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J’ai retrouvé ici la même organisation académique, les mêmes règles de discipline que j’avais observées à Lund. Les étudians d’Upsal sont, comme ceux de Lund, divisés en nations ; mais les nations ici sont plus nombreuses et plus riches. Elles ont amassé des capitaux, elles ont acheté des propriétés. Dans une des parties de la ville qu’on appelle le quartier latin, on m’a montré une grande et élégante maison avec une cour, un enclos, un jardin. Elle appartient à la nation de Dalécarlie, Là est une salle de gymnastique, une salle de conférences, une bibliothèque choisie ; là sont réunis les portraits des hommes de la nation qui se sont distingués par leurs travaux ; là les élèves reçoivent leurs journaux, et viennent, à certains jours de la semaine, discuter, lire, ou faire de la musique.
J’ai retrouvé ici la même organisation académique, les mêmes règles de discipline que j’avais observées à Lund. Les étudians d’Upsal sont, comme ceux de Lund, divisés en nations ; mais les nations ici sont plus nombreuses et plus riches. Elles ont amassé des capitaux, elles ont acheté des propriétés. Dans une des parties de la ville qu’on appelle le quartier latin, on m’a montré une grande et élégante maison avec une cour, un enclos, un jardin. Elle appartient à la nation de Dalécarlie. Là est une salle de gymnastique, une salle de conférences, une bibliothèque choisie ; là sont réunis les portraits des hommes de la nation qui se sont distingués par leurs travaux ; là les élèves reçoivent leurs journaux, et viennent, à certains jours de la semaine, discuter, lire, ou faire de la musique.


L’université leur offre tous les moyens d’instruction que l’on ne trouve ordinairement que dans les grandes villes. Il y a ici un cabinet de monnaies et de médailles fort curieux, un musée d’histoire naturelle, un vaste jardin botanique, un observatoire, et une bibliothèque qui renferme 100,000 volumes<ref> Le catalogue des livres imprimés a été publié en 1814, 3 vol. in-4°. M. Schroeder a fait celui des manuscrits, et doit aussi le publier.</ref> et près de 6,000 manuscrits. Cette bibliothèque a 6,000 fr. de rente. Tous les éditeurs de journaux de la Suède sont obligés, de lui envoyer un exemplaire de la feuille qu’ils publient, et tous les imprimeurs un exemplaire de leurs livres. Elle était trop à l’étroit dans l’ancien bâtiment où elle avait d’abord été placée ; le roi vient de lui faire construire un vaste et superbe édifice où elle pourra désormais se déployer tout à son aise. Peu de villes ont une bibliothèque aussi importante, et cependant elle n’est pas ancienne. Elle fut fondée par Gustave-Adolphe et enrichie par les couvens et les dons des particuliers. La guerre de trente ans lui a donné plusieurs livres d’un grand prix. Les officiers suédois qui s’en allèrent en Allemagne défendre la réformation étaient, à ce qu’il paraît, très bons bibliographes et très dévoués à leur pays. Quand ils trouvaient un ouvrage rare, ils s’en emparaient par le droit de l’épée et le rapportaient en Suède. C’est de là que proviennent quelques-uns des trésors littéraires de la bibliothèque de Stockholm. C’est de là que provient la bible de Luther, annotée à chaque page de sa main même, édition rare, exemplaire consacré par le souvenir de celui qui l’a possédé, trésor envié de toute l’Allemagne. C’est de là que provient aussi une magnifique bible du XIIIe siècle, le plus beau et le plus grand de tous les manuscrits européens<ref> Ce manuscrit a deux pieds et demi de longueur. Il renferme, outre la Bible, différentes prières et des formules d’exorcisme. La chronique rapporte qu’un moine condamné à mort pour avoir violé les lois de son ordre s’engagea à écrire toute la Bible en une nuit, si on voulait lui faire grace. Il s’enferma dans une chambre et appela le diable à son secours. Le diable, qui est toujours prêt à prendre les ames crédules qui veulent bien s’abandonner à lui, accourut aussitôt, écrivit l’énorme volume du soir au matin, et quand le jour parut, emporta le moine en enfer.</ref>.
L’université leur offre tous les moyens d’instruction que l’on ne trouve ordinairement que dans les grandes villes. Il y a ici un cabinet de monnaies et de médailles fort curieux, un musée d’histoire naturelle, un vaste jardin botanique, un observatoire, et une bibliothèque qui renferme 100,000{{lié}}volumes{{lié}}<ref>Le catalogue des livres imprimés a été publié en 1814, {{vol.|3|inv}} {{in-4°}}. M. Schrœder a fait celui des manuscrits, et doit aussi le publier.</ref> et près de 6,000{{lié}}manuscrits. Cette bibliothèque a 6,000{{lié}}{{abr|fr.|francs}} de rente. Tous les éditeurs de journaux de la Suède sont obligés de lui envoyer un exemplaire de la feuille qu’ils publient, et tous les imprimeurs un exemplaire de leurs livres. Elle était trop à l’étroit dans l’ancien bâtiment où elle avait d’abord été placée ; le roi vient de lui faire construire un vaste et superbe édifice où elle pourra désormais se déployer tout à son aise. Peu de villes ont une bibliothèque aussi importante, et cependant elle n’est pas ancienne. Elle fut fondée par Gustave-Adolphe et enrichie par les couvens et les dons des particuliers. La guerre de trente ans lui a donné plusieurs livres d’un grand prix. Les officiers suédois qui s’en allèrent en Allemagne défendre la réformation étaient, à ce qu’il paraît, très bons bibliographes et très dévoués à leur pays. Quand ils trouvaient un ouvrage rare, ils s’en emparaient par le droit de l’épée et le rapportaient en Suède. C’est de là que proviennent quelques-uns des trésors littéraires de la bibliothèque de Stockholm. C’est de là que provient la bible de Luther, annotée à chaque page de sa main même, édition rare, exemplaire consacré par le souvenir de celui qui l’a possédé, trésor envié de toute l’Allemagne. C’est de là que provient aussi une magnifique bible du {{s|xiii}}, le plus beau et le plus grand de tous les manuscrits européens{{lié}}<ref>Ce manuscrit a deux pieds et demi de longueur. Il renferme, outre la Bible, différentes prières et des formules d’exorcisme. La chronique rapporte qu’un moine condamné à mort pour avoir violé les lois de son ordre s’engagea à écrire toute la Bible en une nuit, si on voulait lui faire grace. Il s’enferma dans une chambre et appela le diable à son secours. Le diable, qui est toujours prêt à prendre les ames crédules qui veulent bien s’abandonner à lui, accourut aussitôt, écrivit l’énorme volume du soir au matin, et quand le jour parut, emporta le moine en enfer.</ref>.


Mais il est un homme qui a plus fait pour la bibliothèque d’Upsal que tous les officiers et les bibliomanes de la guerre de trente ans. Son nom doit être
Mais il est un homme qui a plus fait pour la bibliothèque d’Upsal que tous les officiers et les bibliomanes de la guerre de trente ans. Son nom doit être