« Aurore (Nietzsche)/Livre premier » : différence entre les versions
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''Valeur de la croyance aux passions surhumaines''. — L’institution du mariage maintient opiniâtrement la croyance que l’amour, bien qu’il soit une passion, est cependant susceptible de durer en tant que passion, la croyance que l’amour durable, l’amour à vie peut être considéré comme la règle. Par cette ténacité d’une noble croyance, maintenue, malgré des réfutations si fréquentes qu’elles sont presque la règle et qui en font par conséquent une ''pia fraus'', l’institution du mariage a conféré à l’amour une noblesse supérieure. Toutes les institutions qui ont concédé à une passion la croyance en sa durée et la rendent responsable de cette durée, malgré l’essence même de la passion, lui ont procuré un rang nouveau : et celui qui dès lors est pris d’une semblable passion n’y voit plus, comme jadis, une dégradation ou une menace, mais, au contraire se sent élevé par elle devant lui-même et devant ses semblables. Que l’on songe aux institutions et aux coutumes qui ont fait de l’abandon fougueux d’un moment une fidélité éternelle, du plaisir de la colère l’éternelle vengeance, du désespoir le deuil éternel, de la parole soudaine et unique l’éternel engagement. Par de telles transformations, beaucoup d’hypocrisie et de mensonge s’est chaque fois introduit dans le monde : chaque fois aussi, et à ce prix seulement, une conception surhumaine qui élève l’homme.
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