot (discussion | contributions)
m Correction des redirects après renommage
Ligne 1 :
{{TextQuality|75%}}<div class="text">
{{Navigateur|[[Aurore - Livre deuxième - § 142103]]|[[Aurore/Livre deuxième]]|[[Aurore - Livre deuxième - § 144105]]}}
 
''Nos appréciations''. – Il faut ramener toutes nos actions à des façons d’apprécier ; toutes nos appréciations de valeur nous sont propres ou bien elles sont acquises. – Ces dernières sont les plus nombreuses. Pourquoi les adoptons-nous ? Par crainte : c’est-à-dire que notre prudence nous conseille d’avoir l’air de les prendre pour nôtres – et nous nous habituons à cette idée, en sorte qu’elle finit par devenir notre seconde nature. Avoir une appréciation personnelle : cela ne veut-il pas dire mesurer une chose d’après le plaisir ou le déplaisir qu’elle nous cause, à nous et à personne autre, – mais c’est là quelque chose d’extrêmement rare ! Il faudra du moins que l’appréciation que nous portons sur autrui et qui nous pousse à nous servir, dans la plupart des cas, de ses appréciations, parte de nous et soit notre propre motif déterminant. Mais ces déterminations nous les créons pendant notre enfance et rarement nous changeons d’avis à leur sujet ; nous demeurons le plus souvent, durant toute notre vie, dupes de jugements enfantins auxquels nous nous sommes habitués, et cela dans la façon dont nous jugeons nos prochains (leur esprit, leur rang, leur moralité, leur caractère, ce qu’ils ont de louable et de blâmable) et nous croyons obligés de rendre hommage à leurs appréciations.
''Malheur à nous si cette tendance se déchaîne'' ! – En admettant que la tendance au dévouement et à la sollicitude pour les autres (l’« affection sympathique ») soit doublement plus forte qu’elle ne l’est, le séjour sur la terre deviendrait intolérable. Que l’on songe seulement aux sottises que commet chacun, tous les jours et à toute heure, par dévouement et par sollicitude pour lui-même, et quel insupportable spectacle il offre alors : que serait-ce si nous devenions, pour les autres, l’objet de ces sottises et de ces importunités, dont, jusqu’à présent, ils se sont seulement frappés eux-mêmes ! Ne faudrait-il pas alors prendre aveuglément la fuite, dès qu’un « prochain » s’approcherait de nous ? Et accabler l’affection sympathique des mêmes paroles injurieuses dont nous couvrons aujourd’hui l’égoïsme ?
</div>
{{A2}}