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LES FÉDÉRÉS

une fois que si tu t’écartes de la ligne constitutionnelle, nous allons t’appliquer le décret de la déportation que tu as refusé de sanctionner. » Au banquet du lendemain, Mireur entonna le chant de guerre de l’armée du Rhin, encore inconnu. Chaque fédéré reçut à son départ un exemplaire de la chanson nouvelle. On exigea de chacun des volontaires un certificat de civisme et la preuve qu’il avait fait son service personnel dans la garde nationale depuis le 14 juillet 1790. Tous les enrôlés étaient des citoyens domiciliés soit à Marseille, soit en Provence. Ce n’était pas un ramassis de brigands, d’échappés de la Glacière d’Avignon, de Nizzards ou d’Italiens comme les représentèrent aussitôt les journaux de la Cour. Au moment du départ, le 2 juillet, le maire de Marseille, le vieux Mouraille, encore vert malgré ses soixante-dix ans, les harangua : « Allez faire pälir le tyran sur son trône qu’il ne mérite plus ! Allez lui dire que le peuple souverain est là pour sanctionner les décrets qu’il a frappés de son monstrueux veto ! » Le bataillon partit, marchant à petites étapes, précédé de deux canons et suivi de trois voitures pour porter les bagages. Il mit vingt-sept jours pour faire la route, semant à tous les échos les paroles de la Marseillaise et enfiévrant les villes et les villages de la passion patriotique dont il brûlait.

Chacun savait que les fédérés préparaient la revanche du 20 juin. Ils étaient encore trop peu nombreux pour tenter un coup de main, le jour de la Fédération. Les premiers arrivés, les Bordelais qui se logèrent à la section des Lombards, la section des épiciers en gros et des denrées coloniales, les Limousins, les Normands, les Jurassiens, qui refusèrent l’invitation que leur fit leur