« Page:Lepelletier - Histoire de la Commune de 1871, volume 2.djvu/434 » : différence entre les versions

Balise : Corrigée
(Aucune différence)

Version du 21 janvier 2022 à 16:43

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

lui une vénération affectueuse et un dévouement attentif.

Comme il réprouvait l’épithète, la couleur, dans l’écriture, il s’abstenait des gestes dans la conversation, à la tribune ou dans le commandement. Il ne s’emballait jamais, et, s’il eut de la haine, cette haine vigoureuse dont parle Alceste, contre les méchants, contre ceux qui abusaient de la force et de l’autorité que le hasard de la naissance ou des circonstances mettaient à leur disposition, il ne témoigna jamais de colère ni de rancune personnelle. Au travers des polémiques de presse et des luttes politiques, il eut beaucoup d’adversaires et peu d’ennemis.

Émile Ollivier, dont il combattait avec âpreté le ministère, a donné sur lui cette impartiale et remarquable appréciation :

Il y a eu, depuis la Révolution Française, une succession d’hommes à l’égard desquels on éprouve un sentiment tout à fait contradictoire. S’arrête-t-on à leurs doctrines, aux écrits et aux actes par lesquels ils les propagent, on les réprouve ; ne considère-t-on que leurs vertus privées, le désintéressement de leur vie de sacrifice, on les admire, en regrettant que tant de vertus n’aient pas été conduites par un peu de bon sens ; et quand, chargé de la puissance publique, on les frappe, parce qu’on est obligé de protéger la société contre leurs insanités, on en souffre et on les plaint. Delescluze est un des hommes à l’égard desquels j’ai le plus vivement éprouvé ce double sentiment, bien que je n’aie jamais eu à sévir contre lui…

(Émile Ollivier. Empire Libéral, t. XI, p. 78.)

Delescluze, comme beaucoup d’hommes de sa génération, que les préoccupations politiques et les destinées sociales accaparaient depuis la jeunesse, bien que suffisamment lettré, se désintéressait des choses de l’art et goûtait peu la littérature. Parfois cependant, on l’entendit participer aux discussions, tour à tour politiques et littéraires, qui s’élevaient entre les habitués du café de Madrid, où il déjeunait