« Aurore (Nietzsche)/Livre deuxième » : différence entre les versions

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''Aux admirateurs de l’objectivité''. – Celui qui, comme enfant, a remarqué chez les parents et connaissances au milieu desquels il a grandi des sentiments multiples et forts, mais peu de jugements subtils et de penchants vers la justice intellectuelle, celui donc qui a usé sa meilleure force et son temps le plus précieux à imiter ces sentiments : celui-là remarque sur lui-même, lorsqu’il a atteint l’âge d’homme, que toute chose nouvelle, tout homme nouveau, suscitent immédiatement en lui de la sympathie ou de l’aversion, ou encore de l’envie et du mépris ; sous l’empire de cette expérience qu’il est impuissant à secouer, il admire la neutralité des sentiments, l’« objectivité », comme une chose extraordinaire, presque géniale et d’une rare moralité, et il ne veut pas admettre que cette neutralité, elle aussi, n’est que l’enfant de l’éducation et de l’habitude.
''Exciter la pitié''. – Parmi les sauvages, on songe avec un frisson moral que l’on pourrait être plaint : ce serait la preuve que l’on est privé de toute vertu. Compatir équivaut à mépriser : on ne veut pas voir souffrir un être méprisable, cela ne procure aucune jouissance. Voir souffrir par contre un ennemi, que l’on considère comme son égal en fierté, mais que la torture ne fait pas abandonner son attitude, et, en général, voir souffrir tout être qui refuse d’en appeler à la pitié, c’est-à-dire à l’humiliation la plus honteuse et la plus profonde, c’est là la jouissance des jouissances, l’âme du sauvage s’y édifie jusqu’à l’admiration : il finit par tuer un pareil brave, lorsque cela est en son pouvoir, et il lui rend, à lui l’inflexible, les derniers honneurs. S’il avait gémi, si son visage avait perdu son expression de froid dédain, s’il s’était montré digne de mépris, – eh bien ! il aurait pu continuer à vivre comme un chien, – il n’aurait plus excité la fierté du spectateur et la pitié aurait remplacé l’admiration.
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