« La pensée française des origines à la Révolution » : différence entre les versions

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Nous avons vu plus haut le rôle considérable que joua Voltaire pour l'introduction de la physique de Newton en France. Ses poèmes satiriques l'avaient fait emprisonner à la Bastille. On le relâcha à condition qu'il sortît du pays ; il partit pour l'Angleterre. C'est là (1726-1729) qu'il fit connaissance avec la nouvelle physique et surtout avec la philosophie nouvelle de Locke. Il devait l'exposer dans ses Lettres philosophiques qui remportèrent un succès considérable, au point que le Parlement ordonna de brûler le livre et d'en rechercher l'auteur. Descartes avait mis au-dessus de tout la raison souveraine. Mais il la voyait comme quelque chose d'immuable, d'universel. Ce devait être quelque chose de parfait chez tous et tout de suite, quelque chose d'« inné » et non d'acquis. C'est justement ce que critiqua Locke, qui montra que cet esprit lui-même se forme, se développe et qu'il tire son développement des sensations qu'il reçoit, donc, en somme, du monde qui nous entoure : rien n'est dans l'entendement, disait-il, qui n'ait été auparavant dans la sensation. Par là, le dualisme que nous avons vu caractériser la métaphysique de Descartes, entre l'esprit et la matière disparaissait ; tout provenait de la sensation ; donc, si l'on poussait la chose jusqu'au bout, de la matière. Les idées de Locke, telles qu'elles furent introduites par Voltaire, devaient jouer un rôle essentiel dans la formation de la doctrine matérialiste. Comme l'a dit Marx, « les Français traitèrent le matérialisme anglais avec esprit, lui donnant de la chair et du sang, de l'éloquence. Ils le dotent du tempérament qui lui manquait encore et de la grâce. Ils le civilisent. »
Condillac (1714-1780), abbé, puis précepteur du fils du duc de Parme, devait pousser jusqu'au bout les critiques de Locke. Pour Locke, nos idées peuvent provenir de deux sources : nos sensations et la réflexion. Condillac va montrer au contraire qu'une seule source suffit, qu'il n'est aucune opération mentale qui ne soit une sensation transformée. C'est là le sensualisme de Condillac. Il af-firme qu'on peut « raisonner en métaphysique et en morale avec autant d'exactitude qu'en géométrie » On supposera donc un être humain privé de sens, puis on fait intervenir les sensations et par l'action den sensations qui agissent les unes après les autres, Condillac montre comment se forment l'attention, la mémoire, l'imagination, la réflexion, le langage... Par là était porté un coup décisif au côté métaphysique de la philosophie de Descartes. Par là aussi était montré le rôle ensentiel que jouent dans le développement de l'homme l'éducation, les circonstances extérieures, point décisif dans lequel le socialisme scientifique verra une de ses origines. Si l'homme tire du monde physique et de l'expérience du monde physique toute connaissance, sensation, etc., il importe donc d'organiser le monde empirique de telle façon qu'il y trouve et qu'il s'assimile ce qui est réellement humain, de telle façon qu'il se reconnaisse comme homme. Si l'homme est formé par les circonstances, il faut former humainement les circonstances. (Karl Marx)
 
 
** '''[[Denis Diderot|Diderot]]'''
 
Les théories de Condillac sont intimement liées au grand mouvement des Encyclopédistes qui va donner au matérialisme français du XVIIIème siècle sa forme la plus achevée. A leur tête se trouve Denis Diderot (1713-1784). Né à Langres, fils d'un coutelier, il vint faire ses études à Paris. Au désespoir de toute sa famille, il adopta la vie qui lui plaisait, celle d'homme de lettres. Elle nourrissait mal son homme à cette époque, et Diderot vécut difficilement, donnant des leçons, exécutant des besognes de librairie. Mais il étudie, ap-prend tout ; les mathématiques, la physique, la médecine et, dès ses premiers ouvrages : Pensées philosophiques (1746), Lettres sur les aveugles à l'usage de ceux qui voient (1749), la conception matérialiste du monde se développe pour achever de se préciser dans les Pensées sur l'interpraation de la Nature (1774), dans le Rêve de d'Alembert (publié après sa mort). C'est Diderot qui a écrit : Il faut tout examiner, tout remuer sans exception et sans ménagement. Il faut renverser les barrières que la raison n'aura point posées.
 
Une critique pénétrante de la religion, voilà ce que nous trouvons dans les Pensées philosophiques. Si la raison est un don du ciel, et que l'on en puisse dire autant de la foi, le ciel nous a fait deux présents incompatibles et contradictoires. Pour lever cette difficulté, il faut dire que la foi est un principe chimérique, et qui n'existe point dans la nature ; et plus loin, il ajoute : Égaré dans une forêt immense pendant la nuit, je n'ai qu'une petite lumière pour me conduire. Survient un inconnu qui me dit : Mon ami, souffle ta bouge pour mieux trouver ton chemin. Cet inconnu est un théologien.
 
Ainsi tout, y compris la religion, doit être soumis à la raison. Si la religion ne satisfait pas aux exigences de la raison, elle doit être abandonnée. Et Diderot, dès lors, d'accumuler les arguments : Une religion vraie, intéressant tous les hommes dans tous les temps et dans tous les lieux, a dû être éternelle, universelle et évidente ; aucune n'a ces trois caractères. Toutes sont donc trois fois démontrées fausses. Les miracles témoignent-ils en faveur de la religion? Prouver l'Évangile par un miracle, c'est prouver une absurdité par une chose contre nature. Et par ailleurs, la religion se justifierait-elle par sa relation avec la morale?
 
 
** '''[[Denis Diderot|Diderot]]'''
** '''[[w:Paul Thiry d'Holbach|D'Holbach]] et [[Claude-Adrien Helvétius|Helvétius]]'''
** '''L'[[w:Encyclopédie ou Dictionnaire raisonné des sciences, des arts et des métiers|Encyclopédie]]'''