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état de la province.

était arrêté pour la même accusation dont il venait d’être déchargé, les juges déclarèrent qu’ils ne pouvaient pas prendre sur eux de le décharger, et qu’il leur suffisait d’avoir le warrant d’un magistrat pour l’envoyer en prison. Il serait terrible aussi que des juges de leur propre chef, pussent décider que l’accusé est coupable ou non, et le laisser échapper à leur gré. Voilà ce qu’ont fait les juges à Montréal, et voilà encore quel a été la conséquence d’une malheureuse lettre, écrite avec précipitation. Quand il s’agit si directement de la conservation de nos vies, ne pouvons-nous pas dire que les juges influencés par un gouverneur, ont pris sur eux la discrétion illégale de décharger des individus accusés de meurtre, sans l’intervention d’un petit jury. On nous reproche de prendre une attitude menaçante, qui devra avoir l’effet de faire rejeter nos représentations. Et bien ! que faut-il faire ? attendre, et souffrir encore vingt ou trente ans ? et serons-nous plus avancés après ce temps ? Il faudra toujours en venir à la même détermination et dire, qu’il y a des droits qui nous appartiennent, et dont nous voulons jouir. Nous n’avons qu’à nous demander si nous sommes bien gouvernés ; si nous le sommes mieux qu’au temps que M. Neilson fut envoyé comme agent en Angleterre ; et si l’on prouve que nous ne jouissons pas de la constitution, quel avantage y a-t-il d’attendre un demi-siècle sans la demander ? L’Angleterre a promis de rendre les Canadiens heureux. Nous le prions d’effectuer cette promesse, l’assurant que c’est le moyen de resserrer les liens d’attachement entre cette colonie et la mère-patrie. Mais si vous voulez nous priver de nos droits de sujets britanniques, si vous voulez nous gouverner avec une verge de fer, si vous voulez nous opprimer, vous êtes forts, vous pouvez le faire : mais rappelez-vous que vous le ferez sur votre propre responsabilité, et que vous ne devez compter sur notre attachement qu’autant que vous serez forts et que nous serons faibles. Quand un gouvernement est tyrannique, qu’il se met au-dessus des lois, et qu’il règne par l’arbitraire et le caprice, le peuple est justifiable d’employer des moyens violens pour s’y soustraire, et il est de son devoir de ne s’y pas soumettre ; mais si l’oppression du gouvernement a une apparence de légalité, si cette oppression est fondée sur des moyens constitutionnels, le peuple doit aussi la repousser par des moyens constitutionnels, tels que sont des requêtes, des représentations. Mais, dit-on, nos représentations ne seront point écoutés : en serons nous pis ? on nous ôtera le contrôle des argens ; l’avons-nous jamais eu ? on emploiera contre nous le système coercitif mis en opération en Irlande par le ministre actuel ; dans ce cas, ne veut-il pas mieux périr que de vivre esclaves ? Quoiqu’il en soit, je voterai ces résolutions d’après ma conscience, et j’en prends sur moi toute la responsabilité.

M. Gugy : J’ai eu occasion d’entendre dire à l’hon. membre pour la Haute-Ville de Québec. M. Stuart, que les résolutions sont destructives de tous droits constitutionnels, et je m’attendais qu’il soutiendrait les amendemens de M. Neilson, qui tendent à les modifier ? À ma grande surprise, je vois qu’il s’oppose aux unes et aux autres. Toutefois j’en appellerai à ses propres connaissances, aux connaissances qu’il a des affaires, pour qu’il me dise s’il ne conviendrait pas de laisser ces amendemens à la considération de la chambre, et de ne point commencer par préjuger la question. Ce sont des considérations que je lui sousmets. Il y a devant cette chambre d’autres objets dont je m’occuperai. On ne m’avait pas dit quel plan l’on avait formé par rapport aux résolutions, présentées par M. Bedard, ni qu’un membre, entré d’hier dans cette chambre, M. Child en serait. Cependant j’avais cru pouvoir prédire le sort de ces résolutions, et je m’étais douté que la division était déjà toute faite d’avance. Le 19 après la discussion, je me suis retiré avec plusieurs autres membres. Ma raison était que je ne voulais point voter contre la première résolution, qui a rapport à la vertu et à la loyauté des Canadiens, et que je connais trop bien moi-même leur dévouement dans une occasion où il leur était si aisé d’être traîtres ; mais d’un autre côté, je ne pouvais pas non plus voter pour cette résolution, étant liée à d’autres que je désapprouve. Je n’ai pas été sans espérance que plus tard on pourrait peut-être mitiger ce premier emportement ; je vois que je me suis trompé. J’ai depuis étudié ces résolutions ; et je me suis apperçu qu’elles ont des modèles dans l’histoire politique des États-Unis. Vers l’année 1770, il s’agissait de pareilles résolutions dans le Connecticut, et les mêmes objets à peu-près y étaient pris en considération. On y parlait de paix et de loyauté, et l’on songeait à la révolution. L’on y cherchait aussi des sujets de plainte et de querelles. Par quelle fatalité faut-il qu’on ne s’occupe dans les corps délibératifs qu’à chercher des sujets de querelles, pour avoir le plaisir de les repousser ? J’ai dit sous quelles circonstances je me suis retiré. J’ai appris depuis que M. L’orateur, désirant me faire la réponse qu’il m’avait promise, avait regretté mon absence, et moi-même je regrette de n’y avoir pas été. Pour plusieurs raisons je désirerais que la chambre se formât de nouveau en comité, pour prendre en considération les résolutions et les amendemens : j’aimerais à voir les Hon. membres, MM.  Papineau, Stuart et Neilson, faire essai de leurs forces les uns contre les autres. Du choc des opinions d’hommes aussi éclairés, soutenant chacun un parti différent, il devrait résulter de nouveaux éclaircissemens, conformes à l’intérêt général du peuple, et de la postérité qui doit le suivre. Ces considérations m’induisent à prier les membres de cette chambre de se rappeler que les résolutions leur ont été offertes sous des circonstances désavantageuses ; qu’elles ont été votées un jour auparavant que je m’attendais qu’elles nous seraient soumises, et d’ailleurs elles ont rapport aux questions les plus importantes qui aient jamais été discutées dans cette chambre. Si je demande d’entrer de nouveau eu comité, ce n’est pas que j’es-