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grands étages. Ces entre-sols servaient de logement aux hommes et aux femmes de la domesticité intime de la famille royale. Les portes en sont enfoncées à coups de hache. Les assassins immolent les heiduques de la reine. Madame Campan, sa femme de chambre favorite, et deux de ses femmes de service, se précipitent aux genoux des égorgeurs. Leurs mains embrassent les sabres levés sur elles. « Que faites-vous ? s’écrie d’en bas la voix d’un Marseillais ; on ne tue pas les femmes ! — Levez-vous, misérables, la nation vous fait grâce, » répond un homme à longue barbe qui venait d’assassiner un heiduque. Il fit monter les trois femmes sur une banquette placée dans l’embrasure d’une fenêtre, où la foule pouvait les voir et les entendre, et leur dit de crier : « Vive la nation ! » La foule battit des mains.

Deux huissiers de la chambre du roi, MM. Sallas et Marchais, qui pouvaient s’évader en livrant la porte, meurent pour obéir à leur serment. Ils enfoncent leur chapeau sur leur tête et mettent l’épée à la main : « C’est ici notre poste, disent-ils aux Marseillais ; nous voulons tomber sur le seuil que nous avons juré de défendre. » L’huissier de la chambre de la reine, nommé Diet, reste seul, factionnaire généreux, à l’entrée de l’appartement où les femmes sont réfugiées, et tombe en la défendant. Son cadavre, couché en travers de la porte, sert encore de rempart aux femmes. La princesse de Tarente, qui entend tomber ce dernier et fidèle gardien, va elle-même ouvrir la porte aux Marseillais. Leur chef, frappé de l’assurance et de la dignité de cette femme devant la mort, contient un moment sa troupe. La princesse, tenant par la main la jeune et belle Pauline de Tourzel, que sa mère lui a confiée : « Frappez-moi, dit--