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dans cette journée, il ne fut ni incertain, ni flottant. Il ne voulait pas la bataille ; on l’engagea malgré lui ; il la blâma et la restreignit. Il aurait pu, lorsqu’il vit le combat devenir sérieux et tourner à notre avantage, passer vivement de la défensive à l’offensive, ne pas retenir son monde, le jeter en avant sur des ennemis très inférieurs en nombre, leur infliger une sanglante défaite, peut-être avant la tombée de la nuit, et, dans tous les cas, le matin, en reprenant la bataille à l’aube. Il ne le voulut point parce qu’il n’avait qu’une idée : reprendre le plus tôt possible la marche interrompue sur Verdun. Il se conforme en cela à l’un des principes les plus essentiels, non seulement de l’art de la guerre, mais de toute action humaine. Tout parti a des objections très sérieuses, quelquefois insolubles ; quoi qu’on décide, la critique a beau jeu à s’exercer ; malheur à ceux qui s’arrêtent à l’objection ; ballottés constamment entre deux partis opposés, ils sont certains d’être vaincus. L’état-major prussien, à propos de cette bataille de Borny, l’a rappelé fortement : « L’exécution logique d’une idée, quand même celle-ci ne répondrait qu’en partie aux circonstances données, conduit plus sûrement au but que le passage à des plans sans cesse nouveaux ; car, dans ce dernier cas, les contre-ordres, qui ne peuvent manquer de se produire, suffisent à eux seuls à exercer une influence toujours fâcheuse sur la confiance et l’énergie des troupes. »

On avait, le 13 août, toute liberté d’opter entre la bataille sur la rive droite de la Moselle et la retraite sur les hauteurs de la rive gauche. Bazaine préférait la bataille sur la rive droite, l’Empereur fit prévaloir la retraite sur les hauteurs de la rive gauche. Cette retraite était en train d’exécution et, parce qu’il avait plu à un général prussien de la gêner par son attaque, Bazaine, mettant sa conduite à la discrétion de l’ennemi, aurait abandonné un parti pris après mûr examen pour reprendre celui auquel on avait renoncé ! En agissant ainsi, il n’eût pas été un général sérieux. Et quelles eussent été les conséquences de cette improvisation ? Les Allemands que nous avions devant nous n’étaient pas les troupes de Valmy et de Jemmapes, conduites par Brunswick, qu’une canonnade mettait en déroute, c’étaient des indomptables, du haut en bas de l’échelle, depuis le général jusqu’au soldat, animés du désir furieux de vaincre. Un échec ne les eût pas abattus ; ils avaient prévu le cas d’une offensive