« Page:Sévigné - Lettres, éd. Monmerqué, 1862, tome 7.djvu/511 » : différence entre les versions

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employé d’esprit dans les badineries qu’il a faites, qu’il n’y en a dans les poëmes les plus achevés.
employé d’esprit dans les badineries qu’il a faites, qu’il n’y en a dans les poëmes les plus achevés.


« Pour M.{{lié}}de la Fontaine, c’est le plus agréable faiseur de contes qu’il y ait jamais eu en France. Il est vrai qu’il en a fait quelques-uns où il y a des endroits un peu trop gaillards ; et quelque admirable ''enveloppeur''<ref>9. Le mot est pris de Furetière. Jean de la Fontaine se vante d’un malheureux talent qui le fait valoir : il prétend qu’il est original en l’art d’''envelopper'' des saletés et de confire un poison fatal aux âmes innocentes : de sorte qu’on lui pourroit donner à bon droit le titre d''’Arétin mitigé''. » Voyez le second des ''Factums'' de Furetière, tome {{rom-maj|I|}}, {{pg}}181 du ''Recueil'' qu’en a donné M.{{lié}}Asselineau, et p. {{rom|LI}} et {{rom|LII}} de l’''Introduction'' de l’éditeur.</ref> qu’il soit, j’avoue que ces endroits-là sont trop marqués ; mais quand il voudra les rendre moins intelligibles, tout y sera achevé. La plupart de ses prologues, qui sont des ouvrages de son cru, sont des chefs-d’œuvre de l’art ; et pour cela, aussi bien que pour ses fables et pour ses contes, les siècles suivants le regarderont<ref>10. Dans le manuscrit de la Bibliothèque impériale : « et pour cela, aussi bien que pour ses fables, les siècles suivants le regarderont, etc. »</ref> comme un original, qui à la naïveté de Marot a joint mille fois plus de politesse.
« Pour M.{{lié}}de la Fontaine, c’est le plus agréable faiseur de contes qu’il y ait jamais eu en France. Il est vrai qu’il en a fait quelques-uns où il y a des endroits un peu trop gaillards ; et quelque admirable ''enveloppeur''<ref>9. Le mot est pris de Furetière. Jean de la Fontaine se vante d’un malheureux talent qui le fait valoir : il prétend qu’il est original en l’art d’''envelopper'' des saletés et de confire un poison fatal aux âmes innocentes : de sorte qu’on lui pourroit donner à bon droit le titre d''’Arétin mitigé''. » Voyez le second des ''Factums'' de Furetière, tome {{rom-maj|I|}}, {{pg}}181 du ''Recueil'' qu’en a donné M.{{lié}}Asselineau, et p. {{rom|LI}} et {{rom|LII}} de l’''Introduction'' de l’éditeur.</ref> qu’il soit, j’avoue que ces endroits-là sont trop marqués ; mais quand il voudra les rendre moins intelligibles, tout y sera achevé. La plupart de ses prologues, qui sont des ouvrages de son cru, sont des chefs-d’œuvre de l’art ; et pour cela, aussi bien que pour ses fables et pour ses contes, les siècles suivants le regarderont<ref>10. Dans le manuscrit de la Bibliothèque impériale : « et pour cela, aussi bien que pour ses fables, les siècles suivants le regarderont, etc. »</ref> comme un original, qui à la naïveté de Marot a joint mille fois plus de politesse.


« Je connois extrêmement M.{{lié}}de Benserade, et je l’ai vu toute ma vie à la cour. Je n’ai jamais vu M.{{lié}}de la Fontaine, et je ne le connois que par ses ouvrages ; mais je les estime tous deux infiniment dans leurs manières différentes, et cela m’oblige, Monsieur, de vous dire bonnement ce que je pense en cette rencontre, qui est que ces deux hommes sont si connus et si établis pour gens d’un génie et d’un mérite extraordinaires, que vous ne sauriez les vouloir mépriser sans vous faire tort, et sans rendre suspectes les vérités que vous pourriez dire contre les autres. Encore une fois, Monsieur, je vous assure que je n’ai jamais vu M.{{lié}}de la Fontaine, et que c’est la justice seule et votre intérêt qui me font vous parler ainsi. J’ai trouvé d’ailleurs tant de raison dans votre défense, que j’ai augmenté l’estime que j’avois déjà pour vous. Et ne pensez pas que les remontrances que je viens de vous faire me fassent prendre leur parti et les vouloir excuser s’ils ont tort à votre égard. Je dirai, quand j’en serai persuadé, que ce sont deux hommes<section end="994"/>
« Je connois extrêmement M.{{lié}}de Benserade, et je l’ai vu toute ma vie à la cour. Je n’ai jamais vu M.{{lié}}de la Fontaine, et je ne le connois que par ses ouvrages ; mais je les estime tous deux infiniment dans leurs manières différentes, et cela m’oblige, Monsieur, de vous dire bonnement ce que je pense en cette rencontre, qui est que ces deux hommes sont si connus et si établis pour gens d’un génie et d’un mérite extraordinaires, que vous ne sauriez les vouloir mépriser sans vous faire tort, et sans rendre suspectes les vérités que vous pourriez dire contre les autres. Encore une fois, Monsieur, je vous assure que je n’ai jamais vu M.{{lié}}de la Fontaine, et que c’est la justice seule et votre intérêt qui me font vous parler ainsi. J’ai trouvé d’ailleurs tant de raison dans votre défense, que j’ai augmenté l’estime que j’avois déjà pour vous. Et ne pensez pas que les remontrances que je viens de vous faire me fassent prendre leur parti et les vouloir excuser s’ils ont tort à votre égard. Je dirai, quand j’en serai persuadé, que ce sont deux hommes<section end="993"/>