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LA FÉERIE ROMANTIQUE EN FRANCE

Ce n’est point l’âme de la Grèce, mais celle de la Bretagne qui résonne dans cette phrase : « Né au pied du mont Taygète, me disais-je, le triste murmure de la mer est le premier son qui ait frappé mon oreille en venant à la vie. À combien de rivages n’ai-je pas vu se briser les mêmes flots que je contemple ici ?… Quel sera le terme de mes pèlerinages ?…

Les rôles sont intervertis. Au lieu du Grec Eudore pleurant son exil au bord des mers armoricaines, nous voyons le Breton Chateaubriand pleurant sa destinée au bord des mers hellènes. La note spéciale de Chateaubriand, c’est qu’il se complaît à pleurer. Telles de ses phrases ressemblent à d’admirables coquillages, et lors même qu’elles nous apparaissent un peu creuses, elles nous touchent parce que nous y sentons bruire — avec quel charme mélodieux ! — la plainte immense de la vie.

Cette Velléda échevelée — fée où Muse — qui saut parfois nouer à la grecque ses beaux cheveux blonds, aime comme les Morgane, les Viviane, les Alcine, les Armide.…

La première fois qu’Eudore l’aperçoit, elle porte une robe noire, parce qu’elle s’apprête à dévouer les Romains aux dieux de sa race, et elle a pour véhicule une petite barque où elle chante et d’où elle jette dans l’eau diverses offrandes. Plus tard, elle aime à parler de ses privilèges supposés de druidesse et de fée. « Je me glisserai chez toi sur les rayons de la lune ; je prendrai la forme d’un ramier, et je volerai sur le haut de la tour que tu habites. » Ainsi rêve Velléda, mais Eudore comprend qu’elle rêve. Il la rencontre à Karnac parmi les pierres druidiques du Champ mystérieux, et elle lui parle du séjour des