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de la théorie de la guerre.

On ne peut exclure les grandeurs morales à la guerre.

À la guerre, l’action n’est jamais dirigée contre la matière seule, mais toujours, en même temps, contre la force morale qui anime cette matière et dont on ne saurait la séparer. Or les grandeurs morales se perçoivent par le sentiment, et le sentiment varie non seulement d’un homme à l’autre, mais, d’un moment à l’autre, il est souvent différent chez le même homme.

Le danger étant le milieu constant dans lequel tout se meut à la guerre, c’est particulièrement le courage, c’est-à-dire le sentiment de la force morale que l’on possède, qui détermine le jugement. Le courage est donc en quelque sorte la lentille de cristal par laquelle les impressions passent avant de parvenir à l’intelligence.

On ne saurait douter, cependant, que l’expérience ne donne déjà seule une certaine valeur objective aux grandeurs morales. Chacun connaît les effets moraux de la surprise et de l’attaque de flanc ou de revers ; chacun se sent plus d’audace quand il poursuit que lorsqu’il est poursuivi ; chacun base sa manière d’agir sur ce qu’il sait de l’âge, des talents et de l’expérience de son adversaire ; chacun cherche à pénétrer l’esprit et les dispositions des troupes qu’il commande et de celles qu’il a à combattre ; chacun, enfin, estime moins haut le courage de l’ennemi qui tourne le dos que celui de l’ennemi qui résiste. Or tous ces effets, et tous ceux qui leur sont analogues dans le domaine de la nature morale, sont des résultats de l’expérience, c’est elle qui les enseigne, et, comme ils se sont toujours reproduits, il les faut considérer comme de véritables grandeurs morales dont toute théorie vraiment pratique doit tenir compte. Cependant, pour que ces axiomes prennent le