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le cas de dire, en lettres d’or au fronton de toutes les écoles : « Les principes sont faits pour vous mettre vis-à-vis de la nature. » N’est-il pas vrai là-dessus que lorsque Oudry nous dit « que les idées de son maître sur la couleur passaient toute imagination pour la beauté dont elles étaient, » à peine a-t-on le courage de le taxer d’un peu d’exagération ? Il est impossible au moins de ne pas admirer l’aisance et la supériorité de langue avec laquelle sont traitées dans cette conférence les « choses d’atelier, » comme on les appelle ; et ces quelques pages mériteraient d’être classiques.
le cas de dire, en lettres d’or au fronton de toutes les écoles : « Les principes sont faits pour vous mettre vis-à-vis de la nature. » N’est-il pas vrai là-dessus que lorsque Oudry nous dit « que les idées de son maître sur la couleur passaient toute imagination pour la beauté dont elles étaient, » à peine a-t-on le courage de le taxer d’un peu d’exagération ? Il est impossible au moins de ne pas admirer l’aisance et la supériorité de langue avec laquelle sont traitées dans cette conférence les « choses d’atelier, » comme on les appelle ; et ces quelques pages mériteraient d’être classiques.


La théorie du ''Plein air'' n’est pas beaucoup moins explicite dans une conférence de Sébastien Bourdon ''sur la Lumière'' que dans la conférence d’Oudry la théorie des ''valeurs''. Il n’y a que les expressions de changées. Ce que nous appelons les ''valeurs'', Oudry, d’après Largillière, l’appelait les ''oppositions'', et, avant Largillière, on l’appelait les ''reflets'' ; pareillement, ce que nous appelons le ''plein air'', Sébastien Bourdon l’appelait tout simplement la ''lumière''. Ce n’est pas qu’au besoin, tout comme Largillière use du mot ''valeur'', il ne se serve aussi du mot ''plein air''. Il reproche notamment au Caravage de n’avoir « plus su peindre des figures en plein air, » à dater du jour qu’il eut fait acquisition de sa manière nocturne et de sa lumière fausse. Mais cependant l’expression n’est pas encore significative de toute une théorie. Dans cette ingénieuse conférence, le jour est divisé en six parties : l’aube du jour, le lever du soleil, le matin, le midi, l’après-midi, le soleil couchant. « La lumière qui luit dans ces six instans du jour varie dans ses effets à chacun de ces instans, et à chaque fois, elle prend un caractère particulier et distinctif qu’aperçoit aisément quelqu’un qui apporte à sa contemplation des yeux de peintre. » Bourdon définit assez heureusement ces caractères particuliers et distinctifs. Un pas de plus, et il était en possession de ce principe fondamental du paysage moderne qu’à chaque heure du jour la nature a, pour ainsi dire, son frisson particulier, et que c’est ce frisson qui, en vibrant dans la toile, lui donne cet air d’individualité et presque de personnalité même que nous y apprécions surtout. Mais il était peintre d’histoire ! Il s’avisa donc que, « dans un esprit philosophique, » les différens modes de la lumière n’étaient autant d’agens qui influent sur l’âme et l’affectent de mouvemens et de désirs divers, » et là-dessus, s’attachant surtout à marquer les différentes actions, — actions de mouvement, actions de repos, — auxquelles conviennent les diverses lumières, s’il ne manqua pas son sujet, on peut dire du moins qu’il le rétrécit singulièrement, et le diminua de portée. On n’y trouvera pas moins des observations curieuses, et toutes, comme il convient en critique, tirées de l’étude et de l’analyse des œuvres, des ''Soleils levans'' de Claude Lorrain et des ''Bacchanales'' de Titien.
La théorie du ''Plein air'' n’est pas beaucoup moins explicite dans une conférence de Sébastien Bourdon ''sur la Lumière'' que dans la conférence d’Oudry la théorie des ''valeurs''. Il n’y a que les expressions de changées. Ce que nous appelons les ''valeurs'', Oudry, d’après Largillière, l’appelait les ''oppositions'', et, avant Largillière, on l’appelait les ''reflets'' ; pareillement, ce que nous appelons le ''plein air'', Sébastien Bourdon l’appelait tout simplement la ''lumière''. Ce n’est pas qu’au besoin, tout comme Largillière use du mot ''valeur'', il ne se serve aussi du mot ''plein air''. Il reproche notamment au Caravage de n’avoir « plus su peindre des figures en plein air, » à dater du jour qu’il eut fait acquisition de sa manière nocturne et de sa lumière fausse. Mais cependant l’expression n’est pas encore significative de toute une théorie. Dans cette ingénieuse conférence, le jour est divisé en six parties : l’aube du jour, le lever du soleil, le matin, le midi, l’après-midi, le soleil couchant. « La lumière qui luit dans ces six instans du jour varie dans ses effets à chacun de ces instans, et à chaque fois, elle prend un caractère particulier et distinctif qu’aperçoit aisément quelqu’un qui apporte à sa contemplation des yeux de peintre. » Bourdon définit assez heureusement ces caractères particuliers et distinctifs. Un pas de plus, et il était en possession de ce principe fondamental du paysage moderne qu’à chaque heure du jour la nature a, pour ainsi dire, son frisson particulier, et que c’est ce frisson qui, en vibrant dans la toile, lui donne cet air d’individualité et presque de personnalité même que nous y apprécions surtout. Mais il était peintre d’histoire ! Il s’avisa donc que, « dans un esprit philosophique, » les différens modes de la lumière « étaient autant d’agens qui influent sur l’âme et l’affectent de mouvemens et de désirs divers, » et là-dessus, s’attachant surtout à marquer les différentes actions, — actions de mouvement, actions de repos, — auxquelles conviennent les diverses lumières, s’il ne manqua pas son sujet, on peut dire du moins qu’il le rétrécit singulièrement, et le diminua de portée. On n’y trouvera pas moins des observations curieuses, et toutes, comme il convient en critique, tirées de l’étude et de l’analyse des œuvres, des ''Soleils levans'' de Claude Lorrain et des ''Bacchanales'' de Titien.


Indépendamment de l’intérêt spécial qu’elles offrent, et dont nous
Indépendamment de l’intérêt spécial qu’elles offrent, et dont nous