« L’Auberge de l’Ange Gardien » : différence entre les versions
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Le notaire salua, serra la main que lui tendait le général et sortit pour fumer en se promenant avec quelques amis avant de prendre possession des chambres qui leur avaient été préparées.
{{TextQuality|100%}}==XXII. La noce.==
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Le général était allé surveiller les apprêts du festin pour le lendemain et tous les préparatifs de la fête qui devait se terminer par un bal et un feu d’artifice. À la nuit tombante il alla se coucher ; la journée avait été fatigante, il ronfla dix heures de suite sans bouger.
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On se réunit à sept heures pour déjeuner ; le bonheur était sur tous les visages.
Les deux sœurs se retirèrent avec les enfants, qui ne se possédaient pas de joie de mettre les beaux habits, les brodequins vernis, les chemises à manches à boutons, préparés pour eux.
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Jacques et Paul tinrent le poêle sur la tête du jeune couple ; ils étaient, après Moutier et Elfy, les plus heureux de toute l’assemblée, car aucun souci, aucune inquiétude, aucun souvenir pénible ne se mêlaient à leur joie. Mme Blidot les contemplait avec amour et orgueil. Mais subitement son visage s’assombrit en jetant un coup d’œil sympathique sur Dérigny : la tristesse de son regard lui révéla les inquiétudes qui l’assiégeaient, et à elle aussi la séparation d’avec les enfants lui apparut terrible et prochaine. Elle essaya de chasser cette cruelle pensée et se promit d’éclaircir la question avec Dérigny à la plus prochaine occasion.
La cérémonie était terminée ; Elfy était la femme de Moutier qui la reçut à la sacristie des mains du général. Ils avaient tous les deux l’air radieux. Moutier emmena sa femme, et, suivant la recommandation du général, la mena dans la maison du ''Général reconnaissant'', où devaient se réunir les invités. Toute la noce suivit les mariés, le général toujours en tête, mais cette fois menant Mme Blidot au lieu d’Elfy.
Le général quitta Mme Blidot pour jeter un coup d’œil sur le dîner. Tout était prêt ; il fut content de l’aspect général et revint près d’Elfy pour l’avertir qu’on allait servir. La porte du fond s’ouvrit, et un maître d’hôtel, en grande tenue parisienne, annonça :
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— De la viande ? reprit le général indigné ; où vois-tu de la viande, mon garçon ? »
— Vos poulets ! vos poulets ! reprit le général contenant son indignation. Mon enfant, mais ces bêtes que vous mangez sont des poulardes perdues de graisse, la chair en est succulente…
Le général en était à son dixième verre de vin ; on avait déjà servi du madère, du bordeaux-Laffite, du bourgogne, du vin du Rhin : le tout première qualité. On commençait à s’animer, à ne plus manger avec le même acharnement.
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Chacun goûta, chacun mangea, et chacun en redemanda. Le tour des légumes arriva enfin ; on était à table depuis deux heures. Les enfants de la noce, avec Jacques et Paul en tête, eurent la permission de sortir de table et d’aller jouer dehors ; on devait les ramener pour les sucreries. Après les asperges, les petits pois, les haricots verts, les artichauts farcis, vinrent les crèmes fouettées, non fouettées, glacées, prises, tournées. Puis les pâtisseries, babas, mont-blanc, saint-honoré, talmouses, croquembouches, achevèrent le triomphe du moderne Vatel et celui du général. Les enfants étaient revenus chercher leur part de friandises et ils ne quittèrent la place que lorsqu’on eut bu aux santés du général, des mariés, de Mme Blidot, avec un champagne exquis, car la plupart des invités quittèrent la table en chancelant et furent obligés de laisser passer l’effet du champagne dans les fauteuils où ils dormirent jusqu’au soir.
À la fin du dîner, après les glaces de diverses espèces, les ananas, les fruits de toutes saisons, les bonbons et autres friandises
La journée s’avançait ; le général demanda si l’on n’aimerait pas à la finir par un bal. On accepta avec empressement ; mais où trouver un violon ?
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« Que cela ne vous inquiète pas ! ne suis-je pas là, moi ? Allons danser sur le pré d’Elfy ; nous trouverons bien une petite musique ; il n’en faut pas tant pour danser ; le premier crincrin fera notre affaire. »
La noce se dirigea vers
Les enfants, les jeunes, les vieux, tout le monde dansa ; le général ouvrit le bal avec Elfy, valsa avec Mme Blidot, dansa, valsa toute la soirée, presque toute la nuit comme un vrai sous-lieutenant ; il suait à grosses gouttes, mais la gaieté générale l’avait gagné et il accomplissait les exploits d’un jeune homme. Elfy et Moutier dansèrent à s’exténuer ; tout le monde en fit autant, en entrecoupant les danses de visites aux buffets ; on eut fort à faire pour satisfaire l’appétit des danseurs. À dix heures, il y eut un quart d’heure de relâche pour voir tirer un feu d’artifice qui redoubla l’admiration des invités. Jamais à Loumigny on n’avait tiré que des pétards. Aussi le souvenir de la noce de Moutier à
Jacques et Paul dormirent le lendemain jusqu’au soir, soupèrent et se recouchèrent encore jusqu’au lendemain. Il y eut plusieurs indigestions à la suite de ce festin de Balthazar ; l’habitué de Paris manqua en mourir, le notaire fut pendant trois jours hors d’état de faire le moindre acte.
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